"Un véritable trou noir qui aspire tout autour de lui" : comment Facebook est devenue l’application la plus téléchargée au monde
Facebook est actuellement, et de loin, l'application la plus téléchargée au monde. Son empire ne cesse de s'étendre et de se diversifier. Mais si le réseau social et ses filiales semblent indétrônables, l'hégémonie du groupe n'est pourtant pas gravée dans le marbre.
Publié le 04-10-2021 à 14h55 - Mis à jour le 04-10-2021 à 18h27
La Terre en septembre 2021, c’est une population de 7,89 milliards d’êtres humains. Facebook en septembre 2021, selon les dernières statistiques du réseau social, c’est 2,89 milliards d’utilisateurs quotidiens actifs. En moins de 20 ans (“The Facebook” a été mis en ligne en 2004), la plateforme est parvenue à s’étendre à tous les continents, toutes les couches sociales, et est devenue l’application la plus téléchargée au monde, en comptabilisant pas moins de… 4,6 milliards de téléchargements sur la décennie 2010-2020. Retour sur les éléments qui ont permis cette ascension fulgurante.
La révolution des applications
Pour comprendre l'explosion du marché des applications, il faut remonter en 2008. En juillet, Apple lance l'AppStore après avoir commercialisé son tout premier iPhone. La marque à la pomme est imitée en octobre par Google et son Android Market (futur PlayStore). Fournis à l'époque d'une petite centaine d'applications, les deux commerces numériques vont stimuler le marché des applications au point d'en voir bientôt des milliers être disponibles.
En parallèle de cette révolution, Facebook connaît également un déploiement sans précédent, s'imposant petit à petit comme la référence des réseaux sociaux. Au fil des années et des rachats, la famille Facebook va également accueillir Messenger, Instagram et bien sûr WhatsApp. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les membres de ce conglomérat se retrouvent dans les premières places des applications les plus téléchargées, établi à la fin de la décennie 2010-2020 par AppAnnie :
Étouffer la concurrence… ou la racheter
Pour Nicolas Van Zeebroeck, professeur d'économie et de stratégie numérique à Solvay et l'ULB, plusieurs facteurs expliquent cette hégémonie facebookienne. "La force de Facebook ou de Google, c'est qu'ils peuvent racheter tout ce qui pourrait leur faire de l'ombre.Imaginez: vous développez une application, et alors qu'elle ne génère pas de profits, on vous propose plus d'un milliard de dollars. C'est difficile à refuser, mais c'est parfois aussi le but recherché par certains entrepreneurs", entame-t-il, citant les rachats d'Instagram et WhatsApp pour plusieurs milliards de dollars chacun.
“Ces groupes ont aussi une grande capacité de réactivité. S’ils ne peuvent pas les racheter, ils imitent ce qui fonctionne chez les autres pour ne pas se faire déborder. Troisièmement, il y a aussi une part d’innovation et de qualité de service, c’est d’ailleurs leur argument principal : ‘si nous avons tant de succès, c’est parce que nos produits sont les meilleurs au monde’.”
Enfin, Facebook bénéficie également de l'effet de réseau. "Les réseaux sociaux n'ont d'intérêt que s'ils sont adoptés par une grande partie de la population. A ce titre, Facebook représente un véritable trou noir qui aspire tout ce qui gravite autour de lui."
Des phénomènes qui, une fois conjugués, érigent d’imposantes barrières qui peuvent empêcher de nouveaux acteurs de venir se faire une place sur le marché.
TikTok, Snapchat... Qui pourra ébranler l’empire Facebook ?
Malgré tout, certains parviennent à rivaliser avec le duo Facebook-Google. Le classement des applications les plus téléchargées en 2020 permet de constater la combativité d’acteurs indépendants ou l’émergence de nouveaux. Certains sur des services différents (Netflix, Tinder), d’autres sur des segments similaires : Telegram, TikTok ou Snapchat. De quoi faire trembler Facebook ?
"De nouveaux acteurs peuvent émerger et déstabiliser Facebook, rien n'est jamais acquis. Des chocs internes (erreurs stratégiques) ou exogènes (mise en place d'une régulation plus stricte du secteur) peuvent altérer la situation actuelle, comme ce fut le cas pour Microsoft à la fin des années 1990. Ce qui est préoccupant, ce sont les barrières qui existent pour ces nouveaux acteurs. Lorsque des écosystèmes larges et diversifiés commencent à apparaître, les obstacles à franchir pour entrer sur le marché deviennent colossaux. Finalement, en dépit de tous les scandales, de toutes les critiques et de l'apparition de nouvelles plateformes, la vigueur de l'utilisation des produits Facebook reste constante", concède Nicolas Van Zeebroeck.
Mais si Facebook est parvenu à détrôner MySpace au début des années 2000, qui sait si un autre réseau social parviendra un jour à le faire tomber de son piédestal.