Publicité ciblée grâce à vos données personnelles: l’arme de "survie" des chaînes TV face aux Gafam ?
Diffuser des spots publicitaires différents selon les téléspectateurs, une réalité qui intéresse de plus en plus les acteurs du secteur. Une publicité ciblée pourrait rapporter environ trois fois plus qu’un spot envoyé "au hasard".
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Publié le 22-11-2021 à 10h34 - Mis à jour le 09-12-2021 à 21h16
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Vos données personnelles sont une véritable mine d’or dans beaucoup de domaines et la télévision n’y échappe pas. Ou n’y échappe plus. Car grâce à votre décodeur, les informations que vous acceptez de partager (ou non) et vos habitudes de consommation, le ciblage de la publicité que l’on vous met devant les yeux peut être de plus en plus précis. Un atout qui intéresse beaucoup d’acteurs de l’audiovisuel.
Depuis quelques années, Proximus travaille, par exemple, sur l'addressable advertising donc. Pour faire simple, deux téléspectateurs différents sont susceptibles de ne pas voir les mêmes spots lors des coupures publicitaires s'ils regardent une chaîne qui utilise ce service. Que ce soit en temps réel comme en replay.
"Cela fait des années que l'on travaille là-dessus mais c'est en production depuis janvier 2020. On travaille avec SBS, DPG, donc Telenet, dans le nord du pays et avec IP (soit RTL) et RMB (RTBF et AB3) dans la partie francophone ", détaille Bart Swimberghe, responsable en solutions publicitaires chez Proximus.
Lutter contre les géants américains ?
Pour lui, c'est un système gagnant à tous les niveaux. "Pour le consommateur, ça permet d'avoir des spots plus pertinents, plus ciblés grâce à ses données. Pour les annonceurs, ça combine les atouts du digital et de la télévision classique. Ils peuvent utiliser les data, mesurer l'audience, tout en profitant de l'impact de la télévision, de sa couverture toujours très importante", se réjouit-il.
"On voit que les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) s'emparent d'une grosse partie des revenus publicitaires. C'est donc une façon d'attirer des annonceurs et de récupérer des revenus. C'est une façon de se battre contre ces géants américains ", tient-il à préciser avant d'habilement ajouter que : "Pour nous, ce qui est primordial, c'est de soutenir l'écosystème des médias local. Car si les revenus diminuent, ça peut pénaliser la qualité des contenus".
Un nouveau marché
Quoi qu'il en soit, cela permet de créer un nouveau marché pour Proximus, d'intéresser les annonceurs comme les chaînes. Une publicité ciblée pourrait rapporter environ trois fois plus qu'un spot envoyé "au hasard". De plus, pas moyen d'éviter les publicités, comme c'est souvent le cas sur Internet. Un piège pour les consommateurs ? "Cela permet tout de même de proposer des spots plus ciblés selon les comportements des consommateurs et donc éviter les tunnels publicitaires rébarbatifs pour de la lessive ou de la nourriture pour chien alors qu'on est plus intéressé par le bricolage par exemple", nous signalait pour sa part Philippe Zrihen récemment, le dirigeant d'AB3, qui préfère voir le côté positif : "On dit que la télévision linéaire est un vieux dinosaure mangé par le numérique. Mais non, elle a encore pas mal d'années devant elle. Le système économique change très vite. La viabilité du linéaire trouve un second souffle, c'est une révolution pour la consommation télévisuelle".
Bart Swimberghe avoue que le contexte publicitaire a souffert de la crise sanitaire mais la tendance à la publicité ciblée est claire. "On a constaté une belle croissance cette année. On a fait 500 campagnes depuis le début. Cela reste une petite partie des investissements totaux des chaînes mais ça continue à croître", glisse-t-il.
Si la publicité ciblée semble donc être une arme très intéressante pour les chaînes et les annonceurs, cela représente par contre une charge de travail importante pour les équipes marketing, qui doivent repenser leurs stratégies. Les durées des spots doivent être strictement similaires pour que ces derniers soient interchangeables. Cibler les spectateurs et leur proposer des publicités adaptées, cela peut sembler simple sur le papier, mais il faut pouvoir y arriver. Selon Bart Swimberghe, les principales chaînes ainsi que les opérateurs se sont accordés pour simplifier la vie des annonceurs. En apportant un service clair, avec des données "labellisées", des termes harmonisés. Reste à ceux-ci à adapter les campagnes selon les publics cibles et leurs spécificités potentiellement récupérables (familles, genres, âge, comportements…).
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Flippant ?
Certains avancent que ce ciblage peut être inquiétant. Mais pour Bart Swimberghe, outre le "service publicitaire" plus pertinent, le consentement est demandé de manière claire et spécifique. Un écran à part entière informe les téléspectateurs de cette nouveauté et les abonnés sont totalement libres de choisir et ce en connaissance de cause. "Ce n'est pas caché dans un texte ou une case à cocher sur un écran général ", assure-t-il. De plus, les données transmises aux annonceurs sont anonymisées, dans le cadre du règlement sur la protection des données.