ChatGPT : "Nous ne sommes pas dans le fantasme du Terminator qui veut se débarrasser de nous"
L’intelligence artificielle dont tout le monde parle est capable d’imaginer des lignes de code informatique. Ceci est “normal”, d’après les experts.
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Publié le 07-02-2023 à 11h43 - Mis à jour le 07-02-2023 à 11h49
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Le chatbot d’OpenAI répond depuis le mois de novembre à toutes les questions des utilisateurs. L'entreprise américaine OpenAI – dont l’infrastructure de calcul est financée par Microsoft qui vient de réinvestir plusieurs milliards – a en effet bien "marketé" son lancement en offrant un essai gratuit de la version beta. L'outil aurait dépassé les 100 millions d'utilisateurs en janvier !
Une version payante ChatGPT Plus, avec notamment des temps de réponse rapides, a quant à elle été lancée aux Etats-Unis et sera "prochainement" proposée à d'autres pays pour une vingtaine de dollars par mois. Microsoft a également annoncé intégrer des fonctionnalités du chatbot dans sa nouvelle version premium de l'application Teams.
ChatGPT a les mêmes capacités qu’un LaMDA de Google (technologie sur laquelle s'appuie le nouvel outil Bard lancé ce lundi) ou un Galactica de Meta, d’autres réseaux de neurones artificiels orientés sur le traitement automatique du langage. A noter que le géant chinois Baidu a également lancé son "Ernie Bot" en phase de test ce mardi.
“OpenAI a cependant été plus cavalier que ses concurrents, davantage établis en tant qu’entreprises et donc plus prudents pour le lancement et la promotion”, décrypte Gilles Louppe, professeur en intelligence artificielle (IA) à l’ULiège. La stratégie d’OpenAI a créé un buzz médiatique qui fait qu’aujourd’hui, c’est bien de ChatGPT dont on vante à tout-va la puissance. Une puissance qui, inévitablement, inquiète. L’outil est notamment capable de corriger et d’écrire par lui-même des lignes de code informatique. Or, le fonctionnement de notre société tout entière dépend de lignes de code. L’IA fréquemment qualifiée de “révolutionnaire” pourrait-elle venir perturber notre vie quotidienne ?
”ChatGPT n’a rien de magique”
”Arthur Clarke disait : 'Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie'. Mais non, ChatGPT n’a rien de magique. La dernière version 3.5 a nécessité le recours à de la main-d’œuvre pour la classification de données, une main-d’œuvre souvent issue de pays du Sud à des fins de réduction des coûts”, pose Denys Malengreau, expert en économie numérique basé à Bruxelles. Rassurons-nous un peu en démystifiant la technologie et en rappelant comment elle a été fondée.
”Au tout début, le réseau de neurones ChatGPT a été pré-entraîné à lire des lignes de code informatique et à compléter des programmes. Il est donc normal aujourd’hui que l’outil soit capable de déchiffrer et d’écrire du code, pointe Gilles Louppe. ChatGPT peut lire le début d’un programme en langage informatique et suggérer une suite, tout en dialoguant avec l’utilisateur en français. Mais je ne crois pas que l’outil puisse prendre le contrôle : il a l’imagination pour créer du code, mais pas la capacité de l’exécuter”.
50 % de tout le contenu texte du web
Après avoir lu des lignes de code, l’outil s’est entraîné à lire 570 gigabytes (GB) de données sur le web pour un total de 300 milliards de mots, soit, selon l’estimation de Gilles Louppe, environ la moitié de tout le texte qui se trouve sur le web depuis l’invention d’Internet ! Son but était d’arriver de plus en plus à prédire le mot suivant. Enfin, des humains ont travaillé à juger si les réponses de ChatGPT étaient acceptables ou non, c’est-à-dire pas insultantes, méchantes, vulgaires, racistes, etc.
”Je comprends qu’il existe un fantasme du Terminator de l’intelligence artificielle qui veut se débarrasser de nous, mais l’Homme a toujours le monopole de la création ex nihilo, conclut Denys Malengreau. De son côté, Vitalik Buterin, brillant cofondateur de la cryptomonnaie Ethereum, a par exemple montré les limites de ChatGPT en lui soumettant un problème concret de code informatique à résoudre. Si l’outil s’est révélé être un assistant utile, il n’a nullement pu se substituer à la compétence de l’informaticien”. On peut encore mentionner le fait que ChatGPT a réussi des examens de prestigieuses écoles de droit ou de commerce, mais sans avoir les meilleures notes. À l’inverse, une autre intelligence artificielle nommée AlphaCode est, elle, capable de résoudre parfaitement des épreuves extrêmement poussées de compétitions d’informatique. En clair, ChatGPT, aussi populaire qu’il soit, n’est pas infaillible.