Arnaques, publicités déguisées, pratiques douteuses: comment la Belgique veut stopper les dérives des influenceurs ?
Les professionnels de l’influence sont devenus des relais incontournables dans la stratégie de communication des marques. Une proposition de loi déposée par Les Engagés vise à assainir le secteur et le cas échéant sanctionner les acteurs les moins scrupuleux.
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- Publié le 07-06-2023 à 06h51
- Mis à jour le 07-06-2023 à 10h21
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Arnaques, fraudes, promotion d’articles dangereux, pratiques douteuses, exploitation des enfants, publicités déguisées, concurrence déloyale…
Dans le monde des influenceuses et influenceurs – qui aiment à se qualifier plutôt désormais comme des “créatrices et créateurs de contenus” – les dérives restent encore trop nombreuses. Et les jeunes, grands consommateurs des réseaux sociaux, en sont souvent les premières victimes.
Vide juridique
En Belgique comme ailleurs, cette activité est en plein développement. Chez nous, le marché de l’influence, même s’il accuse un certain retard par rapport au marché français par exemple, représenterait déjà 90 millions d’euros sur une base annuelle. Un chiffre probablement sous-évalué. Car ces influenceuses et influenceurs sont devenus des relais incontournables dans la stratégie de communication des marques. Et selon le baromètre SMI publié cette année, un quart des Belges qui suivent des influenceurs sur les réseaux sociaux ont effectué un achat à la suite de leurs recommandations au cours des trois derniers mois.
Cette proposition de loi concerne tout ce qui sera diffusé en Belgique. Les influenceurs basés à Dubaï et ceux étrangers à Union européenne (UE) devront désigner un représentant légal dans l’UE."
Et pourtant, il n’existe pas à ce stade en Belgique de législation contraignante balisant, sanctions éventuelles à l’appui, les pratiques de ces “faiseurs de tendance”. La France vient, elle, de combler cette lacune, l’Assemblée nationale et le Sénat ont approuvé il y a quelques jours un texte permettant de réguler le secteur.
Quatre grands objectifs
Chez nous, pour le moment, seul un guide de bonnes pratiques existe, édicté par le SPF Économie et qui balise les devoirs et obligations des influenceuses et influenceurs. Mais cela pourrait bientôt changer. Une proposition de loi visant à encadrer l’influence commerciale numérique va ainsi bientôt être déposée par Vanessa Matz (Les Engagés), co-signée par Georges Dallemagne, Maxime Prévot et Catherine Fonck. “Nous nous sommes inspirés de loi française, de ce guide de bonnes pratiques, des sanctions qui existent déjà dans le droit économique et avons modifié dans le code du travail la loi de 1971 sur le travail des enfants. Le monde de l’influence ne doit pas être une zone de non-droit et doit répondre à des règles de protection des consommateurs suffisamment étoffées pour mettre fin aux dérives constatées”, nous explique Vanessa Matz.
Le texte de la proposition de loi a ainsi quatre grands objectifs : encadrer et responsabiliser les influenceurs, protéger les abonnés et les consommateurs, réglementer le travail des enfants sur les plateformes numériques et leur permettre le droit à l’oubli et enfin responsabiliser les grandes plateformes numériques. Le texte prévoit des sanctions pénales et administratives ainsi qu’une possible interdiction d’exercer pour les influenceurs qui violeraient les interdictions ou obligations. Et afin de permettre une éventuelle indemnisation des victimes un principe de responsabilité solidaire entre l’annonceur et l’influenceur est prévu.
Logique de régulation
On le sait, bon nombre d’influenceuses et influenceurs sont basés à l’étranger, notamment à Dubaï. “Ici, cette proposition de loi concerne tout ce qui sera diffusé en Belgique. Les influenceurs basés à Dubaï et ceux étrangers à l'Union européenne (UE) devront désigner un représentant légal dans l’UE et souscrire une assurance responsabilité civile”, ajoute encore Vanessa Matz.
Autre volet de cette proposition de la loi : la bonne information du public. Ainsi, les photos ou vidéos modifiées à l’aide de filtres (NdlR : pour affiner une silhouette par exemple) devront contenir la mention “images retouchées” et les visages ou silhouettes produits par l’intelligence artificielle devront comporter la mention “images virtuelles”. Les droits à l’image et à l’oubli seront également reconnus aux influenceurs mineurs. “Nous sommes dans une logique de régulation et non d’interdiction. Nous avons essayé d’envisager toutes les situations possibles. En France, un texte de ce type a été adopté à l’unanimité. Nous sommes donc confiants et nous mettons un pied dans la porte pour débattre de ce sujet qui concerne tout le monde”, conclut Vanessa Matz.