De plus en plus d’entreprises demandent à leurs employés de revenir au bureau: “Je préfère démissionner que perdre mes jours de télétravail”
Alors que les entreprises voudraient voir revenir leurs collaborateurs au bureau, quatre Belges sur dix aimeraient au contraire travailler davantage depuis leur domicile.
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- Publié le 01-09-2023 à 11h11
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À son retour au travail après 15 jours de vacances en Corse, la surprise de Sabrina (prénom d’emprunt) fût de taille. Alors qu’elle pouvait travailler depuis son domicile à raison de quatre jours par semaine depuis trois ans, son entreprise spécialisée dans le domaine des assurances a soudainement demandé à ses employés de revenir à temps plein au bureau.
"Il n'y a eu aucune concertation avec les travailleurs en amont, cela a été très mal vécu en interne, raconte cette Namuroise âgée de 35 ans. Je n'aurais eu aucun souci à parler avec ma direction, à diminuer mes jours de télétravail mais l'annonce a été trop violente, d'autant plus que notre productivité n'était pas du tout en baisse. Depuis le début, il y a un manque d'écoute et de communication avec les travailleurs à ce sujet, on sent qu'il existe un manque de confiance. Pour moi, il est très clair que je préfère démissionner plutôt que de perdre mes jours de télétravail, notamment pour l'équilibre entre vie privée et vie professionnelle".
Après des années où elles autorisaient le télétravail, de plus en plus de grandes entreprises, notamment aux États-Unis et dans d’autres pays européens, ont en effet décidé d’obliger leurs salariés à revenir au bureau.
Pour autant, l’heure du RAB - comme "retour au bureau" - a-t-elle sonné ? Bien ancré en Belgique depuis la pandémie, le télétravail est devenu structurel chez nous et ne semble pas menacé à moyen terme. En 2022, 43 % des Belges affirmaient que leur emploi leur permettait de télétravailler.
La fin de l’âge d’or du télétravail ?
"À certains hauts niveaux de management, il y a une forme de peur d'accorder trop de confiance aux employés, explique Lara Delloye, Senior Consultant Strategy&Transformation auprès du cabinet de conseil BDO, une entreprise qui conseille les sociétés en matière de gestion du travail à domicile. Après les années Covid, on remarque une certaine tendance à vouloir cadrer davantage le télétravail et l'organisation de manière générale".
Et alors que de plus en plus d'entreprises voudraient que leurs collaborateurs reviennent à temps plein au travail, quatre Belges sur dix aimeraient au contraire travailler davantage chez eux. C'est ce qui ressort d'une enquête auprès de 1 000 Belges actifs réalisée pour le compte du consultant BDO. Une politique de télétravail claire représente dès lors un atout important pour la moitié des répondants, mais cet élément fait défaut dans 35 % des entreprises. "Le télétravail est là pour durer, affirme-t-elle. Une bonne politique et une communication claire à ce sujet sont donc incontournables. Dans tous les cas, il y aura toujours un cadrage donné par l'entreprise à ce niveau-là car si on laisse la liberté à chacun de faire le choix qu'il préfère, il risque d'y avoir des iniquités au sein des équipes. Le conseil principal, c'est vraiment d'opter pour une vision claire et communiquée à l'ensemble de l'entreprise et à l'heure actuelle, ce n'est pas le cas. Souvent, on s'arrête à une formalité dans le contrat de travail sans communication saine ni anticipée. Sur le terrain, on voit beaucoup d'entreprises et de managers qui ont besoin d'aide et d'encadrement".
Les experts sont d'ailleurs unanimes : rien de tel que des accords clairs entre employeur et travailleur pour développer une forme durable et efficace de télétravail. En principe… Car seulement 37 % des collaborateurs indiquent que leur entreprise a mis en place une politique sans équivoque. 21 % ont passé des accords informels concernant le télétravail et pour 35 %, aucune politique n'existe en la matière. Au sein de la société BDO, on mise en tout cas sur une approche personnalisée du télétravail. "Chez nous, c'est l'équipe qui décide de la meilleure formule, dévoile Elke Verstraetene, employée au sein du cabinet de conseil. L'organisation n'impose rien, on a une vision et une politique simples avec peu de règles. On pense vraiment que c'est l'équipe et le personnel qui doit prendre ces décisions. Tout cela doit bien être pris dans la balance et on laisse les équipes se gérer tout en se responsabilisant".