La flambée du brut, aubaine pour l'Etat

La flambée du pétrole brut sur les marchés internationaux - 60pc de hausse en un an - constitue une aubaine pour l'Etat qui empoche, grâce au jeu des taxes et accises, de substantiels bénéfices. Bien que le marché soit très volatil et que les projections soient sujettes à caution, la Fédération pétrolière s'est livrée à notre demande à une «estimation» qui donne une idée de l'ampleur de la manne récoltée.

PIERRE LOPPE
La flambée du brut, aubaine pour l'Etat
©AP

ÉCLAIRAGE

La flambée du pétrole brut sur les marchés internationaux - 60pc de hausse en un an - constitue une aubaine pour l'Etat qui empoche, grâce au jeu des taxes et accises, de substantiels bénéfices. Bien que le marché soit très volatil et que les projections soient sujettes à caution, la Fédération pétrolière s'est livrée à notre demande à une «estimation» qui donne une idée de l'ampleur de la manne récoltée.

1 Recettes nettes en TVA. A compter du 1er janvier 2005 jusqu'à ce jour et en considérant que les prix actuels resteront stables jusqu'à la fin de l'année - une hypothèse évidemment théorique... -, la hausse des recettes nettes annuelles en TVA pour l'Etat sera sans doute comprise entre 100 et 140 millions d'euros, déduction faite du supplément de coût supporté par l'Etat lui-même pour son utilisation propre (126 millions d'euros). Il faut savoir, en effet, que l'Etat consomme environ 600000 tonnes de carburants et de combustibles pour le charroi de ses véhicules, le chauffage de ses bâtiments, etc. Et que pour l'ensemble de l'année 2004, la TVA sur les carburants lui a rapporté 1,564 milliard d'euros.

« La fourchette de 100 à 140 millions est une estimation qui tient compte notamment d'une forte concentration de hausses en août. Elle relève du bon sens et est opérée en toute bonne foi », souligne Gaëtan van de Werve, secrétaire général de la Fédération pétrolière qui insiste sur le fait que l'ascension du pétrole a des répercussions négatives sur la croissance (1pc selon ING) et, par voie de conséquence, sur les rentrées fiscales globales...

2 Recettes d'accises. A supposer que les volumes de carburants consommés restent inchangés par rapport à 2004, la hausse des recettes d'accises peut être estimée à 220 millions d'euros pour 2005, soit 55 millions sur l'essence et 165 millions sur le diesel. Globalement, celles-ci dépasseront ainsi 4 milliards d'euros pour l'année entière (contre 3,876 milliards en 2004). « Il ne faut pas perdre de vue que les accises, contrairement à la TVA, relèvent d'une décision légale, qu'elles sont déterminées pour une période donnée et qu'elles n'évoluent pas au gré des cotations internationales », rappelle M. van de Werve.

3 Impact sur le prix final. Le niveau actuel des produits pétroliers s'explique en grande partie par l'importante augmentation des droits d'accises lorsque le pétrole se situait à un prix très inférieur, jusqu'en en 2003 et 2004. Au lieu de faire bénéficier le consommateur de cette conjoncture favorable, l'Etat a pris le pli d'augmenter les accises sur les carburants. Concrètement, il a décidé d'utiliser les baisses de prix pour augmenter les accises à concurrence de la moitié de ces baisses jusqu'à fin 2007... avant d'introduire un correctif entrant en vigueur lorsque le diesel atteint 1,10€ (ce qui est le cas aujourd'hui) et que l'essence dépasse 1,50€ (ce qui ne l'est pas encore). Rappelons à toutes fins utiles que la fiscalité indirecte représente la majeure partie du prix final du produit au consommateur, soit quelque 66pc du prix maximum des essences et 53pc de celui du diesel...

4 Essence contre diesel. La vive progression du diesel (plus de 400pc en 30 ans!), et plus particulièrement le transfert de la consommation d'essence vers celle de diesel (78pc du volume actuel des carburants écoulé à la pompe), entraîne un manque à gagner fiscal croissant vu que les accises sur l'essence s'élèvent à 0,59€ et qu'elles sont de 0,36€ sur le diesel. Chaque fois qu'un automobiliste délaisse la première pour le deuxième, l'Etat enregistre, en ce qui le concerne, une perte sèche de 39pc.

L'Etat sera-t-il tenté de procéder incessamment à un rééquilibrage et d'accroître les accises sur le diesel? En fait, ce processus est déjà en cours puisqu'au terme des quatre années de «cliquet positif», le prix du m3 d'essence passera, entre 2003 et 2007, de 507 à 648€ et celui du diesel de 290 à 438€ (écart ramené dès lors de 217 à 210€). Sans oublier que le prix du produit varie en fonction de l'offre et de la demande et que si le diesel est actuellement moins cher que l'essence (618 dollars la tonne contre 649), l'inverse s'est déjà vérifié plus d'une fois...

© La Libre Belgique 2005

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