Prévenir le burn-out ?
Résultat d’une tension continue, le burn-out touche de nombreux travailleurs. Et si on pouvait agir avant qu’il n’arrive ?
Publié le 24-08-2013 à 05h43 - Mis à jour le 28-08-2013 à 05h37
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Quand c’est trop, c’est trop. Malheureusement, les cas vécus de burn-out abondent. Et quand il y a burn-out, c’est que c’est trop tard. Mais peut-on réellement "le voir venir" ? Doctorante à l’UCL, Régine Sponar a développé un outil innovant sur la prévention du burn-out, un "Stress Early Warning System". Il permet d’intervenir avant le crash ou l’épuisement. Si la doctorante développe son produit pour les particuliers, elle a cédé les droits à Galilei, filiale de Randstad, pour le proposer aux entreprises. "J’ai géré Galilei pendant 5 ans et ai vu plusieurs de mes collègues en souffrance. Des collègues compétents qui, le plus souvent, visent la perfection, pensent être indispensables et travaillent dans l’urgence en mode multitâche. Je n’ai pas pu les empêcher de s’écrouler", raconte Jean-Philippe Mulders, aujourd’hui consultant exécutif et responsable du projet "Preventing burn-out Test" chez Galilei. "Une collègue m’a mis en contact avec Régine Sponar qui finalisait son doctorat. Son concept m’a paru intéressant à développer pour le monde des entreprises."
Comment fonctionne ce test ? Il s’agit d’une analyse détaillée sur base d’un questionnaire de 8 indicateurs qui peuvent être sources de tension ou de bien-être dans la vie professionnelle et la vie privée : la situation professionnelle, les nouvelles technologies, la situation familiale, la situation physique, l’alimentation et la nutrition, la situation financière, la vie sociale, les loisirs et le sport, et, enfin, l’intelligence émotionnelle et la gestion des émotions. "Il est essentiel de balayer toutes les sphères. Le professionnel est souvent le déclencheur du burn-out, mais il y a toujours un facteur privé qui est associé. Le dérapage intervient en général suite à une séparation, un décès,…", explique Jean-Philippe Mulders.
Concrètement, le test s’effectue en quatre séances d’une heure trente espacées de dix jours. Les séances se font chez Galilei. "C’est important que le collaborateur sorte de l’environnement de l’entreprise", précise Jean-Philippe Mulders. Le collaborateur est invité à répondre à toute une série de questions avec l’un des consultants de Galilei. "C’est une différence fondamentale avec d’autres tests de prévention qui ne se font que devant un écran d’ordinateur. Ici, il y a vraiment un échange avec le consultant", note Jean-Philippe Mulders. "Le collaborateur a aussi l’occasion de faire une réelle introspection. Entre deux séances, il a le temps de réfléchir. C’est très important, car les personnes proches du burn-out ne prennent ni le temps ni le recul pour se poser les bonnes questions."
Le but recherché est d’accentuer les indicateurs de bien-être et de réduire les indicateurs de stress grâce à l’utilisation appropriée de son intelligence émotionnelle, et ce, afin de redonner à l’employé de l’énergie et de l’efficacité positive et durable. "Il est essentiel que nous intervenions avant. Si le candidat est en burn-out, c’est trop tard", insiste Jean-Philippe Mulders.
Mais encore faut-il identifier les collaborateurs susceptibles d’être proches du burn-out. Le test se fait à la demande du manager qui constate qu’un de ses collaborateurs est en souffrance, ou du travailleur lui-même. "Le travailleur se rend compte que cela ne va pas, mais il ne sait pas comment s’en sortir", note Jean-Philippe Mulders qui rajoute : "Les managers ne sont pas encore formés à détecter les collaborateurs proches du burn-out. Nous songeons à mettre en place une formation pour les y aider. Mais je pense que la majorité des managers et des responsables des ressources humaines voient quand un collaborateur est proche du dérapage. Le problème est que, souvent, on le sent venir, mais on n’a(vait) pas d’outils pour intervenir."
Le test implique une réaction. A la 4e session, une évaluation est déjà faite. "On essaye de voir avec la personne ce qu’elle va mettre en place pour réagir : rouvrir le dialogue avec son manager, faire une thérapie de couple, changer d’alimentation,… Après la dernière séance, la personne reprend sa vie en main avec l’aide de son manager, du DRH, d’un médecin,…", précise le consultant qui préfère ne pas quantifier les résultats obtenus par ce test préventif. "Le fait de venir le faire représente déjà 50 % du succès. Les gens prennent déjà le temps d’arrêter le temps. C’est important. Ceux qui ont le courage de venir ont toutes les chances de s’en sortir."
Mais si un outil existe, faut-il encore qu’il soit accepté. "Le sujet reste délicat à aborder dans l’entreprise. La direction n’aime pas trop l’idée que ses employés sont en souffrance. Et les travailleurs eux-mêmes ne veulent pas toujours le reconnaître. Comment faire prendre conscience à ces personnes qui sont performantes qu’elles ont besoin d’aide ? On ne peut pas obliger quelqu’un à faire le test. Sinon, cela n’a pas de sens", déclare Jean-Philippe Mulders qui estime qu’il "faut du courage pour aborder ce thème en entreprise. C’est un sujet qui interpelle, mais le burn-out n’est que la partie visible de l’iceberg. Notre système économique a trouvé ses limites. Il faudrait que chacun prenne son bâton de pèlerin pour éviter que tout le système dérape".