Crise grecque: pour Mario Draghi (BCE), "cette fois c'est réellement difficile"
La Grèce a jusqu'à jeudi minuit pour présenter à ses partenaires européens un nouveau programme de réformes afin de les convaincre de rouvrir les vannes de l'aide financière et de garder le pays dans la zone euro. Mais le président de la BCE Mario Draghi "ne sait pas" si la Grèce pourra être sauvée de la faillite.
Publié le 09-07-2015 à 07h15 - Mis à jour le 09-07-2015 à 10h45
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Le président de la Banque centrale européenne (BCE) ne s'est guère montré rassurant dans le journal italien Il Sole 24 Ore. Comme le rapporte l'agence Reuters, Mario Draghi a déclaré ne pas être certain que la crise grecque sera réglée. "Cette fois, c'est réellement difficile", a-t-il ainsi affirmé.
Il a ajouté en outre ne pas croire à la possibilité d'une aide russe à la Grèce si les Européens n'arrivaient pas à un compromis. "Je n'y crois pas, je ne le perçois pas comme un risque véritable (...) et de toute façon, ils n'ont eux-mêmes pas d'argent", confie le président de la BCE.
La BCE doit arrêter de financer la Grèce, plaide la Bundesbank
L'Allemand Jens Weidmann, membre du conseil des gouverneurs de la BCE, a estimé jeudi que l'institution monétaire ne devait plus fournir d'aide d'urgence à la Grèce et appelé les gouvernements européens partenaires d'Athènes à assumer cette tâche.
"Il doit être parfaitement clair que la responsabilité concernant de nouveaux développements en Grèce et toute décision de transfert de ressources financières est désormais du ressort du gouvernement grec et des pays lui apportant de l'aide, et non du conseil des gouverneurs de la BCE", a déclaré lors d'un discours à Francfort M. Weidmann, gouverneur de la Bundesbank, la banque centrale allemande.
"Les banques centrales doivent montrer où résident leurs limites", a ajouté le gouverneur, opposant déclaré aux aides d'urgence (ELA) que prodigue depuis des mois la BCE aux banques grecques, fragilisées par des retraits massifs de leurs clients.

Athènes a jusqu'à minuit pour proposer un programme de réformes
La Grèce a jusqu'à jeudi minuit pour présenter à ses partenaires européens un nouveau programme de réformes afin de les convaincre de rouvrir les vannes de l'aide financière et de garder le pays dans la zone euro.
Mercredi, à la tribune du Parlement européen à Strasbourg, le Premier ministre grec Alexis Tsipras s'est engagé à le faire, en évoquant "de nouvelles propositions concrètes de réformes crédibles", comme le lui réclame la zone euro en contrepartie d'un troisième plan d'aide.
Le "programme complet" promis par M. Tsipras devra être envoyé à ses partenaires avant jeudi minuit, puis examiné par les créanciers et soumis samedi aux ministres des Finances de la zone euro.
Si ce programme donne satisfaction, les dirigeants européens pourront officiellement donner le coup d'envoi des négociations sur ce nouveau programme d'aide dimanche, lors d'un sommet exceptionnel à Bruxelles élargi aux 28 pays de l'Union européenne, les conséquences politiques de la crise grecque s'étendant bien au-delà de la seule zone euro.
Dans le cas contraire, cette réunion pourrait se transformer en sommet de crise, amorçant une sortie de la Grèce de la monnaie unique.
La Grèce a adressé formellement mercredi à la zone euro, son principal créancier, une nouvelle demande d'aide, accueillie comme un geste "positif" par la France et l'Espagne, deux des pays les plus souples à l'égard de la Grèce, cependant minoritaires face aux tenants d'une ligne dure, Allemagne en tête.
"Cette demande, cette lettre, est équilibrée, positive. Elle fait preuve d'une réelle volonté d'avancer et de réformes", a assuré le Premier ministre français Manuel Valls.
L'Allemagne n'a pas réagi à la nouvelle demande d'Athènes.
Quant au Fonds monétaire international (FMI), un des principaux créanciers de la Grèce, sa directrice générale Christine Lagarde a pris le contre-pied des Européens en jugeant "nécessaire" une restructuration de la dette grecque qu'ils ne veulent pas évoquer pour l'instant.
En pleine épreuve de force entre la Grèce et ses créanciers, exaspérés après des mois de négociations houleuses, le ton s'est fait de plus en plus alarmiste ces derniers jours, les partenaires européens de la Grèce évoquant désormais sans tabou le "scénario noir" du Grexit, la sortie du pays de la zone euro.
"Sans unité, nous allons nous réveiller dans quatre jours dans une Europe différente", a lancé mercredi Donald Tusk, le président du Conseil européen, appelant la Grèce comme les créanciers à un accord d'ici dimanche. "C'est notre dernière chance", a-t-il affirmé devant le Parlement européen.
Mais Alexis Tsipras, issu de la gauche radicale et porté au pouvoir en janvier sur la promesse de ne pas imposer davantage d'austérité à la Grèce, a aussi défendu son "droit à choisir" la manière de redresser le pays de manière à ce qu'elle soit "socialement juste".
Après la rupture brutale de précédentes négociations fin juin - à l'annonce par Alexis Tsipras d'un référendum sur les propositions des créanciers, remporté par le non à plus de 60% - la zone euro va à présent étudier la nouvelle demande d'aide sur trois ans qu'elle a reçue d'Athènes.
Mais cette requête, alors que le pays, dont les caisses sont vides ou presque, a déjà bénéficié de deux plans d'aide pour un total de 240 milliards d'euros, devra être assortie d'un solide paquet de réformes, ont prévenu les Européens.
Pour l'heure, la Grèce s'est engagée à des réformes des impôts et des retraites "dès la semaine prochaine", a indiqué le nouveau ministre des Finances, Euclide Tsakalotos.
Des solutions urgentes et à court terme sont aussi nécessaires pour qu'Athènes puisse rembourser le 20 juillet la Banque centrale européenne, qui maintient en vie son économie par un goutte-à-goutte financier aux banques, toujours fermées.
Faute d'accord, la BCE pourrait lâcher les banques grecques, conduisant inévitablement à un effondrement du système bancaire et à une banqueroute du pays, le propulsant hors de l'euro.
Le ministère des Finances a indiqué mercredi que les banques grecques, fermées depuis le 28 juin, le resteraient jusqu'à lundi, le plafond de retraits aux distributeurs imposé pour éviter une crise de liquidités restant à 60 euros par jour.
Le conseil des gouverneurs de la BCE a décidé de maintenir inchangée l'aide d'urgence aux banques grecques (ELA), selon une source proche des discussions.
Mais une source bancaire européenne ne cachait pas que "l'exaspération et l'impatience montent (au sein de la BCE) face à l'attitude du gouvernement grec".
Le secrétaire américain au Trésor, Jacob Lew, a appelé Athènes à avancer dans les réformes, et les Européens a admettre - ce qu'ils refusent jusqu'à présent, Allemagne en tête - un allègement de l'énorme dette grecque, qui atteint 320 milliards d'euros, soit 180% du PIB du pays.