Rampe de lancement wallonne pour les start-up
Le fonds régional W.IN.G, doté de 50 millions d’euros sur 5 ans, va investir dans des "jeunes pousses" numériques.
- Publié le 24-02-2016 à 08h45
- Mis à jour le 01-03-2016 à 10h56
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Après les paroles, les actes ! "Digital Wallonia", du nom de la stratégie numérique initiée en 2015 par le ministre wallon de l’Economie et du Numérique, Jean-Claude Marcourt (PS), est en train de prendre forme. L’enjeu ? Faire émerger un écosystème numérique performant en Wallonie et reconnu sur le plan international. L’une des multiples promesses de ce plan avait été de créer un fonds d’investissement pour les start-up numériques, à savoir ces "jeunes pousses" qui entendent tirer profit des nouvelles technologies - Internet en tête - pour créer de l’activité économique innovante. Depuis mardi, ce fonds est une réalité. Le bébé s’appelle W.IN.G ("Wallonia Innovation and Growth"), pèse 50 millions d’euros ("plus si affinités…", a glissé M.Marcourt) et aura une durée de vie de 5 ans.
Ce fonds d’investissement public, qui sera géré par la Société régionale d’Investissement de Wallonie (SRIW), vient combler une carence importante. Dans le jargon, on parle de capital d’amorçage ("seed money"). On désigne, par ce terme, les capitaux nécessaires au démarrage d’une start-up. Il s’agit, le plus souvent, de quelques milliers d’euros. Trouver ces moyens constitue souvent un véritable défi pour les candidats entrepreneurs. Les banques, par exemple, rechignent souvent à prendre le risque. La mission de W.IN.G, a explicité le ministre Marcourt, sera précisément de détecter des projets de start-up numériques à haut potentiel au premier stade de leur développement et de décider, "dans un délai très court" (ce qui est déjà en soi une petite révolution en matière de gestion publique), de leur octroyer un coup de pouce financier.
De 50.000 à 250.000 euros
Le fonds W.IN.G pourra intervenir de deux façons, a détaillé Olivier Vanderijst, président du comité de direction de la SRIW. Première hypothèse : la start-up, au tout début de sa création (et, éventuellement, à la sortie d’un incubateur), pourra obtenir un financement de 50 000 euros, libérable par tranches, sous forme de prêt convertible. Ce financement - ne nécessitant aucune contrepartie privée - permettra à la "jeune pousse" de continuer à affiner son projet, tout en montant un premier tour de table en vue d’une augmentation de capital. Deuxième hypothèse : s’il est convaincu du potentiel de rentabilité de la start-up numérique, le fonds W.IN.G pourra prendre part à un premier tour de financement. Dans ce cas, l’intervention du fonds régional pourra grimper jusqu’à 250 000 euros (le cas échéant, conjointement avec un Invest wallon), "pour autant qu’il y ait une intervention privée égale au moins à la moitié de l’intervention publique".
Au-delà de l’octroi du "chèque", les initiateurs du fonds mettent en avant deux atouts. Le premier est la rapidité de la procédure. "Si tout se passe bien, la procédure peut être finalisée en quelques semaines", s’est réjoui Pierre Rion, président du comité d’investissement de W.IN.G (lire aussi ci-dessous). Il suffit, en fait, d’envoyer son projet de start-up numérique via le site (www.wing-digitalwallonia.be). Endéans les 30 jours, le porteur de projet est invité à "pitcher" devant le Comité d’investissement. Deux jours plus tard au maximum, il est informé si sa demande de financement est acceptée, avec les éventuelles conditions de financement. L’aventure peut alors commencer.
L’apport de "pros"
L’autre atout du dispositif sera de faire bénéficier les "jeunes pousses" sélectionnées des compétences des membres du Comité d’investissement (outre MM.Rion et Vanderijst, on y retrouve Marc Melviez, Denis Steisel, Jean-Pol Boone, Alain Marsily et Christophe Demain) et de l’apport des partenaires du fonds W.IN.G (dont Belfius, qui agira en tant que "partner in equity", mais aussi Deloitte, Universem, Microsoft ou encore l’accélérateur liégeois Leansquare).
W.IN.G est d’ores et déjà passé à l’action en intervenant dans ses deux premières start-up numériques : ListMinut et Neveo (voir ci-contre). D’autres dossiers sont sur la table. La première réunion officielle du Comité d’investissement est prévue dès le 1er mars, à Waterloo. Un minimum de huit réunions "itinérantes" par an sont prévues.
ListMinut

Cette start-up wallonne, créée voici trois ans, est une plateforme Internet permettant de trouver des personnes pour la réalisation de petits services (garder un enfant, tondre la pelouse, etc.). Après avoir déjà levé 200 000 euros en juillet 2014, ListMinut vient de boucler une deuxième levée de 300 000 euros, dont un tiers auprès du fonds W.IN.G.
Neveo

Cette start-up a décidé de lutter contre le sentiment de solitude des personnes âgées en les reconnectant à leur famille. Elle le fait par l’intermédiaire d’une chaîne de télévision personnalisée. Neveo a levé 400 000 euros, dont un prêt convertible de 250 000 euros auprès de W.IN.G.
Trois questions à Pierre Rion, président du comité d'investissement du fond W.I.N.G.

Ce fonds public d’amorçage pour les start-up manquait à la Wallonie ?
Oui. Mais ce qui nous manquait surtout, c’est un outil d’investissement très flexible doté d’une capacité de décision très rapide. Avec W.IN.G, les porteurs de projets viendront "pitcher" et, dès le lendemain, ils sauront s’ils peuvent compter sur le soutien financier du fonds. Cette rapidité est cruciale car une start-up numérique, c’est un satellite qu’il faut mettre sur orbite le plus vite possible. Avec ce fonds, on crée une belle rampe de lancement.
C’est le rôle des pouvoirs publics d’apporter ce financement de départ ?
Oui, le pouvoir public doit jouer ce rôle de catalyseur. C’est le "zip" dans le barbecue ! Mais l’objectif est que des investisseurs privés viennent se joindre au barbecue.
Quels sont les objectifs de W.IN.G pour 2016 ?
Le fonds est doté de 50 millions sur 5 ans. Si on divise 10 millions par 50 000 euros, ça fait 200 "petites" interventions; si on divise la même somme par 250 000, c’est-à-dire le montant maximum de notre soutien, on est à 40 interventions. Il y a donc de la marge, d’autant plus que le ministre Marcourt s’est dit prêt à augmenter l’enveloppe si on devait faire face à un afflux de projets. D’ailleurs, avant même de lancer le fonds ce mardi, on avait déjà reçu une petite dizaine de demandes. On en a précipité quatre à l’instruction, avec deux interventions à la clé (ListMinut et Neveo, NdlR). Dans nos prévisions 2016, on avait tablé prudemment sur une quinzaine de dossiers. Mais, à mon avis, on devrait être entre 30 et 50 dossiers.