Agriculture: réguler, réformer pour une sortie de crise
Les ministres européens de l’Agriculture se réunissent aujourd’hui. Ils évoquent la situation des marchés et les mesures de soutien au secteur. L’eurodéputé Marc Tarabella annonce qu’un rapport sur l’hypervolatilité des prix est en cours de rédaction.
Publié le 17-05-2016 à 09h17 - Mis à jour le 17-05-2016 à 09h20
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Les ministres européens de l’Agriculture se réunissent aujourd’hui. Ils évoquent la situation des marchés et les mesures de soutien au secteur. L’eurodéputé Marc Tarabella annonce qu’un rapport sur l’hypervolatilité des prix est en cours de rédaction.
"Une régulation volontaire, ce n’est pas suffisant"
Le Conseil agricole européen se réunit aujourd’hui à Bruxelles. A l’ordre du jour de cette réunion entre ministres de l’Agriculture, on trouve deux points de la plus haute importance, au vu de la crise que connaît le secteur : la situation des marchés ainsi que la mise en œuvre des mesures de soutien aux agriculteurs, voulues par le Conseil et avalisées par la Commission européenne il y a quelques semaines.
On y trouve la régulation de la production laitière, sur base volontaire et en contrepartie de subsides financés par les Etats membres. L’idée, c’est de faire remonter les prix du lait qui ont dramatiquement chuté à cause, principalement, de la surproduction constatée en Europe.
Cette position, défendue par la Belgique, ne fait pas l’unanimité au sein des 28. Plusieurs pays ne veulent pas en entendre parler. D’autres rejettent le caractère volontaire de la régulation, estimant que cela ne résoudra pas le problème. C’est le cas de l’eurodéputé belge Marc Tarabella (PS). "C’est déjà bien que Borsus et Le Foll (ministres belge et français de l’Agriculture, NdlR) aient cette position mais ce n’est pas suffisant. Il faut une régulation obligatoire avec des sanctions en cas de non-respect car, dans le cadre d’une base volontaire, certains ne joueront pas le jeu. Ils continueront à gruger les autres et à en faire les dindons de la farce", lance-t-il.
Une crise plus grave que celle de 2009
Sur la situation des marchés, Marc Tarabella souligne que "la Commission européenne se rend compte qu’il y a un problème; ce qu’elle niait encore il y a quelques mois". Mais il n’est pas tendre envers la politique menée par les instances européennes. "L’abandon, il y a un an, des mécanismes régulatoires pour le lait n’est remplacé par rien d’efficace. La surproduction laitière actuelle est plus grave que celle de 2009. Le prix du lait est anormalement bas depuis un an et ne se rétablit pas. La même chose se passe avec le porc. L’aide de 500 millions d’euros proposée par l’Europe au secteur équivaut à 0,3 centimes au litre de lait. C’est une mesurette. Donner un chèque à un agriculteur en période de crise, ce n’est plus tenable."
L’eurodéputé annonce qu’un rapport sur l’hypervolatilité des prix des produits agricoles est en cours de rédaction. "Il devrait être achevé pour la fin du mois. Ensuite, il fera l’objet de discussions et d’un vote en commission à la rentrée. Les parlementaires pourraient se prononcer sur le rapport à la fin de l’année."
"Secouer le cocotier"
Avec quatre autres eurodéputés socialistes, Marc Tarabella a signé une carte blanche, publiée vendredi dans "La Libre". Les eurodéputés voulaient "secouer le cocotier" à l’approche du Conseil de ce 17 mai. Ils en appellent à une réforme de la politique agricole commune (PAC). "Il faut une nouvelle PAC efficace qui maintiendrait son objectif initial (qu’elle ne remplit plus), c’est-à-dire offrir un revenu rémunérateur aux agriculteurs. Il faut une vision stratégique à 30 ans et un financement qui ne coûte pas plus cher à l’Union européenne. La PAC, c’est 100 euros par an et par habitant. Ce n’est pas trop. Les USA financent plus leurs agriculteurs", indique Marc Tarabella.
Pourquoi cette carte blanche n’est-elle signée que par des socialistes ? "Je le déplore. Je voulais des gens de droite et j’ai donc approché des parlementaires du PPE mais ils ont tous refusé ou renoncé", explique-t-il.
Signalons encore que René Collin, le ministre wallon de l’Agriculture, a lancé jeudi un appel à l’Allemagne (poids lourd européen de l’agriculture) à "se joindre aux pays qui exigent des modalités concrètes et obligatoires de régulation des marchés".
Un aperçu des négociations sur le TTIP
Lors du Conseil Agriculture, les ministres européens seront informés du 13e (et dernier à ce jour) cycle des négociations en cours sur le TTIP, le traité de libre-échange transatlantique entre l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis.
C’est que de nombreuses interrogations restent en suspens et principalement concernant la position américaine. Les Etats-Unis veulent en effet la plus grande discrétion autour des négociations. L’UE, elle, fait preuve de plus de transparence, en publiant régulièrement des documents faisant état du contenu des discussions et de sa position. On peut y lire que, dans le volet "agriculture", les négociations portent, entre autres, sur les vins et les spiritueux. L’Europe cherche à protéger les dénominations de 17 d’entre eux, que les Américains considèrent comme semi-génériques.
Les sujets sensibles ne sont pas abordés
Les instances européennes font aussi savoir qu’en ce qui concerne les droits de douane, "il a été discuté d’intérêts spécifiques en matière d’exportation. Les produits considérés comme les plus sensibles n’ont pas été examinés".
Pour l’eurodéputé Marc Tarabella, qui suit le dossier du TTIP de très près, il semble que l’agriculture ne soit pas une des priorités des négociateurs. "L’Europe brade l’agriculture dans les négociations sur le TTIP. Elle la considère comme la variable d’ajustement et pas comme un secteur stratégique, alors que l’agriculture, avec tous les métiers connexes, représente tout de même 15 % du PIB de l’Union européenne", dit-il.