L'immense potentiel de la réalité virtuelle
Du 23 au 26 juin s’est tenu à Bruxelles le premier festival Experience. Le public a pu y découvrir une trentaine d’œuvres - courts métrages de fiction, d’animation ou documentaires - réalisés en réalité virtuelle (VR).
- Publié le 27-06-2016 à 07h36
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Du 23 au 26 juin s’est tenu à Bruxelles le premier festival Experience. Le public a pu y découvrir une trentaine d’œuvres - courts métrages de fiction, d’animation ou documentaires - réalisés en réalité virtuelle (VR).
Ce nouveau mode d’expression permet de voir les films à 360°. Le spectateur est équipé d’un casque de vision, type Oculus Rift. Cette technologie, comme l’invention du cinéma il y a un siècle, est en passe de donner naissance à de nouvelles formes de langage visuel. Mais elle augure aussi de développement économique. L’événement était d’ailleurs soutenu et en partie initié par Screen Brussels, le fonds audiovisuel de la Région bruxelloise.
Pour Juan Bossicard, manager de screen.brussels et software.brussels (cluster et incubateur des entreprises technologiques bruxelloises), la VR n’est pas un simple phénomène de mode. C’est un marché porteur d’avenir, dont l’impact pourrait dépasser le seul secteur culturel. Selon Trendforce, le marché mondial de la réalité virtuelle devrait passer de quelque 6,7 milliards de dollars en 2016 à plus de 70 milliards en 2020. "On se trouve à l’intersection de plusieurs disciplines : arts graphiques, technologies numériques, audiovisuel…", note M. Bossicard.
L’écosystème est à inventer
Avec des structures comme software.brussels, elle-même liée à impulse.brussels, Juan Bossicard remplit un rôle d’intermédiaire depuis plusieurs années. Fort de neuf années passées chez Microsoft, il porte le partenariat privé-public entre le géant informatique avec la Région bruxelloise au sein du Microsoft Innovation Center. Il est à l’initiative des "meet up", des rencontres entre les professionnels du secteur. "Les montants à investir pour le développement de ces technologies et de nouveaux contenus sont considérables. On n’a pas les moyens de créer des studios ou des entreprises géantes comme aux Etats-Unis ou en Asie. Par contre, on peut fédérer les compétences et les talents, faire se rencontrer les entrepreneurs et les amener à collaborer ensemble."
De cent cinquante lors des premières "meet up", les réunions concernent aujourd’hui un millier d’acteurs belges du secteur, qui se rencontrent tous les deux mois. Transposés à l’échelle européenne sous l’acronyme EUVR, les meet up concernent quelque 18 000 professionnels, ce qui donne aussi une idée du marché. Le festival Experience a permis de prendre conscience de l’immense potentiel de la réalité virtuelle. Il y a bien sûr des productions qui évoquent les jeux vidéo. D’autres qui restent proches de la narration cinématographique. "Mais la réalité virtuelle intéresse énormément le monde de l’entreprise", précise notre interlocuteur.
Profilage d’utilisateur
Il cite l’exemple de Facebook qui a racheté le casque Oculus Rift pour 2,4 milliards de dollars. "Pourquoi ? Parce qu’avec la réalité virtuelle, Facebook pourra faire du profilage d’utilisateur." Les algorithmes du géant social analyseront le comportement du spectateur-acteur : que regarde-t-il ? comment se comporte-t-il ? quels sont ses goûts ? La finalité est évidemment commerciale et publicitaire. "C’est encore un marché de niche, qui porte essentiellement sur les jeux vidéo pour l’instant et un peu sur la publicité. Mais il peut évoluer vers les serious games et les contenus corporate", souligne Juan Bossicard.
"Des entreprises réfléchissent très sérieusement à l’utilisation de la réalité virtuelle pour les examens de recrutement. On peut évaluer via des films interactifs, comme dans les jeux, les réflexes du candidat : est-il plutôt solitaire ? joue-t-il collectif ? comment réagit-il dans un environnement inconnu ? quels sont ses réflexes d’interaction avec autrui ? son sens de l’initiative ?" Aux Etats-Unis, ce marché est déjà en phase de développement. "En Belgique, certains commencent à en prendre conscience."
L’avenir : le monde de l’entreprise
Et les acteurs historiques de l’audiovisuel et des industries techniques du secteur prennent conscience du virage : Barco, EVS, leaders européens dans leur domaine, réfléchissent à des développements dans le domaine. Les secteurs de la santé et de l’éducation perçoivent également des utilisations possibles. Pour Juan Bossicard, il ne fait aucun doute que l’avenir de la VR passera par le monde de l’entreprise autant, sinon plus, que par les industries du divertissement. "Le terrain est en friche, souligne-t-il, mais il y a une place à prendre."