"Ne plus prendre l’avion rend heureux"
Ancien rapporteur spécial pour les Nations unies, Olivier De Schutter ne prend plus l’avion. Le déclic est venu il y a près d’un an. "Je devais me rendre à New York afin de recevoir l’Oscar de l’alimentation, explique le professeur de relations internationales à l’UCL. Ce qui paraissait autrefois normal m’a paru soudain absurde et même immoral. Comment défendre l’alimentation durable et faire en même temps un voyage transatlantique pour recevoir une statuette et donner un discours ? Depuis, en toute modestie, j’essaie de privilégier la cohérence : je ne voyage plus en avion et croyez-moi, cela rend heureux."
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- Publié le 12-10-2019 à 10h41
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Ancien rapporteur spécial pour les Nations unies, Olivier De Schutter ne prend plus l’avion. Le déclic est venu il y a près d’un an. "Je devais me rendre à New York afin de recevoir l’Oscar de l’alimentation, explique le professeur de relations internationales à l’UCL. Ce qui paraissait autrefois normal m’a paru soudain absurde et même immoral. Comment défendre l’alimentation durable et faire en même temps un voyage transatlantique pour recevoir une statuette et donner un discours ? Depuis, en toute modestie, j’essaie de privilégier la cohérence : je ne voyage plus en avion et croyez-moi, cela rend heureux."
Via sa profession, M. De Schutter explique avoir "beaucoup pris l’avion" avant de réaliser "combien, dans la très grande majorité des cas, l’on peut agir presque aussi efficacement à distance, par visioconférence ou autrement, avec un impact beaucoup moindre sur l’environnement". Toujours actif au sein de l’Onu, le juriste a changé sa manière de voyager, de s’organiser, de travailler,… "Je prends beaucoup le train. J’ai la chance de vivre à Bruxelles, qui est très bien reliée à Paris, Londres, Rome, Genève, Amsterdam ou Strasbourg. Que demander de plus ? Parfois les voyages sont plus longs mais le train me permet de travailler. Je suis plus sélectif dans mes déplacements, et je recours à des messages vidéo pour des interventions publiques."
Mais ce choix, radical, n’est pas donné à tout le monde. "Je comprends ceux qui me disent qu’il est difficile de renoncer à l’avion. Nous vivons dans une société de consommation, dans une société aussi où la mise en spectacle de soi est permanente et la concurrence généralisée. Il est difficile, dans ce contexte, de résister aux différentes pressions à bouger sans cesse. Or, cessons de nous mentir : la transition écologique ne se fera pas sans qu’on interroge nos modes de vie. Nous sommes en train de transformer notre planète en étuve : si nous ne changeons pas de cap, nous allons vers des turbulences majeures, auxquelles nous n’aurons pas le temps de nous adapter."
Une démarche réservée aux plus riches ?
Mais cette démarche n’est-elle pas réservée aux plus riches ? Pour une même distance, le train est souvent beaucoup plus cher que l’avion en Europe. "Le rôle des politiques doit être de faire en sorte que les choix soutenables soient aussi commodes et abordables pour chacun. Il est scandaleux que les comportements les plus écologiquement soutenables soient parfois les plus difficiles à poser : c’est un signe de l’immaturité de nos sociétés."
Pour le professeur de l’UCL, ce choix de ne plus prendre l’avion est "un petit geste, qui n’a aucun impact tant qu’il demeure individuel". "Depuis que je ne prends plus l’avion, beaucoup autour de moi ont suivi cette résolution ou s’intéressent aux alternatives. Je n’ai voulu convertir personne, mais je me réjouis que cela incite chacun à réfléchir. Il faut, je crois, politiser les écogestes. Il faut que celles et ceux, de plus en plus nombreux, qui cherchent à aller vers des modes de vie plus sobres, se vivent comme partie d’un collectif qui veut changer les choses, sans devoir attendre des entreprises ou des politiques qu’ils donnent le top départ. Le changement, c’est nous."