Pourquoi la gastronomie belge ne progresse plus au guide Michelin
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Publié le 19-11-2019 à 08h01 - Mis à jour le 14-02-2020 à 17h52
Cela fait plusieurs années que l’on constate comme un tassement de la scène culinaire en Belgique.
La fermeture, coup sur coup en 2016 et 2017, des deux trois-étoiles brugeois De Karmeliet et Hertog Jan n’était sans doute pas un hasard. Dans les deux cas, il s’agissait en effet pour les chefs de changer d’orientation en tournant le dos à la haute gastronomie, trop exigeante en termes de temps, de personnel et de moyens. D’autant que, même à ce niveau de reconnaissance, il n’est pas simple de remplir un restaurant.
On se souvient ainsi que le Hertog Jan avait tenté ainsi l’aventure Groupon, en proposant un menu à 99 €… Cela n’aura pas suffi. Gert De Mangeleer et son associé Joachim Boudens ont donc fermé leur restaurant gastronomique pour miser sur un bistrot, en ouvrant le L.E.S.S. à Bruges, dont le jeune chef Ruige Vermeire vient d’ailleurs de décrocher une étoile ce lundi. Même chose pour Geert Van Hecke, qui tournait la page du Karmeliet pour ouvrir la brasserie Zet’Joe, aussitôt étoilée par le Michelin.
Si cela bouge encore un peu en Flandre du côté de la jeune génération, inspirée notamment par la vague nordique en provenance du Noma de René Redzepi, il ne se passe quasiment plus rien côté francophone. Hormis le tout récent Hors-Champs de Stefan Jacobs près de Gembloux, on n’a pas assisté à des ouvertures réellement ambitieuses en Wallonie en 2019. Sinon la reprise du Gastronome à Paliseul, récompensé au Michelin 2020.
C’est tout aussi frappant dans la capitale. Si les petites chaînes se multiplient (bars à ramens, comptoirs à burgers…), on n’a pas vraiment vu émerger de nouvelles tables gastronomiques. Et là encore, l’un des rares à s’être lancé, Kevin Lejeune à La canne en ville , a été salué par le guide rouge.
Coup dur pour Serge Litvine à Bruxelles
S’il est fortement décrié dans le milieu, il faut reconnaître à Serge Litvine d’avoir au contraire eu une vraie ambition gastronomique pour Bruxelles. Alors qu’il a jusqu’ici toujours été en odeur de sainteté au Michelin, il doit cette fois essuyer un vrai coup dur, avec la rétrogradation à une étoile de sa Villa in the Sky, dont on annonce le chef Alexandre Dionisio en partance. Tandis que deux de ses autres restaurants (qui gardent leurs étoiles dans cette édition 2020) fusionneront prochainement, le Sea Grill d’Yves Mattagne devant en effet prochainement s’installer avec toute son équipe à La Villa Lorraine à Uccle. Litvine conserve par ailleurs ses macarons au Da Mimmo et à La Villa Emily (même si, là encore, le chef Mathieu Jacri serait sur le départ…).
Ce désamour pour la haute gastronomie s’explique par plusieurs facteurs. La crise est évidemment passée par là, réduisant le nombre de clients capables de s’offrir une belle table. Mais ce n’est pas la seule raison. Chez les jeunes adultes, l’idée d’aller s’attabler durant trois ou quatre heures dans un restaurant ne fait plus vraiment rêver. L’heure est plutôt aux petites adresses sympas, où l’on va entre copains grignoter un bout en buvant un bon verre de vin nature.
En témoigne l’immense succès international de toutes ces adresses misant sur les petites assiettes à partager plutôt que sur les menus à rallonge. Cette année, le Michelin a d’ailleurs accordé un Bib gourmand à nombre d’entre elles, comme La Charcuterie à Saint-Gilles ou Vino Vino et Pépite à Namur. Et c’est aussi le concept de l’Upper Room du très chic The Jane, restaurant doublement étoilé de Nick Bril à Anvers…