"Runway" et objectifs
Quand on est dans le milieu des start-up tech, on finit par adopter un jargon souvent truffé d’anglicismes, où l’on se comprend "entre nous" mais qui peut sembler obscur vu de l’extérieur.
Publié le 08-02-2020 à 06h00 - Mis à jour le 29-02-2020 à 06h00
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Quand on est dans le milieu des start-up tech, on finit par adopter un jargon souvent truffé d’anglicismes, où l’on se comprend "entre nous" mais qui peut sembler obscur vu de l’extérieur.
– Chronique signée Roald Sieberath, Multi-entrepreneur, coach de start-up et venture partner pour LeanSquare, directeur de AI Black Belt, professeur invité à l’UCL et à l’UNamur.
Une des obsessions fréquentes de l’entrepreneur, c’est de "lever". Cela sous-entend des capitaux, bien entendu. L’appréciation des paramètres de cette levée de fonds varie grandement entre entrepreneurs, investisseurs. Ainsi, la durée du processus : l’entrepreneur (débutant) souhaiterait que ça puisse se faire en quelques semaines ; celui qui connaît la musique sait que ça va prendre six voire neuf mois.
Ensuite, les attentes quant à la valorisation : c’est-à-dire la valeur implicite donnée à l’entreprise qui va dicter quel pourcentage on en lâche, en échange de quelle participation financière. Il y a là au départ quelque chose d’un peu magique : un mois après avoir été créée avec 20 000 euros, une sprl peut valoir un demi-million, simplement parce qu’un code et qu’un plan particulièrement habile y ont contribué. Mais pour l’entrepreneur, cette "valo" n’est jamais assez haute : il rêve de lever des montants plus importants, en lâchant encore le moins d’actions possible. L’investisseur aura a priori la tendance inverse, et ceci mène à négociation.
Au milieu de cela, je voudrais m’arrêter sur deux éléments importants dans la discussion d’une levée de fonds. Le premier est ce que l’on appelle (dans ce jargon) le runway , c’est-à-dire la longueur de la piste de décollage… Ce runway se mesure en mois : avec le montant que l’on lève, et étant donné le burn rate actuel (le taux de dépenses mensuel), combien de temps peut-on tenir avant d’atteindre un objectif donné ? C’est par exemple typiquement 12 ou 18 mois nécessaires à la mise au point d’un nouveau produit. Les revenus sont souvent faibles et sont pratiquement négligés ; les dépenses, par contre, peuvent être établies avec une certaine précision, en fonction d’un plan.
Le second élément clé, c’est l’objectif que l’on compte avoir atteint au bout de ce runway : généralement exprimé avec un minimum de traction client avec ce nouveau produit. On démontre ainsi, même si les revenus sont encore faibles, qu’au moins le marché a adopté ce produit, que l’on a atteint une forme de product-market-fit, et que l’on peut travailler à une phase de croissance.
Tant le runway que les objectifs doivent être fixés avec grand soin. Au bout des 12 ou 18 mois, il s’agit d’avoir atteint l’essentiel de l’objectif si l’on veut que l’investisseur garde confiance, et finance un nouveau tour destiné à la croissance.