Quel(s) modèle(s) pour l’agence média du futur ?
La publicité est en mutation. Les agences doivent faire face à de nouveaux défis. Entretien.
Publié le 20-06-2020 à 06h00 - Mis à jour le 20-06-2020 à 16h16
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La publicité est en mutation. Les agences doivent faire face à de nouveaux défis. Entretien.
Comme la plupart des secteurs, la publicité est en mutation : les règles du jeu changent, les attentes des annonceurs évoluent à l’aune de celles des consommateurs et les agences doivent s’adapter pour survivre. Parlant plus précisément des agences médias, on évoque les défis liés à l’automatisation, l’internalisation, la difficulté de recruter de nouveaux profils, la concurrence des consultants et des tech, et aussi un business model qui reste très largement basé sur des volumes d’achat média.
Autant de sujets que nous avons abordés, au cours d’un webinar organisé en collaboration avec Media Marketing, avec Thierry Brynaert, CEO de Wavemaker, élue Agence média de l’année aux AMMA, ainsi que les président et vice-président de l’UMA, François Chaudoir et Sylvie Irzi, par ailleurs respectivement CEO de Space et et future ex-CEO d'IPG Mediabrands (au moment de boucler ces lignes, cette dernière a en effet annoncé son départ prochain du groupe). L’UMA (United Media Agencies) étant l’association des 15 agences par qui transitent environ 80 % du média acheté en Belgique. En 2019, ses membres qui employaient alors 865 collaborateurs, ont réalisé un chiffre de 1,149 milliard d’euros (+1 %) ; 25 % de leur billing est issu du digital.
On parle de plus en plus de "consult agencies" pour évoquer l’agence média du futur. Cette appellation conviendrait mieux à la transformation de votre business ?
Sylvie Irzi. Il faut se rendre compte du chemin parcouru par les agences médias. Je crois qu’il existe aujourd’hui peu de sociétés comme les nôtres qui soient autant capables d’embrasser l’ensemble des changements liés à la transformation digitale.
François Chaudoir. J’ai le sentiment que notre métier a toujours été en mutation. Nous sommes passés de l’époque où l’on faisait de l’achat, du planning et de la stratégie à celle du conseil business, de la technologie, de l’intégration. Cette faculté d’évoluer est dans notre ADN. Notre métier est sur l’accompagnement, ce n’est pas nouveau. Les compétences que nous avons acquises ont changé. Les jeunes spécialisés dans la tech ont pris une place énorme dans nos structures.
Thierry Brynaert. Je voudrais revenir sur le business model rémunéré sur le volume des achats. Je pense que cela reste une volonté de bon nombre d’annonceurs de nous enfermer dans ce modèle. Sachant que la majorité des agences est plutôt favorable à celui appliqué par la consultance sur base d’heures prestées. Il fut une époque où une agence percevait peut-être une rémunération de 10 % pour un plan média à un million ; aujourd’hui, on peut s’estimer heureux si on atteint 3 %. Tenant compte du digital, nous passons plus d’heures qu’auparavant sur un travail moins bien rémunéré. Indépendamment, il faut en effet tenir compte de l’évolution des profils. Pour développer nos nouveaux services dans la tech, nous devons nous entourer de détenteurs de PHD plutôt que des gradués en marketing ou des masters en communication. Pour rester de bons partenaires pour nos clients, les servir avec les métiers de demain, leur apporter de la valeur, il est indispensable d’attirer de tels profils et pour ce faire, nous devons être aussi compétitifs sur leur rémunération. Continuer à payer avec du pourcentage sur du volume n’est pas viable.
Vous embrassez toute une série de spécialisations, mais on a aussi l’impression que les annonceurs ne parviennent pas encore à percevoir cette transformation.
Thierry Brynaert. À la base, nous sommes des stratèges qui ont pour but de construire les meilleures actions de communication et assurer la meilleure amplification des différents canaux. Développer de nouveaux services nous permet de nous positionner comme des consultants sur des secteurs qui sont peut-être moins matures pour le commun des mortels, mais pertinents pour les stratégies marketing de nos clients. Il est clair que ces services doivent être rémunérés différemment : de la consultance sur du "voice marketing" ne peut être payé par un pourcentage sur le volume.
Sylvie Irzi. Les annonceurs prennent conscience que ce savoir-faire est additionnel à une base nécessaire de compétences dans le marketing. Les agences de consultance sont capables de faire en partie les métiers du marcom et du média, mais elles ont été beaucoup moins que nous les mains dans les consoles, les applications, les technologies.
François Chaudoir. Depuis cinq ou six ans, nous sommes beaucoup plus proches du business de nos partenaires. Nous avons de plus en plus de clients qui nous jugent sur notre contribution à leur P&L (NdlR : profit&loss, évaluation des bénéfices/coûts d’une action). Cela passe par de la business intelligence, par des modèles d’attribution, par tout ce qui touche à la personnalisation à grande échelle, etc. C’est là que notre métier reste formidable : nous sommes de plus en plus proches des pôles de décision du business des clients.
Le lien vers le webinar : https://www.mm.be/news-fr-46662-webinar-quels-modeles-pour-l-agence-media-du-futur