La gestion des "communs"
CO-ENTREPRENEUR CAFE #27 | Avec la campagne de mobilisation de NewB, on a entendu beaucoup de soutiens autour de l’idée "il faut monter qu’une alternative est possible". Les critiques (cyniques ?) pointaient de façon plus rationnelle les faiblesses assez réelles de la (peut-être future) banque.
- Publié le 30-01-2021 à 08h00
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CO-ENTREPRENEUR CAFE #27 | Avec la campagne de mobilisation de NewB, on a entendu beaucoup de soutiens autour de l’idée "il faut monter qu’une alternative est possibl e". Les critiques (cyniques ?) pointaient de façon plus rationnelle les faiblesses assez réelles de la (peut-être future) banque.
– Chronique signée Roald Sieberath, Multi-entrepreneur, coach de start-up et venture partner pour LeanSquare, directeur de AI Black Belt, professeur invité à l’UCL et à l’UNamur
La semaine écoulée a été marquée par le "rush" de l’appel à coopérateurs de la (peut-être future) banque NewB . Grande agitation sur les réseaux sociaux, suspense (à une semaine de la deadline, on était à moins d’un tiers de la somme levée), effet boule de neige, et finalement objectif atteint (et prolongations).
On a entendu beaucoup de soutiens, pas toujours rationnels, des variations autour de l’idée "il faut monter qu’une alternative est possibl e". Les critiques (cyniques ?) pointaient de façon plus rationnelle les faiblesses assez réelles de NewB : peu de choses prouvées ces dernières années, manque d’expérience, avenir incertain, équilibres entres coopérateurs en parts A/B/C, etc.
Derrière ces questionnements légitimes, je vois le grand doute que l’on a souvent envers les choses gérées en commun. Par contraste, il existe pas mal de success stories commerciales en "solo", où un fondateur emblématique avait gardé un contrôle très serré sur son entreprise, ce qui lui avait permis ou facilité le succès (de Microsoft à Facebook, en passant par Odoo ou Pairi Daiza, plus près de nous). À l’inverse, les choses gérées collectivement ont quelque peu la réputation d’avoir une gestion assez lâche et imprécise.
On retrouve là l’esprit de la tragedy of the commons , un article de 1968 de Garrett Hardin dans Science . La thèse est simple : imaginons des fermiers qui se partagent une pâture en commun ( commons en anglais). Chacun, poursuivant son intérêt personnel, va vouloir y faire paître un maximum de ses bêtes, pour bénéficier des avantages, en supportant le moins possible des coûts. Un comportement identique par la majorité des fermiers, et cela nous mène à une ressource qui se retrouve rapidement abusée et pillée.
Cette théorie a été largement répandue et a influencé nombre de politiques économiques en faveur de concentration de ressources entre peu de mains, qui au moins (supposait-on) en prenaient soin.
D’autres acteurs et penseurs se sont penchés sur la question (dont Elinor Ostrom ), pour arriver à des conclusions différentes, beaucoup plus nuancées : des groupes peuvent trouver des moyens de gérer au mieux leurs ressources communes, de façon plus compliquée sans doute, mais néanmoins adaptée. Une banque peut-elle être gérée pour intégrer au mieux les intérêts communs de 60 000 personnes ? Avec et au-delà de NewB, c’est d’un véritable entraînement de nos capacités d’organisation collective qu’il s’agit.
- Chronique extraite de la Libre Eco week-end du samedi 30 novembre 2019, dont le dossier de couverture est Les groupes pétroliers se transforment: greenwashing ou vraie révolution?