Remi de Montgolfier (Ericsson): "Il faut expliquer la 5G avec des faits et non des fake news"
Ericsson a été choisi par Telenet pour la modernisation de son réseau et le déploiement de ses antennes 5G.
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- Publié le 15-03-2021 à 09h35
- Mis à jour le 19-10-2021 à 11h00
Ericsson fait partie des partenaires choisis par Telenet pour le déploiement de son réseau 5G. Il modernisera le réseau ainsi que prendra en charge le déploiement des antennes. Nokia sera quant à lui en charge des coeurs de réseaux. Entretien avec Remi de Montgolfier, General Manager d'Ericsson Belux.
Le partenariat renforcé avec Telenet annoncé ce lundi, une bonne nouvelle pour Ericsson. Un commentaire ?
C'est une reconnaissance de notre leadership technologique. Ericsson a beaucoup investi en R&D (recherche et développement), environ 4 milliards par an, et embauché près de 5000 personnes dans ce domaine sur trois ans. C’est ce qui fait partie de la "refocus strategy", dont la fourniture de réseau et de mobile. On travaille avec Telenet depuis des années et ils ont pu constater notre expertise sur les opérations de réseau.
Vous avez 26 % des parts de marchés pour la 5G dans le monde, c’est bien ça ?
Quand on mesure par rapport au nombre de réseaux ouverts, actifs, ce qui mesure le mieux la maturité d'une technologie, c’est encore plus parlant. Il y a 131 réseaux commerciaux ouverts 5G dans le monde et Ericsson est fournisseur de 79. Donc plus d'un réseau sur deux. On est le seul présent sur tous les continents également. Donc on a de l'expérience pour tous les cas d'usages possibles. Et on a bien vu que pendant une période Covid, c'est très important d'avoir une bonne connectivité. C'est crucial pour une bonne activité économique. On voit aussi qu'en Asie du Sud-Est et au Japon, la 5G permet de soulager les réseaux qui saturent complètement. Ils ont un usage de la data bien plus développé qu'en Europe mais l'IBPT a récemment publié une étude d'ailleurs qui montre que le réseau 4G devrait être saturé d'ici 12 à 18 mois à Bruxelles par exemple. Ajouter la 5G, c'est donc comme ajouter trois voies au ring de Bruxelles. Ça va immédiatement fluidifier le trafic des volumes de données, qui continuent d'augmenter de plus de 70 % chaque année en Belgique. Qu'on le veuille ou non, il va falloir booster nos réseaux existants et faire baisser la facture énergétique des réseaux mobiles. La consommation énergétique aujourd'hui suit linéairement celle des données. La 5G permet de moderniser et d'être plus efficace, avec une consommation moindre. On parle souvent des craintes mais on oublie les aspects positifs.
Dans ce cas-là, on peut également parler de l'effet rebond de la consommation liée au déploiement de la 5G. Comme pour l'autoroute, si on rajoute des voies, le trafic induit et l'utilisation peuvent aussi exploser...
Effectivement, le volume de données va augmenter sur les réseaux mobiles. Après, il faut regarder plus largement. Certaines chaînes de production et autres activités seront plus efficaces. Et il faut aussi voir ce qu'attendent les citoyens. Ils y voient un intérêt.
Vous avez multiplié les partenariats en Europe ?
On est présent chez tous les grands opérateurs. Vodafone, Telefonica, Deutsche Telkom, Orange... La Belgique était un peu une anomalie où l'on n'avait pas encore de parts de marché sur l'axe radio (antennes, NdlR). Il était temps de corriger cette anomalie. Bruxelles est la capitale de l'Europe. Ericsson est un acteur européen. C'était important d’y être présent. D’ailleurs, l'Europe reste incontournable et cruciale pour Ericsson.
L'exclusion de Huawei, partiellement ou totalement, a tout de même aidé pour conquérir quelques parts de marché, non ? Même si Ericsson se montre prudent sur ce dossier...
De ce que j'ai constaté… je n'ai pas ressenti de relâchement de la férocité de la compétition. Le marché reste ultra-compétitif. La 5G, c'est la technologie de demain et implique des investissements énormes, et ce chez nous comme chez les concurrents.
Donc pas de mots sur Huawei...
Non. Comme le dit le CEO, on ne fait pas de politique, on est pour un marché ouvert.
Mais donc ce partenariat est une bonne nouvelle ?
La 5G est une boîte à outils et un driver fort de compétitivité pour les entreprises. Il faut mettre la technologie au service des entreprises et des citoyens et leur laisser choisir ce qu'ils en feront. Et, sans être politiquement correct, il faut qu'on arrête de prendre du retard par rapport à nos voisins. La France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas avancent sur la 5G. Il faut éviter que les entreprises proches des frontières ne se tournent vers l'étranger. Il faut que l'on rattrape le train de l'innovation, en Belgique.
Les enchères sont annoncées pour 2022... Ça avance lentement mais sûrement...
C'est mieux et tout ce qui peut accélérer est positif. Mais il n'y a pas que les enchères. Il faut harmoniser les règles, la législation sur les radiations par exemple. Aujourd’hui, on ne peut pas déployer à Bruxelles. Ou alors il faut ajouter une centaine de sites (pour réduire le niveau d’émission en augmentant le nombre d’antennes, NdlR), ce qui est une aberration écologique et provoquerait beaucoup de travaux supplémentaires. L'impact carbone de cette solution n'est pas positif. Ou alors on peut faire de la 5G mais bridée, ce qui ne sert strictement à rien. Il faudra prendre ce sujet à bras-le-corps, rassurer et expliquer, avec des faits et non des fake news. Grâce à cela, on arrivera à un compromis.
L'IoT (Internet des objets), c'est une opportunité de développement économique pour Ericsson ?
Oui, Ericsson est également fournisseur de services pour gérer la connectivité. La 5G va donc booster ce marché de l'Internet des objets, via une meilleure performance, ainsi que l’innovation. Ce réseau est prévu pour gérer des millions d'objets, ce qui engorgerait un réseau comme la 4G.