"C'est le chaos chez Brussels Airlines, les employés sont à bout physiquement et psychologiquement"
Le personnel de la compagnie belge est “à bout”, selon les syndicats.“Des vols sont annulés quotidiennement faute de personnel disponible”, expliquent-ils. Des actions pourraient avoir lieu. La direction reconnaît que la charge de travail est “élevée" à cause de la crise sanitaire.
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Publié le 02-08-2021 à 19h30 - Mis à jour le 03-08-2021 à 21h32
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Les passagers de Brussels Airlines ont reçu une lettre ce lundi avant d'embarquer dans leur avion depuis l'aéroport de Zaventem. La missive provenait du personnel de bord de la compagnie aérienne belge. Entre rotations de vols "insensées" et manque de temps de repos , hôtesses et stewards dénoncent des conditions de travail qui se seraient dégradées ces dernières semaines. "C'est le chaos, explique, sans détour, Luc Martin, délégué CNE (Centrale nationale des employés - CSC). Les employés sont à bout physiquement et psychologiquement. Des vols sont annulés quotidiennement, faute de personnel disponible".
“La direction nous a totalement abandonnés”
Rien ne va plus chez Brussels Airlines ? Sur les deux dernières semaines, la compagnie belge a recensé un record de 220 "rapports de fatigue" de son personnel. "La direction nous a totalement abandonnés, poursuit M. Martin. Des équipages se sont, par exemple, retrouvés sans réservation de chambres d'hôtels ou de transports lors d'escales. Quand vous arrivez à un endroit tard le soir et que vous devez repartir tôt le matin, ce sont toutes des démarches imprévues qui raccourcissent encore votre précieux temps de récupération. Le ras-le-bol est général, même au sein des équipes au sol". Pour le représentant syndical, la direction de Brussels Airlines semble davantage s'intéresser aux intérêts de la maison-mère, l'allemande Lufthansa, qu'à ses employés en Belgique. "On ne voit jamais nos patrons sur le terrain".
Le deal : sauvetage contre flexibilité du personnel
Autre grief des syndicats : la compagnie belge leur demanderait une flexibilité qui devient "intenable". "La pression est énorme. Des hôtesses et stewards en congé reçoivent des SMS du management leur demandant de venir travailler en urgence", s'insurge le délégué. Ce changement de cap de la direction viendrait d'un accord signé avec les syndicats l'été dernier. "Brussels Airlines a connu une restructuration très dure l'an dernier, rappelle Didier Lebbe, permanent à la CNE. Les conditions de travail ont été revues à la baisse en échange du sauvetage de la compagnie. En contrepartie, un organe interne de contrôle devait être mis en place mais un an plus tard, il n'en est rien. C'est la seule chose qui avait été demandée et promise au personnel et nous ne l'avons toujours pas".
Des vols qui changent constamment
De son côté, la direction affirme respecter l'accord conclu avec les syndicats mais reconnaît que la charge de travail est "actuellement élevée" pour le personnel. "L'été est notre période la plus dense, rappelle la porte-parole Wencke Lemmes. Même si la reprise des vols est là (Brussels Airlines n'opère encore qu'à 75-80 % de sa capacité habituelle, NdlR), nous sommes toujours en période de crise du Covid : avec les codes couleurs qui changent en permanence, nous devons être flexibles dans notre offre de vols pour être le plus proche possible de la demande. On doit très régulièrement adapter notre réseau."
Qui dit flexibilité des vols signifie donc aussi flexibilité du personnel. "On suit de très près la fatigue de nos équipes et on va proposer aux syndicats des solutions pour soulager notre personnel dès ce mardi", annonce-t-on du côté de la direction.
“4 à 6 fois plus de temps pour enregistrer un passager”
Selon la porte-parole, la crise sanitaire rend la situation encore plus complexe et augmente la charge de travail. "Avec les mesures sanitaires, il faut aussi quatre à six fois plus de temps pour enregistrer chaque passager. Dans les horaires de vol, on doit également tenir compte de la campagne de vaccination de nos équipages. Les membres du personnel qui se font vacciner ne peuvent voler le jour de leur injection ni les deux jours suivants."
“Que vaudra encore Brussels Airlines ?”
Un point de vue que ne partage pas vraiment Luc Martin. "La vaccination a bon dos. Il y a un vrai manque de personnel de manière structurelle et nous demandons des engagements supplémentaires".
Le délégué s'inquiète aussi de l'avenir de la compagnie belge, sauvée l'été dernier via un prêt de 290 millions d'euros de l'État belge. "J'ai connu la faillite de la Sabena en 2001 et j'ai l'impression de revivre la même situation, développe notre interlocuteur. On voit que de plus en plus de services de Brussels Airlines sont déplacés à l'étranger, comme si l'on voulait faire de la compagnie belge une coquille vide." Et M. Martin de rappeler l'une des clauses de l'accord de sauvetage. "Si Brussels Airlines n'arrive pas à rembourser l'État belge, ce dernier pourra entrer dans le capital de la compagnie, au détriment de la maison-mère Lufthansa. Mais que vaudra encore Brussels Airlines ? Les administrateurs belges feraient bien de s'inquiéter de la situation". La direction et les syndicats ont prévu de se rencontrer ce mardi. En cas de non-accord, des actions allant jusqu'à la grève pourraient avoir lieu.