Faute de moyens, Infrabel pourrait fermer des lignes de fret
Les économies opérées par l’opérateur du réseau ferroviaire visent désormais les dépenses opérationnelles.
Publié le 14-09-2021 à 21h07 - Mis à jour le 01-10-2021 à 09h59
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Le rail doit devenir la colonne vertébrale de la mobilité des personnes, mais aussi des marchandises dans les prochaines années. Selon les dernières projections du Bureau du Plan, le transport de marchandises devrait croître de près de 26 % d’ici 2040. Côté politique, l’ambition affichée est de doubler la part du train du transport de marchandises à l’horizon 2030. À l’heure actuelle, le fret ne représente que 10 % de l’ensemble du transport belge, contre 73 % pour les camions, et 17 % pour le transport fluvial.
Ce mardi, une vingtaine d'organisations, parmi lesquelles les ports d'Anvers, celui de Zeebruges et les différentes fédérations patronales du pays présentaient leur feuille de route pour parvenir à doubler le fret ferroviaire. Avec, d'emblée, un constat : "Il faudra faire beaucoup mieux que maintenant", lance l'administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique, Pieter Timmermans. Pour la FEB, le fret ferroviaire doit être plus facile à utiliser, plus rapide, et plus compétitif. "Le gouvernement a un rôle à jouer pour accompagner le secteur", soutient-il.
Le rail n’innove pas assez
En ligne de mire notamment, les investissements nécessaires pour l'entretien et la maintenance du réseau opéré par l'opérateur du réseau Infrabel. "Aujourd'hui, nous sommes bloqués dans certains projets industriels, admet Benoît Gilson, CEO de l'entreprise. Par tradition, le rail n'innove pas assez. Aujourd'hui, les conducteurs de trains doivent modifier l'aiguillage à la main. Or nous voulons qu'il soit possible d'effectuer ce changement avec une application. Idem pour le graissage des voies, qui se fait aujourd'hui à la main."
Mais cette innovation nécessite des moyens supplémentaires. "Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour", lance le CEO d'Infrabel à destination du monde politique. Une petite phrase qui vise ici les négociations en cours pour la confection des budgets fédéraux, chargée notamment de déterminer la manne allouée au secteur ferroviaire pour les prochaines années.
Une vision sur cinq ans, voire plus
Car la situation est critique pour le rail belge. M. Gilson en veut pour preuve des discussions parfois tendues avec Lineas (l'ancien SNCB Cargo, l'opérateur de fret privé en Belgique) concernant les aménagements sur le réseau et les difficultés de planifications. "Nous avons besoin de visions sur les investissements à moyens et longs termes", poursuit le CEO. Le dernier plan d'investissement ne s'étalait en effet que sur deux ans. À la place, le secteur demande une vision étalée sur cinq, voire dix ans, comme cela était le cas pour le premier plan pluriannuel conclu en 2002.
Depuis plusieurs années, les chemins de fer sont contraints à des économies, réparties sur les deux entreprises ferroviaires belges, selon une répartition inégale. Deux tiers de ces économies ont été effectuées par Infrabel, le reste par la SNCB. Jusqu'à présent, les efforts financiers avaient été menés sur les investissements de renouvellement d'infrastructures. Mais la réflexion est toujours en cours sur d'autres moyens d'économiser. Parmi les solutions à l'étude, la fermeture de plusieurs lignes. Cette solution permettrait en effet de réduire les dépenses d'exploitations, comme il est désormais demandé à l'entreprise en charge de l'infrastructure. D'après les informations que La Libre a pu récolter, ces économies porteraient sur 16 % de ce budget "Opex".
Négociations budgétaires en cours
"Nous sommes en discussion pour l'établissement du budget à venir. Nous voulons de la stabilité afin de pouvoir prévoir les chantiers à venir. Nous allons nous efforcer de mettre en œuvre les objectifs fixés par le gouvernement avec les moyens qui nous sont alloués", commente-t-on chez l'opérateur du réseau.
"Il n'y aura pas de fermeture de ligne sous cette législature, tout au contraire, nous continuerons à renforcer le réseau ! Il y aura des budgets d'investissements supplémentaires, affirme pour sa part le ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet (Écolo). Les taux d'intérêt actuels nous y incitent, et je rappelle qu'un euro investi dans le rail génère 3 euros de retours directs et indirects dans l'économie belge", selon une étude de Deloitte citée par M. Gilkinet.