Entrepreneurs en transition #4 : Le fondamental facteur humain
Pourtant indispensable, le facteur humain des entreprises n'est pas toujours considéré à sa juste valeur, et dans toute sa complexité. Une chronique de Roald Sieberath, multi-entrepreneur, coach de start-up et responsable de l’Accélérateur Transition pour LeanSquare, professeur invité à l’UCLouvain et à l’UNamur.
Publié le 25-09-2021 à 18h03
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On l'a vu dans des chroniques précédentes : l'entrepreneuriat amène à additionner des pommes et des poires, des dimensions de nature très différentes (le CO2 économisé et la qualité de travail, par exemple)… Un de ces éléments est particulièrement critique : le facteur humain.
Dans un monde affamé de sens à réinventer, certains acceptent de contribuer à des projets qui ont du sens pour eux de façon bénévole. Ils n’y obtiennent pas de salaire (ou si peu), mais par contre, y trouvent une abondance de sens, ou de lien social.
Un nouveau modèle de gouvernance
Cette caractéristique amène son lot de hauts et de bas, surtout lorsque ces bénévoles côtoient des responsables actifs (souvent salariés, eux).
D’un côté, ces volontaires apportent de bonnes volontés qui peuvent déplacer des montagnes, à coût négligeable ou nul, et d’un autre côté, des risques de malentendus ou de maladresses, parce que certains, après de longues heures et journées consacrées à œuvrer pour une bonne cause, se retrouvent… vides de moyens, et ayant un peu perdu le sens de leur engagement.
La solution à ce dilemme n’est pas de revenir à compenser tout le monde en espèces sonnantes et trébuchantes : on retomberait alors dans l’économie à l’ancienne, où tout est produit ou service, alors que l’on veut précisément y échapper.
Une piste de solution est sans doute d’avoir une gouvernance adaptée, où les règles d’engagements sont beaucoup plus claires, sur les attentes des uns et des autres.
Ceci vient défier la notion même de gouvernance. Alors qu’auparavant, celle-ci était dictée en grande partie par l’intérêt de l’actionnaire, la gouvernance nouvelle doit s’accommoder de paysages plus hétérogènes, où un collaborateur va être attentif à être doté de tel titre sur sa carte de visite (même sans salaire), alors qu’un autre acceptera d’œuvrer pro bono, pour autant qu’il ait l’opportunité d’exercer une influence sur le groupe.
Innover, au sens large du terme
Dans toute entreprise, le facteur humain est fondamental. Dans une entreprise en transition, il demande une attention redoublée.
J’assistais mercredi à l’assemblée générale de l’UWE à l’Aula Magna de Louvain-la-Neuve. Au fil des discours, des témoignages d’entrepreneurs, se dégagent des messages clés, qui indiquent que l’entreprise de demain sera bien différente de celle d’il y a 20 ans… et que la mutation est en cours.
L'impératif le plus central était "innovation". Auparavant, ça semblait cantonné à quelques grandes entreprises disposant de leurs labos de R&D. Désormais, il semble compris que toute entreprise est invitée à innover, même les plus petites (ça peut se faire par l'innovation de business model, un de mes dadas depuis 2010, et le sujet de mon cours à l'UNamur, dans les traces de Yves Pigneur et son Business Model Canvas ).
Des entreprises, comme Tilman, EyeD Pharma, Alpha Innovations, ont témoigné de leurs démarches d’innovation, souvent soutenues par des aides comme celles de la DGO6.
L'innovation technologique de rupture est exemplifiée par Benoît Deper, fondateur de AeroSpaceLab : son projet de lancer une constellation de nano-satellites, inspiré par son expérience américaine à la NASA en Silicon Valley, l'a propulsé en moins de deux ans (et avec 11 millions levés), comme LA société en Europe capable de jouer sur cet enjeu mondial, au carrefour de l'aérospatial, de la donnée, de l'intelligence artificielle.
La transition écologique, le troisième pilier
Juste derrière l'innovation arrive l'enjeu de la transition écologique et de l'économie circulaire. Trop longtemps, l'environnement était le grand absent de nos calculs économiques.
Plus présent que jamais, entre autres par la voix du président Jacques Crahay, il reçoit l'aval du ministre-président , et le soutien d'acteurs comme la coalition Kaya , et The Shift, et des actions comme le Green Deal .
Là aussi, il s’agit d’un mouvement qui peut toucher chaque entreprise, chaque entrepreneur. Salvatore Ianello, le CEO du chocolatier Galler, m’expliquait comment ils ont repensé fondamentalement ce métier "classique" pour l’orienter sur de telles valeurs fortes, et éminemment dans l’air du temps.
Au final, les conclusions de l’administrateur-délégué Olivier de Wasseige rassemblent et donnent la direction. L’UWE va continuer à équilibrer ces trois piliers : le souci écologique, la rentabilité économique, l’équilibre social.
Avec l'ambition de "donner un nouveau visage à la Wallonie", d'après les mots du ministre-président.