Cascador Health lève 3,4 millions d'euros : "Certaines pharma pourraient perdre des remboursements... mais elles auront aussi des bénéfices à tirer"
L’entreprise veut devenir la plateforme centrale des données médicales en Belgique, voire en Europe.
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Publié le 24-03-2022 à 15h00 - Mis à jour le 21-04-2022 à 16h42
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La startup belge Cascador Health a réussi à lever 3,4 millions d’euros pour développer son activité basée sur le traitement des données médicales. Son objectif ? Devenir la plateforme centrale de récolte et de traitement des données pour assurer le suivi des patients ainsi que de l’efficacité des traitements utilisés.
"Les prestataires et les instances de soins tels que les hôpitaux disposent d'énormes quantités de données, et notamment des informations précieuses provenant de dossiers patients ou de laboratoires hospitaliers, des données de pharmaciens ainsi que des données de facturation" susceptibles d'améliorer le suivi des patients, "en raison de divers obstacles pratiques, comme la conformité, leur potentiel n'est aujourd'hui que peu exploité", assure Cascador qui est basée à Temse, en Flandre orientale.
"Après un premier tour de table pour récolter des financements début 2021, les fondateurs s'associent désormais aux fonds belges Qbic, Volta Ventures et Theodorus ainsi qu'au groupe hospitalier suisse Hirslanden AG pour procéder à un nouvel investissement de 3,4 millions d'euros", précise Cascador.
Dangers ou bénéfices pour les firmes pharma ?
Cela permettrait aussi de vérifier l'efficacité de certains médicaments. "Si les entreprises pharmaceutiques ne prouvent pas que leurs médicaments fonctionnent bien, elles pourraient perdre les remboursements effectués par l'ONSS (Office national de la sécurité sociale, NdlR)"avance par exemple le CEO. Car de nombreux médicaments dits "innovants" bénéficient de ces remboursements afin de soutenir le développement de leurs produits, mais dont l'efficacité est parfois mise à mal.
Cascador pourrait donc subir des pressions de la part des firmes pharma, qui pourraient y perdre des plumes. Rappelons que le coût de ces produits innovants pour la sécurité sociale sont passés de 140 millions d'euros en 2007 à... 1 milliard d'euros en 2019, selon le centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE).
Mais pour Philip Taillieu, le CEO, la contrepartie pourrait les intéresser et contrebalancer ce risque : les firmes pharma pourraient bénéficier des données d'un nombre de patients relativement conséquents et donc faciliter le développement des médicaments. "Cela permettrait justement de prouver l'efficacité de certains traitements. Elles auront des bénéfices à en tirer". Habile.
"Les données accessibles réinstalleront la confiance entre entreprises pharmaceutiques et hôpitaux, car il y a un manque de confiance entre ces deux secteurs en ce moment", glisse-t-il. "C'est pour cela que les données resteront en possession des hôpitaux, mais elles seront accessibles pour des tiers, avec validation préalable pour les consulter".
"Aux Etats-Unis, des solutions de consultation de données existent depuis pas mal de temps déjà. Mais en Europe, la difficulté réside dans le fait que chaque pays suit des dynamiques techniques, juridiques et économiques différentes que nous devons pouvoir intégrer à chaque fois. C'est un défi particulièrement complexe, même si nous disposons entre-temps de la technologie adéquate ainsi que de moyens financiers et d'un modèle opérationnel adapté pour supporter les hôpitaux dans leur approche", explique-t-il par ailleurs.
La problématique de l'anonymisation
Le CEO affirme également que la plateforme assure une anonymisation des données, en lien avec le RGPD. "Il y a un souci pour les maladies rares car les échantillons sont tellement limités par structure que c'est difficile à anonymiser", reconnaît-il. "Mais c'est pour cela que l'entreprise a monté une autre société séparée, un tiers de confiance, qui agrège les données des patients dans un échantillon plus grand. Ce qui permet de sécuriser la vie privée des patients", assure-t-il.
"Les utilisateurs peuvent encoder des termes de recherche sur la plateforme Cascador, lesquels sont ensuite transmis aux fichiers de données d'hôpitaux. C'est là que l'analyse est effectuée puisque les données médicales brutes restent sur les serveurs des hôpitaux", précise la startup, dans un souci de transparence.
De plus, "l'accès aux données ne peut être autorisé que par les hôpitaux eux-mêmes. Un contrôle absolu peut donc être garanti sur les données. Seul le résultat de l'analyse est envoyé, après anonymisation, à l'utilisateur externe. Il s'agit d'un élément fondamental de notre produit", insiste le CEO.
L'entreprise vise donc à toucher les medtech, les universités, les laboratoires, les gouvernements, etc., pour augmenter la base de données traitables. "On est déjà en collaboration avec huit hôpitaux belges, dont deux hôpitaux universitaires", lance-t-il.
Enfin, est-ce que le "terrain de jeu" est assez important pour avoir des données représentatives pour certaines maladies, parfois rares ? "Oui, mais la Belgique ne suffit pas. C'est pour cela qu'on a dès le début lancé notre activité en Suisse, où on a racheté une société locale qui avait la même vocation que nous, et nous donnes accès aux données des hôpitaux suisses. L'idée est donc de lancer cela dans deux autres pays supplémentaires", termine-t-il.