Bicloo : de la maroquinerie et des accessoires pour le cycliste à partir... de chambres à air
De plus en plus de start-up et TPE font appel aux entreprises de travail adapté.
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- Publié le 08-05-2022 à 10h44
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"La collaboration entre les entreprises de travail adapté (ETA) et les start-up ne peut être que fructueuse et est une opération win-win", note Marie Tuczynski, chargée de communication de l'Eweta, la Fédération wallonne des entreprises de travail adapté. D'ailleurs, celle-ci constate que de plus en plus de start-up et de TPE (très petites entreprises) font appel aux ETA pour le développement de leurs projets. C'est pour cette raison que l'Eweta a élu 15 start-up innovantes comme ambassadeurs du secteur en 2022. Une opération qui consiste essentiellement en une communication mettant en avant leur coopération et les atouts de celle-ci.
Relocalisation de la production
Comment expliquer cette collaboration ? "On remarque que de plus en plus de start-up wallonnes cherchent à relocaliser leur activité dans leur Région. Les entreprises de travail adapté sont un des outils qui peuvent permettre cette relocalisation. Ce sont des entreprises d'économie sociale locales, non délocalisables, inscrites très souvent dans des dynamiques de circuit court."

Autre constat : un grand nombre de start-up et petites entreprises proposent des projets engagés dans le développement durable. Elles souhaitent limiter leur impact sur l'environnement. "Cela est déjà possible rien que par le fait de produire localement et non en Chine", souligne Marie Tuczynski. Les start-up, TPE et ETA sont empreintes de valeurs sociales. Elles participent à une économie humaine et sociale, loin d'une mondialisation excessive qui ne tient compte que du rendement, du profit, de l'expansion à tout prix. "Les entreprises sont aussi contentes de faire travailler des personnes avec un handicap."
Les ETA offrent également une grande qualité de service et un large savoir-faire, indique encore la responsable de l'Eweta. Elles sont actives dans de nombreux domaines et bénéficient souvent de certifications. De plus, elles proposent également souvent des services de manutention précise, services qui sont habituellement délocalisés dans d'autres pays. Avec elles, les start-up peuvent imaginer, dessiner, prototyper, tester, améliorer et produire leurs projets en étroite collaboration. "Leur proximité est aussi un atout. Travailler avec quelqu'un de proche et qui, en plus, parle la même langue permet de mieux échanger, voir l'évolution des prototypes."
Enfin, la responsable de l'Eweta pointe la flexibilité et l'adaptabilité des ETA. "Elles sont capables de réagir rapidement en cas de demandes pour des grosses productions."
Des travailleurs valorisés
Pour les ETA, ces partenariats sont également avantageux. Ils permettent une diversification de leurs clients et donnent la possibilité aux travailleurs de se sentir valorisés en étant inclus dans le processus de production. "Les projets des start-up représentent souvent de beaux défis qu'elles aiment relever."
“Nous avons tout prototypé ensemble”
Fabricant d’articles de maroquinerie et accessoires vélos réalisés avec des anciennes chambres à air de vélos, Bicloo travaille depuis ses débuts avec l’ETA Les Érables.
“En Belgique, on ne faisait rien avec les anciennes chambres à air. On les brûlait
, raconte Valentin de Rodder, fondateur de Bicloo et ancien commercial pour un distributeur de pièces et accessoires de vélos aux Pays-Bas.
En visitant les magasins du réseau, j’ai pu voir le nombre de chambres à air jetées dans les poubelles. C’est dommage car c’est un produit intéressant. Il est résistant, waterproof… Un peu comme du cuir.”
En 2018, Valentin De Rodder arrête son activité de commercial et entame un tour d'Europe pour voir les initiatives qui existent en matière de recyclage des chambres à air et se lance dans l'idée de fabriquer des pièces de maroquinerie et des accessoires pour vélos et cyclistes. C'est en cherchant un atelier dans sa région (Tournai) qu'il rencontre un directeur d'ETA. "Leur façon de travailler m'a tout de suite parlé : écologique, d'économie sociale et en plus le volet social vient compléter la boucle." Il décide de travailler avec Les Érables. "Ils avaient un grand savoir-faire dans la confection. J'ai développé les produits avec Olivier Huyghe, le directeur. Entre cyclistes, on s'est bien entendu… Nous avons tout prototypé ensemble."

Toute la production est désormais assurée par l'ETA. "Nous occupons entre 4 et 8 personnes sur la chaîne de production de l'ETA. Nous avons créé 3 000 heures de travail social et avons déjà valorisé près d'une tonne de matière", précise Valentin De Rodder, qui souligne aussi "l'incroyable flexibilité des ETA. Si on veut produire beaucoup en une fois, c'est possible. Moins également. Et nous ne devons pas investir dans des machines." Outre les chambres à air, tous les composants sont d'origine belge. Les articles sont vendus pour 80 % dans les magasins de vélos et le reste dans des enseignes spécialisées dans les produits d'économie circulaire, les produits belges…
"Travailler avec des chambres à air était une découverte pour nous. Nous avons dû apprivoiser cette matière, explique Olivier Huyghe, directeur des Érables. À l'époque de sa fondation, en 1966, on parlait d'atelier protégé. On y faisait un peu de tout : maroquinerie, confection, conditionnement… Un grand tournant a eu lieu en 1982 quand on a commencé à faire du matériel isolant sur mesure."
L'ETA travaille avec plus de 200 grandes entreprises pour l'isolant et une dizaine pour la confection. "Nous avons un savoir-faire historique. Certaines personnes ont fait toute leur carrière chez nous." Olivier Huyghe apprécie de travailler avec des start-up. "Les grandes entreprises arrivent en général avec un produit et nous disent : 'Faites ceci'. Les start-up viennent avec une idée. Parfois bien avancée, parfois pas. Et puis, on doit concevoir et proposer des prototypes. C'est plus valorisant pour nous."