Après le rachat de Credit Suisse, la taille d'UBS va poser des problèmes de concurrence mais "c'était la seule solution"

La gigabanque née aux forceps de l'union entre UBS et Credit Suisse risque de poser des problèmes de concurrence en Suisse, a reconnu le président de la banque centrale suisse.

UBS Chairman Colm Kelleher (R) shakes hands with Credit Suisse chairman Axel Lehmann (L) after a press conference following talks over Credit Suisse in Bern on March 19, 2023. - UBS has agreed to take over its troubled Swiss rival Credit Suisse following urgent talks aimed at sparing the embattled bank from a bloodbath when the markets reopen. (Photo by Fabrice COFFRINI / AFP)
Axel Lehmann (gauche), président de Credit Suisse, et Colm Kelleher (droite), président d'UBS, se serrent la main après l'annonce du rachat. ©AFP or licensors

"UBS va devenir une très grosse banque", a reconnu Thomas Jordan, lors d'une conférence de presse, à l'occasion de sa réunion trimestrielle de politique monétaire, admettant que ce rapprochement va soulever des "questions de concurrence". Mais ce rachat de Credit Suisse par UBS était la seule "solution réalisable", a-t-il affirmé, soulignant que "la pression du temps était énorme".

Eviter une crise financière en Suisse

La confiance à l'égard de Credit Suisse s'est effondrée la semaine dernière et le ministère des finances, la banque centrale suisse et la Finma, le gendarme des marchés en Suisse, se sont engagés dans une course contre la montre ce week-end pour trouver une solution avant la réouverture des marchés asiatiques.

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La priorité de la banque centrale était de "maintenir la stabilité financière" et éviter une crise financière bien plus grave qui aurait "immédiatement" frappé la Suisse mais aussi le système financier international, a précisé le président de la banque centrale. La taille de la banque qui va émerger de cette union va créer "une nouvelle situation", a précisé M. Jordan, expliquant que la banque centrale et les autorités de régulation vont devoir apprendre "comment" la gérer.

"Nous devrons nous assurer à l'avenir qu'il y aura assez de concurrence en Suisse pour fournir des services bancaires", a-t-il prévenu, tout en réaffirmant que le système bancaire suisse est "robuste" et "résilient".

De vives critiques

Dans les milieux économiques en Suisse, des voix se sont rapidement élevées pour mettre en garde contre les répercussions pour les entreprises. Mardi, la fédération qui présente les PME s'est inquiétée des conditions de financement si la concurrence se réduit.

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Lors d'un entretien avec l'AFP, Philippe Cordonier, membre de la direction de Swissmem, l'organisation qui représente les fabricants de machines et d'équipements électriques, s'est lui aussi inquiété des risques pour les coûts "s'il n'y a plus qu'une seule grande banque qui a la capacité de travailler à l'étranger". "Cela va restreindre le choix de solutions pour les entreprises", craint-il, Credit Suisse étant jusqu'à présent un partenaire de choix pour les entreprises exportatrices suisses.

Les deux banques étant toutes deux actives dans la banque de détail dans le pays alpin, certains s'inquiètent également pour le choix au niveau des hypothèques.

La Commission de la concurrence n'a toutefois pas eu son mot à dire dans cette union.

Au niveau mondial, UBS va également devenir un géant sans égal dans la gestion de fortune. UBS est déjà le numéro un mondial de la gestion de fortune tandis que Credit Suisse est au coude à coude avec l'américain Morgan Stanley pour la deuxième place du podium. Avec ce mariage forcé, UBS va se trouver la tête de plus de 5 000 milliards de dollars d'actifs investis et 3 400 milliards dollars d'actifs sous gestion.

Une grosse banque, avec de gros risques

Avant même leur union, les deux banques faisaient déjà partie des 30 banques dans le monde considérées comme trop grosses pour les laisser faire faillite.

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Le conseil de stabilité financière, mis en place par le G20 à la suite de la faillite de la banque américaine Lehman Brothers en 2008 pour mieux encadrer le système bancaire, établit chaque année une liste des banques considérées comme systémiques. Elles sont classées en fonction des risques qu'elles posent pour le système financier mondial et doivent se conformer à des exigences plus strictes, notamment au niveau des fonds propres qu'elles doivent mettre de côté pour tenir le coup en cas de crise.

Les règles les plus strictes s'appliquent à la banque américaine JP Morgan Chase, mais UBS risque de bondir dans le classement, ce rapprochement créant une banque présentant beaucoup plus de risques pour le système financier, que les autorités suisses vont également devoir apprendre à gérer.

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