Pourquoi les réseaux sociaux ont échoué à stimuler notre intelligence collective?
Une chronique signée Roald Sieberath, multi-entrepreneur, coach de start-up et “venture partner” chez LeanSquare/Noshaq, professeur invité à l’UCLouvain et à l’UNamur.
Publié le 25-03-2023 à 09h01
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J'ai toujours été fasciné par les mécanismes de l'intelligence collective : des études avaient montré cette wisdom of the crowds, cette sagesse des foules. Si on assemble un groupe de personne, leur capacité collective à donner une bonne réponse à un problème dépend moins de la moyenne de leurs QI que de leur capacité à s'organiser, à s'écouter, à trouver un consensus.
Même pour des sujets aussi disparates que d’évaluer le poids d’un ruminant par un groupe de non-spécialistes : la moyenne des estimations de ces ignorants est souvent plus proche de la réalité que celle d’un expert…
Ceci devrait nous donner à réfléchir au fonctionnement de bon nombre de nos institutions, entreprises, gouvernements… où il est devenu souvent davantage valorisé de camper sur ses positions plutôt que de prendre un peu de la vérité de l’autre pour la mélanger à la sienne.
Je plaçais de grands espoirs dans l’avènement des réseaux sociaux, il y a quinze ans : avec un accès illimité à l’information et à la possibilité de dialoguer, nous allions forcément aller vers une nouvelle ère de sagesse collective…
Inutile de dire à quel point j’ai été désillusionné : que ce soit sur Facebook ou Twitter, des mécanismes pervers nous enchaînent dans des logiques opposées. On se maintient dans des "bulles" attentionnelles qui pensent comme nous (pro-vax ou anti-vax, pro-nucléaire ou anti-, etc.) et quand quelqu’un de "l’autre camp" débarque, il est l’objet de critiques, railleries, voire insultes, dont la plupart des protagonistes seraient incapables s’ils étaient en présence réelle de leurs interlocuteurs.
Pourtant, l’ampleur des problèmes de la planète nous invite à être moins binaires : il s’agit de trouver un chemin peut-être imparfait, mais ensemble, plutôt que jouer à avoir raison, chacun dans son coin.
Enfin, à l’ère où les Intelligences artificielles (IA) deviennent de plus en plus intelligentes et où nous leur confions des responsabilités croissantes, il serait paradoxal (et dangereux) que nous autres humains devenions collectivement plus idiots et davantage irresponsables.