LIDE rend accessibles les vols en micropesanteur grâce au planeur : un concept unique au monde
Aujourd’hui, très peu d’entreprises en Europe proposent des vols 0g.
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Publié le 01-05-2023 à 08h53 - Mis à jour le 04-05-2023 à 15h02
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Créée il y a tout juste deux ans par trois Belges et un Français, la start-up néolouvaniste LIDE est la première d'Europe à proposer des vols paraboliques en planeur. L'objectif : permettre aux chercheurs, étudiants et entreprises de réaliser leurs expériences en microgravité pour moins cher et surtout avec moins d’attente que pour un vol en Airbus ou dans la Station spatiale internationale.
Premiers tests à l'aérodrome de Saint-Hubert
Les quatre cofondateurs de LIDE se rencontrent à l’école d’ingénieurs Supaéro à Toulouse. En 2018, Denis-Gabriel Caprace lance une série de vols d'essais en planeur, ce qui donne l’idée à Mohammad Iranmanesh, actuel directeur technique de LIDE, de voir si ce loisir ne pourrait pas rendre plus accessibles les expériences en microgravité. "Nous avons réalisé une campagne de vols tests à l’aérodrome de Saint-Hubert en province de Luxembourg, raconte le jeune entrepreneur. Grâce à un boîtier de mesures 'maison', nous avons démontré qu’il était possible de rester sous les 0,1g pendant des paraboles de 5 à 6 secondes. Ce n’est pas de la microgravité parfaite 0g, mais quasiment. Ces résultats ont été présentés lors du 70e International Astronautical Congress (IAC) en 2020 et ont fait l'objet d’une publication dans la revue scientifique Microgravity, Science & Technology."

De 5 à 6 secondes en microgravité
Aujourd’hui, très peu d’entreprises en Europe proposent des vols 0g. Près de Bordeaux, la filiale "Novespace " du Centre national d’études spatiales français (Cnes) est la plus importante : elle effectue des vols paraboliques scientifiques et baptêmes d’apesanteur à partir de 6 900 euros, et jusqu’à environ 100 000 euros pour une campagne complète de tests. Cela permet d’effectuer 30 paraboles avec pour chacune 22 secondes en apesanteur – soit 11 minutes en tout – dans l’Airbus A310 Zero G, le plus gros appareil au monde capable de réaliser ce type de prestation.
Une autre solution pour bénéficier de la micropesanteur est de se rendre dans une tour qui propose des chutes libres. Il en existe par exemple une de 70 mètres en Allemagne qui permet 6 secondes de microgravité. Enfin, la Station spatiale internationale est le théâtre parfait des expériences 0g.

Ces possibilités restreintes sont synonymes de tarifs élevés et de délais d’attente particulièrement longs. "En général, il faut attendre entre 12 et 18 mois pour avoir une place, explique le directeur technique de LIDE. Notre idée est de rendre le service plus accessible grâce au planeur. Nous proposons des vols d'une quinzaine de paraboles de 5 à 6 secondes de microgravité chacune : en effet, le planeur n’a pas de moteur donc la durée totale est limitée puisque l’on perd entre 50 et 100 mètres d’altitude à chaque parabole. Par contre, l’absence de moteur fait qu’il y a très peu de vibrations, ce qui est un avantage par rapport à d’autres plateformes."
"C'est le même principe que sur l’ISS"
LIDE a validé son concept et notamment son business model lors d’un an au sein de l’accélérateur européen de start-up spatiales Astropreneurs H2020. La jeune pousse facture 30 euros la seconde en micropesanteur et propose des tarifs à la journée de vol. Elle a déjà plusieurs clients dans le monde scientifique et académique, et notamment l’UCLouvain qui supporte le projet depuis le début, et avec laquelle elle a conçu et fabriqué son rack d’expériences. "Une autre particularité de notre offre est de simplifier la vie du client avec un boîtier que nous fournissons : il délivre la puissance électrique pour brancher les différentes expériences dans le planeur et est équipé de capteurs pour enregistrer toutes les données, poursuit Mohammad Iranmanesh. C’est le même principe que sur l’ISS, mais encore inédit sur un planeur. Les scientifiques n’ont qu’à amener le 'cœur' de leur expérience sans se soucier de la logistique."
Au départ, les planeurs ne sont pas conçus pour effectuer des vols paraboliques. Leurs équipements électroniques sont donc sommaires. C'est pourquoi la jeune pousse a développé un "boîtier co-pilote" pourvu d’un écran qui assiste le pilote dans ses manœuvres.

Pour l’instant, les clients de LIDE doivent se rendre sur la base de Saint-Hubert pour bénéficier du planeur que loue la jeune pousse. Mais à terme, l’entreprise compte multiplier ses implantations dans les aérodromes de Belgique et d’ailleurs, afin de maximiser l’accessibilité aux chercheurs, aux étudiants et aux entreprises dans toute l’Europe.
Une clientèle de start-up
Outre les clients académiques, LIDE vise une clientèle de start-up. "Les entreprises du new space développent de plus en plus de mécanismes complexes, par exemple pour le déploiement des panneaux solaires ou des antennes d’un satellite, détaille le directeur technique de LIDE. Nous pouvons aider les start-up qui n’ont pas les moyens de test d’un Airbus ou d’un Thalès Alenia Space." Dans un second temps, la société ambitionne aussi de vendre directement les données d’expériences qu’elle réaliserait elle-même dans son planeur pour les clients. "On pourrait imaginer mesurer le comportement d’un objet en microgravité et fournir ces données à une start-up spécialisée dans la récupération de débris dans l’espace", complète Mohammad Iranmanesh.
Enfin, à plus long terme, la jeune pousse aimerait utiliser un planeur drone sans pilote et pourvu d'un petit moteur, afin de pouvoir réaliser des expériences sur une plus longue durée. L’obstacle ici est toutefois la réglementation européenne, très stricte en matière de vols de drones.
LIDE compte à ce jour six collaborateurs. Officiellement ASBL, l’entreprise a jusque-là grandi sur fonds propres et finalise la définition de son marché, avant, si tout va bien, de se convertir en société anonyme.