Petra De Sutter : "J'ai commis une erreur de débutante"
Auditionnée à la Chambre sur le dossier bpost, la ministre Groen s’est défendue notamment en renvoyant la balle à la présidente du conseil d’administration de l’entreprise publique.
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Publié le 09-05-2023 à 18h54 - Mis à jour le 09-05-2023 à 19h37
Lors de l’audition ce mardi matin en Commission parlementaire sur le très gênant dossier bpost, la ministre des Entreprises publiques Petra De Sutter (Groen) n’a pas paru être mise en difficulté. Elle a d’abord admis avoir commis quelques erreurs, dont celle de s’être attaché les services, au sein de son cabinet, de deux collaborateurs de bpost qui étaient payés par l’entreprise publique. Elle a ensuite renvoyé la balle à la présidente du conseil d’administration, Audrey Hanard, nommée par le PS. Et enfin, elle a lancé quelques pistes pour “relancer l’entreprise”.
Interrogée par plusieurs parlementaires dont Michael Freilich (N-VA) sur “l’apparence de conflit d’intérêts” visant les deux collaborateurs du cabinet payés par bpost, elle a assuré que ceux-ci avaient œuvré “dans l’intérêt général”. “Ils ont travaillé pour moi et pas pour bpost, a-t-elle assuré. On n’a jamais parlé des affaires internes de l’entreprise publique.” Il ne faut certainement pas, à l’entendre, leur attribuer un rôle décisionnel dans le 7e contrat de gestion de bpost approuvé par le gouvernement en juillet 2021. Contrat de gestion qui comprend des compensations financières de l’État en échange de certains services jugées trop élevées par la N-VA notamment.
La ministre a énuméré une série de décisions qui “prouvent qu’elle n’a pas roulé pour l’entreprise publique”. Si elle a fait appel à ces deux conseillers, c’est parce qu’il y a “trop peu d’expertise en matière postale”, notamment au niveau du régulateur, l’IBPT. “Je veux renforcer le régulateur qui n’est pas très fort sur les systèmes postaux. Il est plus fort sur les télécoms.”
Compte tenu de la polémique sur leur présence dans son cabinet, la ministre a décidé que les deux collaborateurs incriminés retourneraient dans l’entreprise d’où ils viennent “car ils ne peuvent plus faire leur travail”. “Ce sont des personnes intègres, mais elles n’étaient plus crédibles dans leur travail et mon travail.”
Petra De Sutter a aussi évoqué l’arrêté royal de 2001, qui permet les détachements de collaborateurs venant d’entreprises publiques dans les cabinets ministériels. Cet AR “doit être adapté pour ne plus avoir de personnes détachées à partir de sociétés cotées”.
La ministre a estimé qu’il s’agissait de “mauvaises pratiques du passé qu’il faut faire cesser. C’était une erreur de débutant”.
Concession de journaux
Sur le sujet tout aussi délicat de la concession pour la distribution de journaux qui fait l’objet de soupçons de collusion, la ministre a une fois encore renvoyé la balle au camp socialiste et plus particulièrement au ministre de l’Économie Pierre-Yves Dermagne (PS) en charge de l’appel d’offres. Elle a aussi rappelé que c’est à partir de l’audit interne sur la concession de journaux initiée par la présidente du conseil d’administration Audrey Hanard que “tout a commencé”. À la demande de plusieurs parlementaires de rendre cet audit public, elle a répondu qu’il “appartient à bpost “de le faire, tout en regrettant que ce ne soit pas encore fait.
Pour rappel, cet audit a conduit à la démission de trois collaborateurs de bpost, dont l’ex-CEO Dirk Tirez. On devrait en savoir plus sur son contenu lors de la très attendue audition la semaine prochaine de la présidente du conseil d’administration. “S’il s’avère, comme certains le prétendent, que cet audit n’est pas réalisé de manière correcte, il faudra que la présidente du conseil d’administration s’en explique”, a ajouté la ministre. Elle a rappelé que le gouvernement avait lui-même demandé un audit externe sur les surfacturations. “Quand celui-ci sera terminé, on va se constituer partie civile.”
”Zone grise”
Parmi les raisons qui expliquent les nombreux dérapages chez bpost (détenue à 51 % par l’État belge), la ministre a cité le statut de l’entreprise publique. “Bpost a toujours eu beaucoup de contrats avec l’État belge. Il y a une zone grise depuis plus de dix ans.” Petra De Sutter a aussi chargé “l’ancien management qui s’était spécialisé dans la mise en place d’un système qui maximisait les contrats”. “Bpost l’a avoué elle-même. La ligne qui délimite les pratiques légales était régulièrement franchie.”
À plusieurs reprises, la ministre, dont la démission n’a pas été demandée, a dit “vouloir se tourner vers l’avenir”. “Face à ces pratiques inadmissibles, le gouvernement doit tirer les leçons. Nous allons continuer le grand nettoyage chez bpost.”
La députée Catherine Fonck (Les Engagés) a salué certaines pistes évoquées par la ministre pour clarifier la situation, mais a marqué son souhait d’obtenir les procès-verbaux de toutes les réunions intercabinets concernant bpost afin de faire toute la transparence.