"Je veux que le monde de l’entreprise ait un mot à dire dans le monde de l’enseignement"
Pour l’UCM, cela permettrait de mieux expliquer les choses, de sensibiliser, de mieux communiquer. “Il y a derrière les différences de perception entre ces deux mondes pas mal de gaspillage d’argent public”, estime son président.
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- Publié le 30-08-2023 à 07h20
- Mis à jour le 30-08-2023 à 16h33
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L’emploi. C’est l’une des clés pour relever le marché de l’emploi, pérenniser le système des retraites… Mais pour l’UCM, un focus particulier doit être mis sur les formations. Explications.
Vous rangez-vous du côté de ceux qui pensent qu’il faut davantage de sanctions pour les demandeurs d’emploi qui ne jouent pas le jeu ?
Je pense qu’il faut redéfinir un nouveau contrat social. Des droits sont inscrits dans la Constitution mais il y a des devoirs aussi. De notre côté, nous ne sommes pas contre des sanctions pour les cas les plus évidents. Mais nous estimons qu’il faut d’abord inciter avant de sanctionner. L’idée d’allocations de chômage duales figure dans notre mémorandum. Il s’agit de proposer une allocation de base aux demandeurs d’emploi, qui pourrait être relevée d’un bonus financier pour ceux qui se forment à de nouvelles compétences, spécialement dans les métiers en pénurie. Cela permettrait plus facilement des reconversions. La formation est essentielle et on n’en fait pas assez à ce niveau-là. Aujourd’hui, 5 jours de formation individuelle par an sont possibles dans les entreprises. Mais c’est très difficile de les mener dans les TPE et PME. On doit pouvoir valoriser, dans ces petites entreprises, les formations qui sont données en interne, et qui sont souvent plus longues, plus denses, parce qu’il faut être beaucoup plus spécialisé ou polyvalent dans les petites sociétés. Là, il faut du changement…
"Nous ne sommes pas contre des sanctions pour les cas les plus évidents mais nous estimons qu’il faut d’abord inciter avant de sanctionner"
Comment orchestrer ce changement ?
On veut que l’UCM exerce un rôle déterminant dans des sphères de compétences dans lesquelles nous ne sommes pas intégrés aujourd’hui, ou pas suffisamment, et dans lesquelles l’avenir est pourtant fondamental sur le plan de l’éducation : les sphères de l’enseignement, donc. Nous devons avoir une présence dans des centres de décision comme le Segec (Secrétariat général de l’enseignement catholique) ou de l’Ares (Académie de recherche et d’enseignement supérieur par exemple), les organes représentant les hautes écoles et les universités. Je veux que le monde de l’entreprise ait un mot à dire dans le monde de l’enseignement. Je ne m’attends pas à ce que ce soit facile, parce que c’est un peu révolutionnaire, mais on doit rapprocher l’enseignement, académique aussi, de celui de l’entreprise. Je crois vraiment que dans beaucoup de cas, l’alternance, l’immersion dans l’entreprise, c’est la meilleure façon d’apprendre. Ce mode d’apprentissage est déjà fort présent dans d’autres pays. On a compris que chez nous, la Rolls-Royce de la formation, c’est le Forem. Mais du côté de l’IFAPME (l’Institut wallon de Formation en Alternance et des indépendants et Petites et Moyennes Entreprises), il y a l’ambition de mieux valoriser l'apprentissage en alternance. Et je ne pense pas que cela soit incompatible avec l'argument avancé par les enseignants de dire qu’ils forment des gens à vivre en société, pas dans une entreprise. On a vu récemment avec le cas “Odoo” que les mentalités n’étaient pas prêtes (l’entreprise avait été invitée dans des écoles pour parler de la société, ce qui avait suscité la polémique, NdlR)…
Et vous pensez pouvoir faire évoluer cette mentalité ?
Rentrer dans les instances de décision nous permettrait de mieux expliquer les choses, de sensibiliser, de mieux communiquer entre nous… Il y a derrière les différences de perception entre ces deux mondes pas mal de gaspillage d’argent public. Des structures se mettent en place qui font des ronds dans l’eau mais qui ne correspondent pas aux attentes des entreprises. C’est dommage parce qu’on devrait pouvoir travailler ensemble, et pouvoir peser sur le choix des formations. Je suis conscient que cela va prendre du temps et que ce sera compliqué, mais c’est indispensable.
Un petit mot sur les normes environnementales, pour lutter contre le réchauffement climatique, notamment…
Les normes ESG (l’investissement environnemental, social et de gouvernance, NdlR) vont s’imposer et c’est une bonne chose. Mais chaque entreprise devrait pouvoir y aller à son rythme. Il faut que les plus petites soient aidées, accompagnées, voire financièrement soutenues pour assurer cette transition. Les entreprises de plus de 100 personnes n’ont pas les mêmes contraintes que les plus petites. Mais il y a une question de mentalité aussi. Quand on parle avec certains patrons de leur responsabilité envers l’environnement, ils deviennent nerveux et sont convaincus que demain, monter dans une voiture sera un acte de désobéissance civile, voire une infraction pénale que certains talibans verts vont leur imposer. Je pense personnellement qu’il faudrait se poser et prendre du recul par rapport à tout ce qui existe déjà, et qu’on voit le chemin qui reste à parcourir.