Avec ou sans la Chine, la logistique belge post-Covid va profondément changer
La moitié des logisticiens belges n’est pas préparée à la marche en avant de la Chine. Un manque d’intérêt surprenant.
Publié le 07-05-2020 à 08h35 - Mis à jour le 07-05-2020 à 09h15
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La moitié des logisticiens belges n’est pas préparée à la marche en avant de la Chine. Un manque d’intérêt surprenant.
Le dernier baromètre de Montea, société immobilière cotée en Bourse, investie dans la logistique en Belgique et aux Pays-Bas (près de 1,4 million de m²), s’interroge sur l’impréparation des logisticiens belges face à l’organisation plus que ciselée de leurs homologues chinois. En pleine crise du coronavirus, ce sujet pouvait mal tomber. Ne fût-ce que parce que celle-ci ébranle des principes pro-chinois qu’on pensait définitivement acquis, comme le just in time (organisation qui suppose que la production est déterminée par la demande et non par l’offre) ou le single supplier (le fait de travailler avec un seul fournisseur sur lequel on peut faire pression).
Prise de pouvoir de la Chine sur le marché
"Les deux sujets sont pourtant liés, indique Jo de Wolf, CEO de Montea. Sur les 9 premiers mois de 2019, les Chinois n’ont importé en Belgique que 12,4 milliards d’euros de biens et services. Quatre fois moins que les Pays-Bas. Mais leur organisation est telle que, Covid-19 ou pas, ce chiffre va aller en grandissant. Or, la moitié des sociétés de logistique belges ne s’y préparent pas." Il faut dire que 15 % seulement d’entre elles disent avoir ressenti un impact significatif de la Chine en 2019 ; et à peine un quart s’attend à ressentir un "effet Chine" en 2020 ou 2021.
Des chiffres sous-estimés, selon Montea. "La crise du coronavirus va nous permettre de comprendre que la Chine est plus proche que nous le pensons, ajoute Jo De Wolf. Et mieux armée sur le plan de l’innovation ou de l’écologie. On ne peut plus la confiner au statut d’usine polluante du monde." Et d’encourager les logisticiens belges à aller chercher les opportunités "sous forme de partenariats internationaux avec les entreprises chinoises". Ou en prenant part à l’initiative Belt and Road, cette nouvelle route de la soie permettant à la Chine de se connecter à l’Europe et l’Afrique du Nord, par des investissements en infrastructures.
La douloureuse prise de conscience pendant la crise du coronavirus de l’ultra-dépendance de l’Europe par rapport à la Chine pourrait ne pas modifier le parcours de cette Belt and Road. Mais elle va probablement changer le paysage logistique belge. "Il va falloir repenser le ‘just in time’ et le ‘single supplier’ d’hier, détaille Jo de Wolf. Les entreprises vont augmenter leurs stocks, ce que les taux d’intérêt bas facilitent. Une partie de la production sera ramenée en Europe, ce qui se fera d’autant plus facilement que la tendance est déjà aux plus petits volumes, personnalisés et robotisés. Et puis, surtout, il y a cette nouvelle habitude prise par les consommateurs belges de faire leur shopping sur Internet…" Et comme les plateformes promettent une livraison dans les quatre ou cinq heures, ce n’est plus au départ d’énormes entrepôts de 100 000 m² situés aux Pays-Bas qu’ils seront livrés, mais de plus petites structures de 2 000 à 3 000 m² à 20 km des principaux centres urbains (Bruxelles, Anvers, Liège…). "C’est ce que nous développons près d’Anvers pour DHL, qui fera ses livraisons en van électrique ou en vélo-cargo", poursuit le CEO de Montea, qui pense que d’autres se feront ailleurs. "Mais mon rêve, ce serait de créer une plateforme pour plusieurs joueurs qui mutualiseraient leurs livraisons, s’arrangeant pour qu’il n’y en ait plus qu’une, groupée, chez chaque particulier. Comme la poste."