L’accès à une agence immobilière sociale sera plus strict
Les AIS, à la tête de 7 000 logements à Bruxelles, sont victimes de leur succès. Le système sera plafonné.
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- Publié le 07-01-2021 à 13h17
- Mis à jour le 07-01-2021 à 13h18
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Les agences immobilières sociales (AIS) sont des associations dont l’objectif est de favoriser l’accès au logement à des ménages en fonction de leurs revenus. Les AIS jouent en fait le rôle d’intermédiaire entre bailleurs et locataires et s’occupent de la gestion locative pour des bailleurs prêts à sacrifier une partie de leurs revenus locatifs (on parle d’une décote d’environ 30 %) au profit d’une gestion externalisée.
Concrètement, les AIS garantissent le paiement du loyer au propriétaire qui est, ainsi, certain de voir son logement occupé sans crainte pour les questions financières. La différence de prix est, en quelque sorte, comblée par les primes et autres avantages fiscaux octroyés aux promoteurs par les autorités bruxelloises.
Ces dernières ont largement soutenu les AIS qui permettent de répondre – au moins en partie – à une offre immobilière déficitaire, surtout à Bruxelles où près de 49 .000 ménages sont sur la liste d’attente du logement social. Rien qu’à Bruxelles, les AIS sont à la tête d’un parc immobilier qui compte près de 7.000 logements.
Un mécanisme attractif pour les propriétaires…
Initialement, ce système avait été prévu pour que des particuliers mettent leurs biens en location. Mais au fil des ans, des promoteurs et investisseurs professionnels s’y sont intéressés, attirés notamment par les primes et avantages fiscaux, rendant le système rentable et efficace. Ce système est, à la fois, une aubaine pour les Bruxellois qui peinent à trouver un toit, mais également une opportunité pour les promoteurs immobiliers, surtout ceux issus du secteur privé et qui mettent à disposition du public un parc immobilier neuf et, forcément, plus attractif.
Et s’il s’agit d’une opportunité pour certains de ces promoteurs, c’est notamment grâce aux différents avantages fiscaux décidés par le Gouvernement bruxellois, mais aussi par le fédéral. C’est le cas de la réduction à 12 % de la TVA pour les logements neufs mis sur ce marché où la demande est constante.
Certains propriétaires auraient même quelque peu abusé de ce mécanisme puisque, après en avoir profité pendant quelques années, ils quittent le système des AIS afin de revendre leur bien avec plus-value.
… et trop cher pour le gouvernement
Le Gouvernement bruxellois, qui a longtemps soutenu ce mécanisme, a été forcé de creuser dans les budgets pour récupérer des sous en cette période de crise sanitaire. Lors de son dernier conclave budgétaire, la Région bruxelloise a donc changé sa politique concernant les AIS avec un argument : le coût du mécanisme.
Car le financement des subsides dédiés aux agences immobilières sociales est de 23,5 millions d’euros pour 2021, soit 4 % du budget logement à Bruxelles. Un montant auquel s’ajoutent entre 3,5 et 6 millions d’euros de “manque à gagner” suite à l’exemption totale du précompte immobilier pour tous les logements AIS.
Si ce système a un intérêt social dans cette crise du logement qui touche Bruxelles, son coût a donc poussé le Gouvernement bruxellois à revoir son fonctionnement en plafonnant le nombre de logements à prendre en gestion par une agence immobilière sociale. Un encadrement qui limitera la progression à 2.500 logements supplémentaires sur les cinq ans que compte la législature.
Ceux qui vont y perdre : “les personnes précaires”
Pour Anne Bauwelinckx, chargée de projet au Rassemblement Bruxellois pour le Droit à l’Habitat (RBDH) – plateforme qui regroupe 50 associations de défense du droit au logement – cette décision n’était pas la solution la plus optimale pour un mécanisme dont l’objectif est, avant tout, social. “Nous sommes favorables à une solution qui permettrait de limiter les coûts, d’éviter l’exploitation du système par de gros investisseurs, tout en permettant aux AIS de se développer. C’est possible, par exemple, en imposant des durées de socialisation plus longues, en prévoyant un droit de préemption avec limitation de la plus-value, en taxant la plus-value en cas de revente du bien, en privilégiant les structures coopératives, ou encore en adaptant les avantages fiscaux”, explique Anne Bauwelinckx.
Le RBDH estime que l’exécutif bruxellois “s’attaque au problème par le mauvais bout. Plafonner le nombre de logements pris en gestion par des AIS, c’est limiter la progression de 2 500 logements supplémentaires sur les 5 ans que compte la législature. Si l’on se base sur les trois dernières années, lors desquelles près de 750 logements ont rejoint le parc chaque année, on pouvait tabler sur une progression d’au moins 3 750 logements sur 5 ans. En d’autres termes, l’exécutif privilégie une piste qui va réduire le nombre de logements disponibles au lieu d’octroyer des subsides de façon plus intelligente. Ceux qui vont y perdre, ce seront, comme toujours, les personnes précaires”.