Bulle immobilière : les Bruxellois ne pourront-ils bientôt plus acheter à Bruxelles ?
En trois ans, les prix ont crû de 30 %. La bulle ne devrait pas éclater, dixit les experts-géomètres.
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- Publié le 16-02-2022 à 13h00
- Mis à jour le 21-02-2022 à 11h03
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Les géomètres-experts de Bruxelles ne disent pas autre chose que les notaires, les agents immobiliers ou le SPF Économie : les prix ont continué à augmenter dans la capitale en 2021. Toutefois, selon eux, la hausse se résorbe. Ils tablent même sur une stabilisation cette année. Il n’empêche, celle-ci arrivera après trois années de boom.
1. Poursuite de la hausse des prix, mais en mode mineur
Contrairement aux traditionnelles statistiques immobilières qui se basent sur les prix de vente, celles des géomètres sont liées à des coefficients qui tiennent compte du type de bien, de sa localisation, de sa superficie, de son état, de ses équipements… "De quoi aboutir non pas à un prix, mais à une sorte de rapport qualité/prix", sourit Eric De Keghel, président de la Commission du marché immobilier de l'Union des géomètres experts de Bruxelles (UGEB).
En 2021, à Bruxelles, les indices UGEB des maisons unifamiliales ont augmenté de 9,5 % en gré à gré et de 4,8 % en ventes publiques. Du côté des appartements, la hausse des prix au mètre carré atteint, respectivement, 10,3 et 3,4 %. Pour les maisons de rapport, c'est un peu l'inverse, puisque la hausse est moins forte en gré à gré (+5,4 %) qu'en ventes publiques (+10,7 %). "Parce que ce sont davantage des professionnels qui s'y intéressent, qui acceptent une moindre rentabilité qu'avant, explique l'expert. Il y a quelques années, ils exigeaient 4,5 % de leur maison de rapport. Aujourd'hui, ils se contentent de 3,5 %. Ils ont de l'argent à placer et sont déjà contents d'en trouver une."

2. Des jeunes plus attentifs à leur budget
"C'est de plus en plus frappant : les jeunes ont un budget qu'ils ne dépassent pas, poursuit Eric De Keghel. Il ne s'agit pas d'un montant pour l'achat, mais d'une enveloppe mensuelle pour se loger, qui englobe remboursement du prêt, investissements, frais et charges." Et d'expliquer cette prise de conscience, bien entendu, par la hausse vertigineuse des prix depuis 2019, mais aussi par les informations toujours plus nombreuses et précises qui sont données sur un bien. Que celui-ci soit vendu de gré à gré ou en ventes publiques. "Très certainement depuis l'avènement de Biddit, la plateforme d'enchères des notaires."

3. Des studios devenus hors de prix
C'est une lapalissade de dire que plus un bien est petit, plus il est cher au mètre carré. En cette année 2021, c'est encore plus marqué. "Les prix ayant fortement augmenté, le nombre d'amateurs visant les biens moins onéreux sont toujours plus nombreux. Quitte à devoir se contenter de quelque chose de plus petit. C'est frappant dans le segment des studios : sous la barre des 4 000 euros/m², ils sont difficiles à trouver. Alors que l'an dernier, le cap fatidique tournait autour des 3 500 euros/m². Certains candidats n'ont pas le choix. C'est ça ou rien…"

4. L’attrait des terrasses supplante celui des garages
La crise du Covid et ses enfermements à répétition ont incité les candidats acquéreurs à investir dans des espaces extérieurs. Les garages, par contre, sont moins courus qu'ils ne l'étaient dans le passé. "Globalement, oui, ils sont moins recherchés, indique Eric De Keghel. Mais cela dépend de l'âge des acheteurs. Les plus âgés ne peuvent pas s'en passer. Ils en cherchent même deux plutôt qu'un. Par contre, les trentenaires s'en désintéressent. À long terme, le garage n'aura plus l'importance immobilière qu'il a eue."

5. Une bulle qui ne devrait pas éclater
Alors que, depuis 2012, les prix de vente progressaient de quelques pour-cent par an – voire diminuaient certaines années –, en 2019, ils ont subitement explosé avec des hausses à deux chiffres. L'année 2020, qui a plongé la population dans la crise du Covid, aurait pu stopper ce mouvement. "Contre toute attente, la crise l'a amplifié, indique Eric De Keghel. Il y a eu une demande énorme et, face à elle, une offre réduite. Le tout sur fond de taux d'intérêt hypothécaire bas."

Résultat, en trois ans (entre 2019 et 2021), les prix à Bruxelles ont augmenté de plus de 30 % selon les indices de l'UGEB : entre 31 et 35 % pour les maisons d'habitation selon le mode de vente ; autour des 33 % pour les maisons de rapport ; de 33 % pour les appartements en vente publique contre 24,4 % de gré à gré. "J'y vois une bulle, très certainement, mais je ne m'attends pas à ce qu'elle éclate. Entre 1998 et 2008, les prix ont augmenté de 250 % à Bruxelles ! En dix ans, ils ont donc été multipliés par 2,5. Et Bruxelles est pourtant passée au travers."
Ce qui ne signifie pas qu’il ne s’inquiète pas. D’une hausse des taux qui limiterait la demande, venant chambouler le marché. Mais aussi de l’incapacité des Bruxellois à acheter à Bruxelles.