Installer une borne de recharge pour voiture électrique dans une copropriété : ces points qui fâchent et peuvent mener à un refus
Libre Immo | Le dossier. Le sujet des bornes de recharge pour les voitures électriques fait de plus en plus souvent l’objet d’un point à l’ordre du jour des AG. Porté par un ou plusieurs copropriétaires.
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Publié le 11-05-2023 à 14h19
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Avec le succès grandissant des véhicules électriques, de plus en plus de copropriétés sont sollicitées par un ou plusieurs copropriétaires pour installer une borne électrique dans leurs sous-sols ou leurs parkings privés. Très certainement à Bruxelles où la recharge via une simple prise de courant est désormais interdite.
Ces demandes ne sont toutefois pas toujours acceptées par la majorité. "Cela fait quelques années déjà que des questions nous parviennent. Mais il est vrai que le sujet interpelle aujourd'hui un nombre plus important de copropriétés", confirme Marianne Palamides, juriste au SNPC, le Syndicat national des propriétaires et copropriétaires. Pour preuve de cet intérêt, elle a écrit quasiment coup sur coup deux articles à ce propos dans la revue Le Cri du SNPC, l'un en mai 2021, l'autre en janvier 2022. Et un troisième est en préparation pour septembre 2023.
Un article qui pourrait s’étaler sur davantage de pages tant il est vrai que la question des bornes est régionale. La Région de Bruxelles-Capitale a d’ailleurs légiféré récemment avec un arrêté "déterminant les ratios de points de recharge pour les parkings, ainsi que certaines conditions de sécurité supplémentaires y applicables".
Droit et devoir
La majorité des questions qui atterrissent au SNPC émanent de copropriétaires désireux d'installer, pour eux et à leurs frais, une borne de recharge dans leur propre emplacement de parking. "Mais tous les cas de figure existent", ajoute Marianne Palamides, faisant référence à des copropriétaires inquiets, à des syndics préoccupés, mais aussi à des copropriétés qui, d'emblée, envisageraient le placement de bornes de manière collective.
L'origine de ces appels tient dans un article de loi adopté en 2018 "qui reconnaît aux copropriétaires - tout comme à des opérateurs énergétiques (eau, gaz, électricité, télécoms…) - le droit de modifier, améliorer, optimaliser l'infrastructure à leurs frais exclusifs et pour leur propre compte, pourvu qu'ils n'en changent pas la destination et qu'ils ne nuisent pas aux droits des autres copropriétaires, détaille Marianne Palamides. Mais si le législateur leur accorde cette possibilité, il impose néanmoins que les demandeurs soumettent leur projet à la copropriété qui peut l'autoriser, l'effectuer elle-même ou… s'y opposer." Assurément si cela affecte les parties communes (gainages et autres raccordements qui traverseraient l'allée centrale ou qui devraient être reliés à un compteur général ou privatif dans un local commun), mais même si aucun travail n'est exécuté hors du lot privatif.
Des arguments techniques précis
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est vivement conseillé à ceux qui veulent installer une borne de recharge dans leur propre garage de préparer soigneusement leur dossier argumentaire à envoyer au syndic ou aux autres copropriétaires. Un dossier comprenant non seulement une description très précise des travaux envisagés (plans, schémas à respecter, positionnement des bornes, puissance de l’installation…), mais aussi un justificatif précis de l’optimisation de l’infrastructure envisagée.
"La copropriété ayant deux mois pour réagir, ajoute Marianne Palamides, elle ne doit pas tarder à organiser une assemblée générale extraordinaire." Qui, par deux-tiers des voix des copropriétaires présents et représentés, peut donc accepter ou refuser une demande en matière de bornes électriques. En cas de refus, le copropriétaire se jugeant lésé suite, par exemple, à l'absence de juste motif ou par le caractère abusif de la décision, a quatre mois pour initier une procédure en justice de paix.
Motifs d’opposition
De nombreuses copropriétés sont favorables à l'installation de bornes, d'autres peuvent avoir un intérêt tout à fait légitime à s'y opposer. Pour de multiples raisons. "Parce qu'une telle infrastructure dans les communs existe déjà, ne nécessitant donc pas d'installation individuelle, liste la juriste du SNPC ; parce que l'infrastructure ou les travaux de réalisation provoqueraient d'importants dommages à l'apparence de l'immeuble (si la borne est placée en surface ou en façade, par exemple) ou à des communs ; parce qu'il y aurait des risques en matière de sécurité (localisation des points de recharge, accès des pompiers en cas d'incendie, ventilation et extraction d'air, pictogrammes à installer…), de puissance (résistance, accumulation de batteries…), de ratio (nombre de points de recharge, surface accordée, dimensionnement…) ; mais encore si le projet n'apporte aucune optimalisation de l'infrastructure ; ou s'il alourdit la charge financière des autres copropriétaires, ne fut-ce qu'en matière de primes d'assurance."
Et ce quand bien même les (lourds) frais d’installation (achat, entretien…) seraient assumés par le ou les seuls copropriétaires concernés.
Et si le risque électrique affectait… l’assurance incendie ?
Si les copropriétés s’inquiètent de la présence de bornes de recharges au sein de leur bâtiment, dans des parkings fermés, ce n’est pas illégitime. “Le risque électrique est inhérent à toute installation électrique, pointe Marianne Palamides dans son article paru dans la revue du SNPC Le Cri de mai 2021. Il faut donc veiller à la conformité de la borne, à la certification de l’installation et au bon entretien de toute l’installation électrique, le cas échéant, fût-ce pour remplacer des pièces éventuellement endommagées.”
Et d’ajouter que dans le cas des bornes, le risque est lié “non pas à la recharge même du véhicule mais bien à la présence de la batterie qui équipe le véhicule électrique.” Il est toutefois un autre point auquel on ne pense pas directement : le fait que, vu le risque d’incendie évoqué, l’assureur de la copropriété “conditionne le maintien de la police d’assurance à la réalisation d’autres conditions de travaux de sécurisation, par exemple” ou, tout simplement “augmente considérablement le montant des primes dues par la copropriété, voire refuse de couvrir le risque d’incendie ou la responsabilité civile de l’immeuble en copropriété forcée et des copropriétaires individuels.” Or, le législateur a bien précisé qu’il autorisait ce type de travaux à condition qu’ils n’alourdissent pas la charge financière des autres copropriétaires…