Durabilité dans la construction : "Les bonnes intentions ne suffisent pas"
Libre Immo | Le portrait. Isabelle De Bruyne est Chief Sustainability Officer pour le groupe CFE.
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Publié le 22-05-2023 à 11h25
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Élue Sustainability Professional 2023 par Time for Society et VBO FED, Isabelle De Bruyne, responsable de la durabilité pour le groupe de construction CFE, voit ce prix récompensant les professionnels qui mettent en œuvre une politique de développement durable progressive au sein de leur organisation et assument un rôle de leadership dans leur secteur comme la cerise sur le gâteau des efforts fournis. "Ce n'est pas une fin en soi. Mais cela montre que nous sommes sur la bonne voie", précise-t-elle.
Issue d'une famille bruxelloise modeste, Isabelle De Bruyne estime qu'elle a eu la chance d'être douée en maths, ce qui l'a poussée à présenter l'examen d'entrée en ingénieur civil à l'ULB. "Les études m'ont plu immédiatement car la matière est très large", confie-t-elle. C'est lors d'un stage en première année qu'elle découvre le monde de la construction. "Mon père m'avait dit : 'Je suis sûr que tu t'amuseras'. Et ce fut le cas. J'ai tout de suite accroché et je me suis dit que ma vie, ce serait ça. J'ai adoré la collaboration humaine, véritable, le contact avec des gens différents et le fait de voir un projet progresser." De quoi la pousser à choisir l'option construction. À la possibilité de faire un doctorat, elle préfère travailler sur le terrain. Et ce sera directement les pieds dans la boue, sur un chantier de génie civil chez BPC, filiale de CFE.
Pendant dix-sept ans, elle travaille sur des chantiers de construction. Son premier projet : la Dexia Tower. "J'ai eu ma première fille durant le chantier. Et ma seconde au cours d'un autre projet. Mais j'ai eu un patron fantastique qui m'a promue directrice du chantier alors que j'étais enceinte."
Changer les choses
À l'approche de ses 40 ans, Isabelle De Bruyne commence à se poser des questions. "J'adorais toujours ma profession et le travail sur le terrain mais je trouvais que le métier partait dans la mauvaise direction : plannings de plus en plus serrés, marges réduites, qualité des matériaux en baisse… Cela crée toujours des tensions sur les chantiers. Et je n'aime pas ça… Je me suis dit qu'on pouvait changer les choses", raconte celle qui accepte, en 2019, le poste nouvellement créé de Chief Sustainability Officer pour le groupe CFE. Avec une condition : que la société ait vraiment l'envie d'avoir un impact et qu'il ne s'agisse pas de greenwashing. "J'ai besoin que ce que je fais ait du sens. Je ne me suis pas trompée quand je vois le chemin que nous avons accompli avec toutes les équipes en trois ans."
La première étape de son travail fut de définir ce que le groupe ambitionnait d'être. "CFE faisait déjà des choses en matière d'ESG mais cela manquait de structure. Il a fallu fixer des objectifs, mesurer. C'est important car avoir de bonnes intentions ne suffit pas…", estime Isabelle De Bruyne, qui travaille en étroite collaboration avec ses relais dans les différentes filiales du groupe. "Il ne faut pas perdre le contact avec le terrain. Les meilleures idées viennent de là."
C'est également avec tout le secteur que CFE a décidé d'avancer. "On ne peut pas tout changer tout seul. Et puis il faut aussi comprendre la réalité des autres parties, constate la Chief Sustainability Officer. Nous sommes pionniers dans la démarche. Notamment parce que le groupe rassemble plusieurs métiers ; entreprise générale, promoteur ou encore multitechnique avec VMA, qui a développé un produit, VManager, qui apporte des solutions énergétiques pour les bâtiments. Ces métiers nous donnent une force énorme pour avoir une réelle vision globale. Nous pouvons concevoir un bâtiment du design à la maintenance."
C'est d'ailleurs ce que le groupe réalise avec son nouveau siège dont la construction devrait être achevée cette année. Baptisé WoodUp, le bâtiment situé près de Demey à Auderghem propose une structure originale qui allie bois et béton et se veut en avance sur toutes les techniques et normes : matériaux biosourcés, récupération de plancher, quasi neutralité énergétique… "Nous avons essayé d'y mettre tout ce que nous savons faire. C'est réellement une vitrine. Pour aujourd'hui, mais aussi pour le futur."