Comment déclarer les revenus mobiliers perçus à l'étranger ?
Dividendes, intérêts, placements, constructions juridiques à l’étranger, etc. Quel sort fiscal ?
Publié le 01-06-2021 à 15h19 - Mis à jour le 08-06-2021 à 15h15
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Pour rentrer directement dans le vif du sujet, deux cadres de la déclaration sont concernés par la fiscalité patrimoniale.
Déclaration des revenus (cadre VII)
Au code 1444-11 : les dividendes et intérêts "nets frontières" perçus à l’étranger, soit les montants bruts diminués de l’impôt prélevé à l’étranger et des frais éventuels. Ces montants sont repris sur le relevé fiscal annuel qu’établissent la plupart des banques.
De ce montant, peuvent encore être déduits 800 euros (maximum) sur le montant des dividendes bruts perçus (et 980 euros maximum sur les intérêts perçus sur un compte épargne - sous certaines conditions au code 1151-13).
Exemple : en 2020, j’ai perçu sur mon compte français 1 000 euros de dividendes "nets frontières". Je déclare au code 1444 : 1 000 - 800 = 200 euros. Attention, ces exonérations ne peuvent être appliquées qu’une fois pour l’ensemble de vos revenus perçus en 2020 en Belgique et à l’étranger. Ainsi, si vous avez déjà demandé l’application de ces exonérations sur vos revenus perçus en Belgique (code 1437-18), elles ne peuvent être appliquées une seconde fois.
Quid des dividendes et intérêts de source française ? Pour rappel, par un arrêt rendu en 2017, la Cour de cassation a confirmé que les contribuables belges qui perçoivent des revenus mobiliers de source française ont droit à un crédit d’impôt de 15 % (QFIE, soit la quotité forfaitaire d’impôt étranger) sur le montant net et ce, conformément à ce que prévoit la Convention préventive de double imposition (CPDI) conclue entre la France et la Belgique. Le fisc refusait toutefois de se plier à cette jurisprudence. Condamné à nouveau par la Cour suprême en 2020, il a publié ce 28 mai une rubrique FAQ sur le site du SPF Finances par laquelle il reconnaît se conformer désormais à cette jurisprudence, à tout le moins pour les revenus mentionnés dans la déclaration fiscale.
Concrètement, qu’est-ce que cela implique ?
1. Pour les revenus perçus sur un compte ouvert en Belgique, dont la banque a donc prélevé le précompte mobilier, il convient de les mentionner au code 1160-04. Bien que ce précompte soit libératoire et la déclaration non obligatoire, il faut mentionner le montant net après retenue du précompte mobilier belge pour solliciter l’application de la QFIE. Ce montant est en principe repris sur vos extraits bancaires 2020.
2. Pour les revenus perçus sur un compte à l’étranger, ceux-ci doivent être déclarés au code 1444.
Pour bénéficier de la QFIE, il faudra déclarer ces revenus aux codes susvisés et compléter la rubrique F du cadre VII, en mentionnant le pays concerné (France), le code auquel se rapportent les montants déclarés (1160 ou 1444), le montant en vis-à-vis du code précité et enfin la nature du revenu (dividendes ou intérêts ou les deux). Afin d’éviter un contrôle, il est utile (mais pas obligatoire) de joindre une annexe à sa déclaration contenant les calculs effectués, les pièces sous-jacentes (les extraits bancaires/relevés fiscaux) et la nature de l’exonération demandée (application de la QFIE de 15 %).
La FAQ précise que cette position ne s’applique pas aux revenus trouvant leur source dans un autre État que la France sauf si une CPDI prévoit l’application d’une QFIE en des termes "rigoureusement semblables".
Déclaration de l’existence des placements (cadre XIII)
Au code 1075-89 : si vous, votre conjoint/cohabitant légal ou votre enfant mineur non émancipé êtes titulaire d’un compte ouvert à l’étranger, il convient d’indiquer les nom et prénom du titulaire, mais aussi le pays où est établi l’établissement à l’étranger. Si vous êtes gestionnaire pour une association qui ne recueille pas de bénéfices ou profits ou qui n’est pas assujettie à l’impôt des sociétés ou des personnes morales, vous devez également déclarer le compte étranger de celle-ci. Si vous avez communiqué les données relatives à ce compte auprès du point de contact central de la Banque nationale de Belgique (n’oubliez pas de le faire si ce n’est déjà fait, c’est obligatoire), cochez la case "oui" en vis-à-vis du code 1075.
Au code 1076-88 : la même obligation existe pour les contrats d’assurance-vie souscrits auprès d’une compagnie d’assurance établie à l’étranger. Il convient d’indiquer les nom et prénom du preneur d’assurance, le pays où est établie la compagnie à l’étranger et enfin de cocher la case en vis-à-vis du code 1076.
Au code 1077-87 : les "constructions juridiques" dont le contribuable, son conjoint/cohabitant légal, ou un enfant mineur non émancipé est "fondateur" au sens de la loi doivent être mentionnées. Il s’agit des trusts et fiducies et des fondations, associations et sociétés non soumises à l’impôt ou ayant subi, en 2020, un impôt inférieur à 15 % de ce qu’aurait été leur base imposable s’ils avaient été belges. Un contrat d’assurance peut également être visé mais seulement si vous y avez logé une autre construction juridique volontairement.
Les entités disposant de la personnalité juridique qui sont situées dans l’Espace économique européen (EEE) ne sont pas visées sauf si elles n’ont pas subi un impôt égal à au moins 1 % de ce qu’aurait été leur base imposable si elles étaient situées en Belgique. Les organismes de placement collectifs (OPC) dits "privés" seront en revanche visés, de même que les entités hybrides considérées comme "opaques" en Belgique et "transparentes" selon le droit fiscal de l’État dans lequel elles sont établies. Pour les entités hors EEE, aucune exception de principe, mais une liste de cas et formes juridiques présumés visés existe.
Une loi du 20 décembre 2020 a, encore, ajouté une nouvelle présomption : sont désormais présumées être des constructions juridiques les entités dotées de la personnalité juridique situées dans un État figurant sur la liste de l’Union européenne des juridictions non coopératives (la liste du 22 février 2021 comprend notamment la Dominique (nouveau), les Fidji, le Panama, Trinité-et-Tobago, les Îles Vierges américaines, les Seychelles, etc.).
Par ailleurs, si vous êtes fondateur d’un trust situé dans un État avec lequel la Belgique a conclu une CPDI qui vise les trusts (Royaume-Uni, États-Unis, Canada, notamment), les distributions dont vous avez bénéficié pourraient être exonérées. En effet, la Cour constitutionnelle a annulé, sous certaines conditions, la disposition qui qualifiait de dividendes les distributions effectuées par des trusts soumis à l’impôt dans leur État d’établissement. Cela étant, il faut être conscient que la taxe Caïman est difficile à appréhender.
Et la nouvelle taxe sur les comptes-titres ?
Il n’est plus requis de mentionner l’existence de plusieurs comptes-titres au cadre XIII (le code anciennement prévu a disparu). Cette information permettait au fisc de vérifier la correcte application de l’ancienne taxe sur les comptes-titres. Ceci est devenu inutile dès lors que la nouvelle taxe d’abonnement de 0,15 % s’applique à chaque compte-titres dont la valeur moyenne au cours de la période de référence excède 1 million d’euros, sans considération de la fortune globale du contribuable logée sur des comptes-titres.
Quels sont les renseignements dont dispose le fisc ?
La fiche CRS européenne de collecte d’informations financières ou FATCA pour les États-Unis, disponible sous l’onglet Mes documents sur la plateforme Myminfin.be, reprend bon nombre d’informations sur votre patrimoine à l’étranger. Sa consultation préalable permettra de prévenir d’éventuels oublis.
Le CRS est un système d’échange automatique de renseignements financiers. Il comprend les revenus bruts, les produits de vente, ainsi que l’état, au 31 décembre, des comptes et contrats financiers détenus par les résidents d’un État membre dans un autre État. De très nombreux États, y compris des "paradis fiscaux" y participent.
Attention : les montants des dividendes et intérêts repris sur ces fiches sont généralement plus élevés que les montants repris dans le reporting fiscal établi par la banque étrangère. Ceci est normal. Elles reprennent des montants de revenus bruts et ne font pas de distinction entre les revenus de source étrangère et les revenus belges qui ont déjà subi leur régime fiscal en Belgique par le biais d’un précompte mobilier libératoire.
Les contrôles fiscaux relatifs au patrimoine mobilier ou immobilier à l’étranger étant nombreux, un conseil : être vigilant et rigoureux.