La Vivaldi va-t-elle taxer plus lourdement les chômeurs ?
Un projet de loi pourrait aboutir à une hausse de l’imposition de certains chômeurs de 1 900 euros.
Publié le 22-02-2022 à 08h00
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Le projet de loi "portant des dispositions fiscales diverses et de lutte contre la fraude fiscale" pourrait faire parler de lui dans les jours qui viennent. Le texte sera examiné ce mercredi, à l'occasion d'une deuxième lecture en commission des Finances de la Chambre. Si le projet était adopté en l'état, certains chômeurs pourraient voir leurs allocations taxées plus lourdement.
Le chapitre 3 du projet de loi prévoit "une modification des réductions d'impôt pour allocations de chômage". Actuellement, les allocations de chômage sont exonérées d'impôts jusqu'à 20 221,96 euros de revenus annuels imposables (exercice d'imposition 2021). En revanche, les pensions et autres allocations de remplacement ne sont exonérées d'impôts que jusqu'à un montant annuel imposable de 16 170 euros.
Or, le projet de loi en discussion vise notamment à accorder le même montant exonéré d’impôts à tous les bénéficiaires d’allocations de remplacement : chômeurs, malades, pensionnés… Le changement proposé s’appliquerait à partir de l’exercice d’imposition 2023, soit sur les allocations perçues en 2022.
Du côté de l’opposition, le député Marco Van Hees (PTB) a repéré cette modification et ses implications potentielles. Ainsi, l’exonération d’impôts dont bénéficie un chômeur s’appliquerait sur un montant maximal de 16 170 euros (au lieu de 20 221 euros), ce qui aboutirait à une taxation supplémentaire de l’ordre de 1978 euros.
Silence radio chez Van Peteghem
Au cours du débat parlementaire, le député PTB a essayé d’avoir plus d’informations de la part du ministre des Finances, Vincent Van Peteghem (CD&V), sur les implications de ce changement.
"Il n'a pas répondu à la question, nous explique Marco Van Hees. Il s'est borné à formuler des généralités, comme le fait que la disposition avait un coût budgétaire de 9 millions d'euros. Cela indique, selon lui, qu'elle est censée profiter aux allocataires. Mais un coût budgétaire peut être la somme d'impacts positifs pour certains et d'impacts négatifs pour d'autres. Vincent Van Peteghem a ajouté que les allocations de chômage ne devaient pas être moins taxées que les revenus d'actifs, ce qui pourrait être un aveu de reconnaissance d'un problème".
Contacté dès mardi passé, le cabinet Van Peteghem n’a pas pu répondre à cette question simple : certains chômeurs vont-ils être pénalisés par la réforme ? Relancée hier, la porte-parole du ministre des Finances a indiqué que ce dernier répondrait à cette question à la Chambre. On devrait en savoir plus mercredi.
De son côté, Marco Van Hees espère recevoir des réponses plus précises. "Un ministre refusant de donner des réponses sur son propre projet de loi, c'est inquiétant, déclare-t-il. Il lui reste la seconde lecture du projet de loi pour changer d'attitude".
Nous avons également soumis le projet de loi à Eric Carlier, avocat chez Tetra Law. "Je vois donc dans ce texte une intention de mettre fin à une forme de discrimination qui existe entre les différents allocataires sociaux, déclare-t-il. Les chômeurs, qui avaient un régime plus favorable, et les autres allocataires : pensionnés, bénéficiaires d'allocations de mutuelle… Il en résulte qu'un impôt est à présent dû en certaines circonstances par les chômeurs, comme pour les pensionnés et les bénéficiaires de la mutuelle".
Les chômeurs pourront aussi travailler
Par ailleurs, ce projet de loi ne vise pas seulement à aligner le régime de taxation des chômeurs sur celui des autres allocataires sociaux. Il vise également à octroyer aux chômeurs certains avantages dont bénéficient déjà les autres allocataires sociaux.
Ainsi, depuis 2020, un pensionné ne perd pas automatiquement le bénéfice de sa réduction complémentaire d’impôt s’il perçoit un revenu d’appoint. Il s’agissait là d’un piège à l’emploi bien connu: le titulaire d’une petite pension perdait un avantage fiscal à partir d’un euro de revenu du travail. Cette réforme a également empêché qu’un pensionné soit presque entièrement taxé sur la partie de sa pension qui dépasse la limite de 16 290 euros (exercice 2022).
Le projet de loi porté par Vincent Van Peteghem vise à faire bénéficier les chômeurs de ces avancées. Ainsi, ils pourraient aussi travailler sans perdre automatiquement le bénéfice de leur réduction d’impôt.