Bouclage en Italie, pétrole au plancher : les marchés financiers trébuchent lourdement
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Publié le 09-03-2020 à 18h36 - Mis à jour le 09-03-2020 à 23h47
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L’annonce du lockdown en Italie dimanche, après celle d’un blocage dans les négociations entre les pays producteurs de pétrole, a été la goutte qui a fait déborder le vase, du point de vue des gestionnaires financiers. On s’attendait donc à un début de semaine sous haute tension. Mais la chute de 30 % du prix du baril de pétrole brut aux premières heures de la journée a été clairement un accélérateur de celle des marchés d’actions. On a en effet enregistré dès les premiers échanges à des chutes de 4 à 14 % des indices boursiers, avec un creux de 10 % à la Bourse de Milan. Très vite, on voit que les places américaines vont suivre, quelques heures plus tard, alors que les “futures” sur indices montrent une probable ouverture de Wall Street sur une baisse de 5 %. Cette fois, ça y est : les investisseurs paniquent. Ils vendent tout, indistinctement, même l’or, valeur refuge traditionnelle, a stoppé sa progression à 1 663 dollars l’once. Les vendeurs liquident, restent en cash, en préférant l’euro et le yen, en progression respective de 1,12 % à 1,1414 dollar et de 1,63 % à 0,8550 dollar. Les liquidités vont aussi vers les obligations d’État les plus sûres, dont les obligations belges. Chez nous l’OLO (obligation linéaire) à 10 ans grimpe encore, et son rendement descend à -0,33 %. Celui des obligations allemandes, est à -0,83 %. Et aux États-Unis, c’est pareil, le rendement des Treasury bonds à 10 ans est à son plus bas historique, à 0,48 %. Les investisseurs cherchent la sécurité à tout prix. Depuis le début de la prise de conscience des effets de la crise sanitaire, les pertes dépassent les 20 %.
Le brut qui plonge, c’est un stress supplémentaire
Sur le front des matières premières, on allège aussi tous azimuts, même si au fil de la journée, le baril de brut américain (WTI) ne perd plus “que” 18 % à 34 dollars. Peut-on dire que l’Arabie Saoudite est responsable de la chute dramatique des places boursières lundi dans le monde ? Pour Peter Vanden Houte, Chief Economist chez ING Belgique, “le fait de laisser filer les prix du brut crée en tout cas un stress supplémentaire, et un nouveau foyer de risque puisque les pays producteurs risquent de se trouver en difficulté. Même aux États-Unis, où les producteurs de pétrole de schiste sont très endettés, et ont un coût de production de l’ordre de 45 dollars le baril, bien au-dessus des prix du marché. Le stress est ici visible sur les obligations émises par ces producteurs, et ce stress aussi est contagieux. Il pourrait conduire à des tensions sur le financement des entreprises”. Dans le courant de l’après-midi, les marchés du continent américain confirment la vision de l’économiste belge. New York ouvre en baisse de plus de 5 % et les marchés sud-américains abandonnent près de 10 %, activant des procédures de suspension temporaire des cotations. Les Bourses des pays du Golfe ont lourdement chuté quelques heures auparavant. En fin de journée, l’indice Bel 20 de la Bourse de Bruxelles accélère sa chute et abandonne 7,58%, sa deuxième plus forte chute historique. Francfort cède 7,40% et Paris, 8,40%. Du jamais vu depuis 2008.

Après avoir acheté la croissance à venir, on vend le ralentissement
Les opérateurs exagèrent sans doute, mais ils sont confrontés à la réalité économique en Europe. “En effet, après avoir considéré que l’épidémie était un problème concernant les Chinois, ils se rendent compte que l’Europe est confrontée au même problème. Et ils voient au travers de l’exemple italien qui risque de reproduire en France et en Allemagne, que les solutions à mettre en œuvre vont se payer en points de croissance. Imaginez qu’en Italie, le seul secteur du tourisme représente 13% du PIB (produit intérieur brut)”. Comment expliquer l’intensité des ventes en Bourse? Pour Peter Vanden Houte, il y a également une conjugaison de facteurs. “La hausse observée en fin 2019 était largement corrélée aux anticipations d’une reprise en 2020, et à un accroissement des bénéfices des entreprises. Maintenant, on se rend compte que non seulement cette croissance est hypothéquée pour le premier trimestre, mais sans doute aussi pour l’ensemble de 2020. Fin 2019, les opérateurs achetaient des actions pour anticiper, et par défaut d’alternative, aujourd’hui, ils vendent, mais il n’y pas d’alternative”. Quid d’un redressement des marchés? “Si l’on considère que la situation en Chine se reproduit ici, on peut imaginer une stabilisation de l’épidémie à la mars, et un redressement dans la foulée”.
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