"Les banques d’affaires n'ont jamais abandonné les travers de 2008"
Entretien avec Christophe Nijdam, délégué Général de l’Association Française des Investisseurs Institutionnels (Af2i) dont les membres détiennent plus de 3.000 milliards d'euros d’actifs investis à long terme.
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- Publié le 21-04-2021 à 08h01
- Mis à jour le 22-04-2021 à 17h57
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Avec les déboires du hedge fund Archegos (et éventuellement la faillite de Greensill), le secteur des banques d’affaires est-il en train de retomber dans les travers de 2008 ?
Je ne pense pas que les banques d’affaires soient retombées dans les travers de 2008. Je pense plutôt qu’elles n’ont jamais abandonné ces travers, à en croire les encours notionnels des produits dérivés et les bonus versés dans le cadre de ces activités qui restent à des niveaux pousse-au-crime.
Y a-t-il un problème de régulation, en particulier des hedge funds ?
Malgré une régulation foisonnante après la grande crise financière démarrée en 2007, il reste manifestement des trous dans la raquette au niveau des institutions régulées et des produits financiers régulés. Ainsi, dans le cas d’Archegos, le fait que cet ancien hedge fund se soit transformé en family office lui a permis de sortir des radars de la supervision financière alors que la dangerosité de ses pratiques spéculatives augmentait grâce à l’effet de levier procuré par des produits dérivés. Si Warren Buffett, l’investisseur américain légendaire, a qualifié les produits dérivés comme étant des “armes de destruction massive”, c’est bien à cause de cet effet de levier dévastateur quand le pari s’avère perdant.
Ces deux “accidents” vous inquiètent-ils ? Y a-t-il un risque systémique ?
Ce qui inquiète, c’est que la politique monétaire des banques centrales qui a engendré des taux d’intérêt proches de zéro, quand ils ne sont pas carrément négatifs, pousse certains acteurs des marchés financiers à prendre de plus en plus de risques, mal rémunérés, pour trouver du rendement. Les sorties de route deviennent alors inévitables. Quant au risque systémique, il s’enracine dans ce contexte endémique. N’oublions pas que la liste des banques systémiques établie chaque année par le Conseil de Stabilité Financière ne désemplit pas depuis qu’elle a été instaurée pour la première fois en 2011 : il y en a 30 à l’échelle mondiale, dont 13 pour le seul continent européen.