La Fed s’apprête à durcir le ton, et alors ?
Revue Boursière. La politique des taux zéro arrive doucement à son terme. Et ça fait peur.
Publié le 20-08-2021 à 20h06
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Après une dizaine de séances positives marquées par des niveaux record inscrits par les indicateurs de tendance boursiers, il fallait bien que se profilent les prises de bénéfices. C’est la norme. Mais pour déclencher le mouvement, il faut généralement que les opérateurs s’appuient sur une mauvaise nouvelle. Et cette semaine, pour balayer les bénéfices de cette vague d’enthousiasme, les vendeurs n’ont eu que l’embarras du choix. Lundi, déjà, la Chine a fait état d’un ralentissement de la croissance des ventes de détail en juillet (à +8,50 % sur un an quand même !). De là à assimiler cet élément à un signe de ralentissement économique local, puis global, il n’y avait qu’un pas, rapidement franchi.
Le luxe sous pression
Cette analyse, pour superficielle qu'elle soit, a pesé très lourd sur une série de secteurs en forme ces derniers mois : les matières premières (-9 %) en tête, l'automobile (-8 %), la distribution ou les banques. L'automobile a aussi peiné sur l'annonce d'une réduction de la production de Toyota en septembre, pour cause de pénurie de semi-conducteurs. Mais surtout, la baisse d'appétit de consommation des Chinois a mis en évidence les valorisations sans doute excessives des géants mondiaux du luxe, très présents notamment, en Bourse de Paris. Sur la semaine, les actions du groupe Kering (Gucci, Yves Saint Laurent,…) ont pratiquement abandonné 18 %, LVMH reculant de 13 %. Ailleurs, Moncler a cédé 13 % également, comme Burberry, Richemont ou encore Swatch Group. Mais en vérité, hormis les secteurs les plus défensifs comme les utilities (services aux collectivités) ou les sciences de la vie, tous les segments des portefeuilles ont été écornés sur la semaine écoulée. Pour ne rien arranger, les autorités chinoises ont tenu à rappeler aux géants locaux de l'économie des réseaux les règles de base de la redistribution des richesses.

Par ailleurs, comme si les ombres chinoises ne suffisaient pas à peser sur le moral des gestionnaires, des nouvelles inquiétantes ont été diffusées aux États-Unis, cachées dans les minutes de la dernière réunion de politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed). Certains des membres de la Fed, sur la base de l'évolution positive des chiffres de l'emploi, ont évoqué la fin du processus d'acquisition d'actifs obligataires à hauteur de 120 milliards de dollars par mois. Même s'il est clair que ce ralentissement de ces interventions de marché, appelé tapering, se fera un jour ou l'autre, cela aura lieu de manière très progressive. La diffusion même des avis de certains gouverneurs présents au sein du Comité monétaire de la Fed, ferait d'ailleurs partie de l'offensive psychologique destinée à préparer le monde financier au tapering. Les observateurs s'attendent à ce que Jerome Powell, le patron de la Fed, lève le voile sur le calendrier du tapering lors du sommet des banquiers centraux de Jackson Hole (Wyoming), dans quelques jours. Le tapering se traduira en pratique par une remontée progressive des taux d'intérêt à long terme. Mais à cet égard, les craintes qui ont conduit à la correction des places boursières cette semaine, ont aussi redirigé des capitaux vers la sécurité du marché obligataire, ce qui a pesé sur les rendements…
Emakina change de mains
À la Bourse de Bruxelles, l'événement un peu inattendu qui a fait émerger une valeur cotée est certainement l'annonce d'une offre publique d'achat (OPA) sur les actions de l'agence belge de publicité numérique Emakina. L'acheteur de l'entreprise cotée de manière épisodique sur Alternext est le groupe informatique d'origine Biélorusse EPAM Systems, coté à New York. Pour EPAM, qui pèse 35 milliards de dollars de capitalisation boursière, cette opération d'une grosse centaine de millions d'euros est une petite affaire. Mais pour les actionnaires de longue date, c'est une excellente opération. Ceux qui ont acheté les actions lors de l'introduction en Bourse de 2006 à 8,55 euros, auront au final bénéficié d'un return annuel de 8,50 %. L'opération a reçu l'aval du management d'Emakina, dont son fondateur Brice Le Blévennec, qui collabora en son temps aux pages technos de La Libre, lorsque beaucoup parlaient d'Internet sans savoir de quoi il s'agissait…