Un "Point Chivo", pour échanger bitcoins et dollars, est incendié au Salvador
Des milliers de Salvadoriens ont manifesté en plusieurs cortèges dans la capitale, pour demander au président Bukele le respect de la séparation des pouvoirs et exprimer leur rejet de l'instauration du bitcoin comme monnaie légale.
Publié le 16-09-2021 à 09h10
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Un des 200 "Point Chivo" installés par le gouvernement salvadorien pour pouvoir échanger bitcoins et dollars, désormais les deux monnaies légales du pays, a été incendié mercredi par des manifestants criant leur opposition au gouvernement du président Nayib Bukele.
Des milliers de Salvadoriens ont manifesté en plusieurs cortèges dans la capitale, pour demander au président Bukele le respect de la séparation des pouvoirs et exprimer leur rejet de l'instauration du bitcoin comme monnaie légale.
La manifestation, coïncidant avec les festivités pour le bicentenaire de l'indépendance, s'est déroulée dans le calme, avant de s'achever par l'incendie volontaire d'une borne bitcoin, baptisée "Point Chivo", dans le centre historique de San Salvador.
Sur la borne, des manifestants avaient inscrit : "Non au +Chivo+ de Bukele" (le mot chivo a le sens de "Super" en langage familier, retenu par le gouvernement pour l'application permettant d'opérer en bitcoin, mais également de "bouc").
"Nous allons de manière accélérée vers l'autoritarisme, vers la dictature", a dénoncé auprès de l'AFP le juge Esli Carrillo, 48 ans, qui manifestait avec des collègues et des employés du secteur judiciaire.
"La République est en danger"
Les juges s'opposent à une loi approuvée le 31 août par le Parlement, dominé par les partisans du chef de l'Etat, qui prévoit la mise à la retraite d'office des magistrats à 60 ans ou après 30 années de service, ce qui suppose le départ d'un tiers des juges actuellement en fonction.
Les manifestants réclamaient également le "respect de la Constitution" après une récente décision de la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême ouvrant la voie à une candidature de M. Bukele pour un deuxième mandat. Jusqu'à présent, le consensus était que la Constitution salvadorienne interdit la réélection d'un chef de l'Etat pour un deuxième mandat consécutif.
Les juges constitutionnels ayant rendu cet arrêt avaient été nommés par le Parlement au premier jour de son entrée en fonction, après qu'il eut destitué leurs prédécesseurs jugés hostiles au gouvernement de M. Bukele.
"La République est en danger, c'est pourquoi nous demandons le respect de la séparation des pouvoirs et ne sommes pas d'accord avec (la possibilité) de réélection du président", a expliqué Zaira Navas, représentante d'une ONG de défense des droits humains.
Un cortège réunissait des paysans, des ouvriers et des militants d'organisation syndicales et professionnelles opposés au bitcoin comme monnaie légale. Le bitcoin "n'est pas bon pour nous, (sa valeur) est très volatile", a dénoncé Natalia Belloso, 41 ans.
Le Salvador est devenu le 7 septembre le premier pays au monde à faire du bitcoin une monnaie légale, à côté du dollar, qui a remplacé la monnaie nationale, le colon, il y a 20 ans.