Pour investir dans les fonds durables, l'éducation financière est primordiale

Dans un placement socialement responsable ou ESG, c’est à l’investisseur qu’incombe le choix final.

I. de L.
La question à se poser alors est de savoir ce que l’on finance et quel sera l’impact de ce financement sur l’environnement, le social ou la gouvernance des entreprises.
La question à se poser alors est de savoir ce que l’on finance et quel sera l’impact de ce financement sur l’environnement, le social ou la gouvernance des entreprises. ©Shutterstock

À partir du mois d'août 2022, les nouveaux clients en gestion discrétionnaire seront soumis à un questionnaire relatif à leurs préférences en matière de durabilité. Pour les clients existants, ce questionnaire leur sera également soumis lors de la révision de leur profil MiFID. Par cette obligation, il s'agira d'aligner les préférences des investisseurs en matière de durabilité au contenu de leur portefeuille en gestion. "Dans ce cadre, MiFID deviendra l'outil de promotion des fonds durables. C'est une responsabilité qui repose aussi sur les épaules des distributeurs de ces fonds", prévient Roger Depasse, Head of Belgium Distribution chez Nordea AM. Cela signifie donc que, lorsqu'un nouveau client se présentera pour une offre en gestion, il devra compléter deux types de questionnaires : un questionnaire MiFID classique et un questionnaire sur ses préférences en durabilité.

Le banquier privé devra alors combiner les deux types de profils dans la construction du portefeuille de son client. "Selon les préférences des clients, on pourra inclure dans leurs portefeuilles des fonds article 8 ou article 9. Mais si les clients sont très sélectifs en matière de durabilité, on pourrait être amené à ne pouvoir leur offrir que des fonds article 9. Dans ce cas, l'offre est plus limitée et le risque sera de se retrouver avec une majorité de fonds thématiques dans le portefeuille", souligne Ophélie Mortier, Chief Sustainable Officer chez DPAM.

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Diversification

La question de la diversification du portefeuille est alors posée. L'investisseur doit donc se préparer à ce genre de questions. "Des questions assez précises seront posées à l'investisseur. Mais il faut que lui-même se pose aussi les bonnes questions sur ses attentes et, surtout, qu'il ose poser des questions à son banquier privé sur la stratégie suivie dans un fonds, sur le contenu de ce fonds, sur la politique d'engagement et de vote de la maison de gestion dans les assemblées générales des sociétés en portefeuille...", relève Nicolas Crochet, fondateur et CEO de Funds for Good.

La question à se poser alors est de savoir ce que l'on finance et quel sera l'impact de ce financement sur l'environnement, le social ou la gouvernance des entreprises. Quel changement mon investissement va-t-il induire dans la société ou l'environnement ? "Il est effectivement important que l'investisseur sache exactement ce qu'il veut. Il doit aussi se poser des questions sur ses connaissances en matière de durabilité. Il est important qu'il soit aussi à l'aise avec certaines pratiques de gestion. Veut-il exclure des sociétés en portefeuille ? Ou préfère-t-il la politique du Best in Class ? C'est donc important de se préparer à ce genre d'entretien", estime Romain Avice, Gérant ISR chez DNCA Investments.

Education financière

L’importance de l’éducation financière est ici à nouveau mise en exergue. Les questionnaires qu’ils soient MiFID ou de durabilité ne doivent pas se concevoir comme des examens à passer devant son banquier. Ce sont des outils qui permettent d’aligner les préférences, objectifs, aversion au risque des investisseurs aux choix effectués dans les portefeuilles.

Par ailleurs, une fois la réflexion engagée sur son propre profil d'investisseurs, la question se pose de savoir s'il faut exclure d'office certains secteurs des fonds durables. Les investisseurs se demandent notamment s'il faut absolument exclure certaines sociétés comme les valeurs pétrolières. "Il faut être conscients que si l'on exclut un grand nombre de secteurs controversés, on risque de se retrouver dans une situation comparable à la COP à laquelle ne participent pas certains grands pays", note Romain Avice. Le fait de détenir des actions d'une société en portefeuille donne, en effet, un droit de vote et une possibilité d'engagement actionnarial au gérant d'un fonds.

Il ne disposera pas de ce droit et ne pourra donc pas infléchir la politique d'une société s'il ne la détient pas en portefeuille. Mais exclusion ou pas, le gérant a un devoir de transparence vis-à-vis des investisseurs. "Il faut que le gérant soit clair sur sa politique d'exclusion. Il faut aussi être conscient que l'engagement a ses limites. Cela demande beaucoup de temps et d'investissement de la part du gérant. À un moment donné, il faut pouvoir brandir la menace de l'exclusion si l'entreprise va trop loin", estime Ophélie Mortier. Il faut aussi être conscient que si l'on exclut des sociétés des fonds ISR, il y aura toujours quelqu'un pour financer ces entreprises controversées. Ne pas investir dans une entreprise controversée peut parfois être contre-productif. Il vaut mieux engager alors un dialogue avec la société. Ce dialogue devrait, idéalement, être collégial entre plusieurs maisons de gestion pour être vraiment efficace.

Pour investir dans les fonds durables, l'éducation financière est primordiale
©D.R.
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