La Banque centrale européenne s’aligne sur la Réserve fédérale américaine pour faire face à l'inflation
Le scénario attendu par les opérateurs a été respecté par la BCE : la hausse du taux directeur est limitée à 50 points de base.
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Publié le 15-12-2022 à 17h09 - Mis à jour le 15-12-2022 à 17h13
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Le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé jeudi en début d’après-midi une décision attendue correspondant aux attentes des opérateurs financiers. La BCE s’est en effet alignée sur la Réserve fédérale américaine et a prévu de remonter de 50 points de base (0,50 %) ses principaux taux directeurs dans le cadre du processus destiné à ralentir le crédit et les investissements, pour peser sur la demande et, par conséquent sur les prix.
L’idée ? Contrer l’inflation qui bouleverse les économies de la zone euro depuis maintenant près d’un an. Une stratégie qui donnerait les premiers signes de résultats mesurables, puisque, l’affirme la BCE, “selon l’estimation rapide d’Eurostat, l’inflation a atteint 10,0 % en novembre, légèrement en deçà des 10,6 % enregistrés en octobre”. Mais à y regarder de plus près, il est encore un peu tôt pour voir dans cette évolution le résultat de la seule politique monétaire de la BCE. En effet, dans son communiqué dont chaque mot a dû être pesé et décortiqué par les experts de la BCE, le Conseil des gouverneurs note que le recul observé est essentiellement attribuable à une pause dans la hausse des prix de l’énergie, mais que ceux des produits alimentaires sont encore agités pour quelque temps encore.
Lent retour vers la normale
Mais ces prévisions ne relèvent pas de la science exacte. Et les experts de la BCE, tout comme ceux de la Réserve fédérale américaine la veille, ont au passage revu là la hausse leurs prévisions relatives à l’évolution de l’inflation en zone euro. Selon ces derniers, “l’inflation moyenne devrait désormais atteindre 8,4 % en 2022 avant de revenir à 6,3 % en 2023, tandis que l’inflation devrait ralentir nettement au cours de l’année. L’inflation s’établirait donc, en moyenne, à 3,4 % en 2024 et 2,3 % en 2025”.
Encore une fois, une partie de l’inconnue est imputable aux variations des prix de l’énergie et ceux de l’alimentation (qui sont liés, bien entendu, en raison des processus de transformation, d’emballage ou des transports). Sans ces facteurs, le cœur de l’inflation devrait être “de 3,9 % en moyenne en 2022 et atteindre 4,2 % en 2023, avant de retomber à 2,8 % en 2024 et 2,4 % en 2025”. Les analystes de la BCE voient aussi l’économie de la zone euro se contracter au cours du trimestre actuel et du suivant, en raison de la hausse des taux, de la crise des prix de l’énergie, du ralentissement économique mondial et… du contexte d’incertitude généré par le conflit en Ukraine. Ici, les estimations des services de l’Eurosystème voient une croissance économique de 3,4 % en 2022, 0,5 % en 2023, 1,9 % en 2024 et 1,8 % en 2025.
Un mouvement international
La BCE n’a pas été le seul institut d’émission à suivre le mouvement imprimé par la Fed, puisque ce jeudi, la Banque d’Angleterre (BoE) a également remonté son taux directeur de 0,50 % à 3,50 %. La Banque de Norvège a porté le sien à 2,75 % en hausse de 0,25 % et la Banque de Suisse a augmenté de 50 points de base son taux directeur à 1 %.
Pour ce qui nous concerne, dès le 21 décembre, les taux d’intérêt des opérations principales de refinancement, de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt seront relevés à 2,50 %, 2,75 % et 2,00 %. Enfin, le Conseil des gouverneurs a aussi évoqué le futur des portefeuilles d’actifs obligataires dont la réduction devrait commencer en mars prochain, à coup de 15 milliards d’euros par mois en moyenne. Pour éponger quelque 3 300 milliards d’euros d’obligations détenues… Ceci aura bien sûr un effet non négligeable sur les taux à long terme.
Des marchés décontenancés
Ni la hausse d’un demi-pour-cent annoncée par la Fed la veille, ni celle, identique, de la BCE n’ont réveillé l’appétit des investisseurs. De leur point de vue, ces décisions étaient pratiquement gravées dans le marbre, et largement anticipées dans les cours des actions comme des obligations. Ils se sont donc attachés à décortiquer les perspectives économiques dévoilées par les experts des grandes banques centrales. Et là, force leur a été de constater que le principe d’une récession se dessine de plus en plus précisément. Et qui dit récession dit aussi impact sur les résultats des entreprises, sur le niveau de l’emploi et sur la consommation. Pas de quoi émoustiller un amateur d’actions…
À New York comme en Europe, les indicateurs de tendance qui avaient déjà fléchi mercredi, ont repris leur correction et accéléré le rythme de leur baisse. En fin de journée, l’indice Eurostoxx 50 affichait un repli proche de 3 %, et à New York, le Dow Jones et le Nasdaq cédaient plus de 2 %. Pour les investisseurs, la réduction des bilans des grandes banques centrales s’assortit d’une pression accrue sur les portefeuilles.