Sexes et business peuvent faire bon ménage
Les entreprises devront compter 40 % de femmes aux postes de décision. Un fardeau pour les entreprises ? Ou l’occasion d’être plus performantes ?
- Publié le 15-11-2012 à 04h15
- Mis à jour le 15-11-2012 à 07h15
Où sont les femmes ? Elles ne représentent actuellement que 13,7 % des administrateurs de grandes entreprises européennes, selon les chiffres de la Commission européenne. La Belgique peut rougir de ses 10,7 % de présence féminine, mais se rattrape en faisant partie des 11 pays "modèles" qui ont adopté une loi en faveur de l’égalité des sexes au sein des conseils d’administration.
Ce bond en avant vers un meilleur équilibre hommes-femmes, l’exécutif européen veut l’étendre à tous les pays de l’Union européenne (UE) et propose une directive pour porter à 40 % la proportion du "sexe sous-représenté" aux postes d’administrateurs non exécutifs dans les grandes entreprises cotées en Bourse. La faible représentation des femmes dans les grandes entreprises d’Europe est "une perte de talents quand on pense que 60 % des diplômés universitaires sont des femmes aujourd’hui", a déclaré mercredi la commissaire européenne en charge des Droits fondamentaux et de la Justice, Viviane Reding.
Si Olli Rehn, en charge des Affaires économiques, accompagnait la Luxembourgeoise pour proposer cette nouvelle législation, c’était bien sûr pour le symbole. Mais aussi pour souligner que "c’est une bonne chose d’avoir des femmes aux postes clés dans les entreprises". "Les talents féminins peuvent améliorer la performance des entreprises", comme le stipule un certain nombre d’études dans différents pays, a soutenu Viviane Reding. "Cette directive est importante pour notre compétitivité", a-t-elle ajouté.
Les entreprises européennes de plus de 250 personnes et cotées en Bourse devront atteindre le quota de 40 % de femmes pour tous les postes d’administrateurs non exécutifs, d’ici 2020. Et dès 2018 pour les conseils d’administration d’entreprises publiques, "qui doivent montrer l’exemple".
La proposition de directive ne contient aucun chiffre contraignant pour les postes d’administrateurs exécutifs. Les entreprises devront se fixer elles-mêmes un objectif, et faire rapport, chaque année, des progrès accomplis, ou non réalisés.
Les entreprises qui n’atteignent pas le seuil de 40 % devront privilégier l’engagement d’une femme, qualifiée. "Personne n’obtiendra un emploi juste parce qu’elle est une femme. Mais aucune femme ne se verra refuser un emploi en raison de son sexe non plus. Le travail ira toujours au meilleur candidat", a précisé Viviane Reding. Et le poste ira à un homme, si c’est le genre masculin qui est sous-représenté.
Quant aux sanctions contre les entreprises qui enfreindraient la directive, ce sont les Etats membres qui auront le loisir de les choisir. La Commission européenne veillera à ce que ces sanctions soient appropriées et dissuasives.
Viviane Reding a également assuré que la Commission européenne, qui n’est pourtant pas cotée en Bourse, ni ne dispose d’un conseil d’administration, devra "donner l’exemple" dans la gestion de son entreprise. "Pour les postes à responsabilité, nous comptons environ 25 % de femmes, et nous allons passer à 27 % en 2014", a affirmé la commissaire, chiffres à l’appui. "Dans les institutions européennes, la situation n’est pas parfaite, mais elle est quand même bonne, et nous comptons l’améliorer", a-t-elle insisté.
Cette proposition est aussi une "réponse forte" au Parlement européen - amené à se prononcer sur le texte - qui a déjà largement salué l’annonce. "C’est une bonne journée pour les femmes à travers l’Europe", se réjouissent les Socialistes et Démocrates. Au Parti populaire européen (centre-droit), on salue le fait que, une fois adoptée par le Parlement et le Conseil, cette directive "permettra un meilleur équilibre entre les hommes et les femmes dans ces emplois (de haut niveau) , alors que des études établissent un lien entre des conseils (d’administration) qui respectent l’équilibre des genres et les performances économiques".
Seuls les Verts émettent des réserves, regrettant que la proposition laisse les Etats membres décider des sanctions à appliquer. "Ce texte manque d’ambition. Le système de quotas est précisément un moyen de pallier l’inefficacité des mesures volontaires et de lutter contre les quotas non dits en faveur des hommes", a souligné l’eurodéputée des Verts, Nicole Kiil-Nielsen, membre de la commission Droits des femmes et de l’Egalité des genres au Parlement européen. "C’est au tour du Parlement européen de jouer son rôle dans le processus législatif et de renforcer le texte qui a été proposé", a-t-elle ajouté.