Luxembourg: Jean-Claude Juncker très menacé

Le Premier ministre du Luxembourg, depuis 18 ans, était menacé ce mercredi par un vote sanction de la chambre des députés. S'il démissionne, la question de sa succession reste ouverte.

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Luxembourg: Jean-Claude Juncker très menacé
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Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Luxembourg depuis 18 ans, était menacé ce mercredi par un vote sanction de la chambre des députés sur un rapport mettant en cause sa responsabilité dans la gestion du service de renseignement, qui pourrait provoquer son départ et des élections anticipées en octobre.

En vieux routier de la politique, M. Juncker, 58 ans, n'a rien dévoilé de sa stratégie. Mais le plus probable semblait l'annonce de la démission du gouvernement de coalition entre son parti chrétien social et le parti socialiste après la défection de son partenaire socialiste.

Doyen des dirigeants européens, au gouvernement sans discontinuer depuis plus de 30 ans, Jean-Claude Juncker est victime de l'usure du pouvoir, accusé d'avoir délaissé son petit pays au profit de l'Europe, et d'avoir ainsi laissé se développer des scandales et un climat délétère dans le Grand Duché.

S'il démissionne, la question de sa succession reste ouverte. Pour beaucoup, M. Juncker, qui reste très populaire, notamment auprès des jeunes, devrait tenter de se succéder à lui-même en étant en octobre tête de liste des chrétiens sociaux, la principale formation politique du pays.

Mais d'autres noms sont évoqués, en particulier celui de Viviane Reding, longtemps la grande rivale de M. Juncker au sein de son parti, exilée depuis près de 15 ans à la Commission européenne à Bruxelles, où elle est actuellement en charge de la Justice.

Une responsabilité "incontestable" 

A partir de 14H00, M. Juncker devait s'expliquer pendant deux heures à la Chambre des députés avant que le rapport de la commission d'enquête parlementaire sur le service de renseignement (SREL), qui met clairement en cause la responsabilité du Premier ministre, ne soit mis au vote.

Une commission d'enquête parlementaire a été créée en décembre 2012 après la révélation d'une écoute faite par l'ancien chef du SREL lors d'un entretien avec le Premier ministre dans le bureau de ce dernier. Le SREL, placé sous l'autorité du Premier ministre, est aussi dénoncé pour des irrégularités et des malversations commises dans les années 2004-2009.

"La commission d'enquête parvient à la conclusion que M. le Premier ministre, en tant que supérieur hiérarchique du service de renseignement, n'avait pas seulement aucune emprise sur son service, mais il a de plus trop souvent omis d'informer la commission de contrôle parlementaire, voire le parquet sur les irrégularités, aberrations et illégalités des opérations entreprises par le service", affirme le rapport.

"La responsabilité politique du Premier ministre est incontestable", conclut le rapport.

Une coalition qui tangue 

Vendredi dernier, lors d'une rencontre avec des lycéens, M. Juncker a glissé qu'il faisait "un de ses derniers actes politiques" de la législature, censée se terminer en mai 2014.

Les socialistes attendent donc de voir quelle sera l'attitude de M. Juncker avant de déterminer leur position: soit la poursuite de la coalition avec les chrétiens sociaux, soit des élections anticipées qui auraient lieu le 20 octobre, selon des documents obtenus par l'AFP.

Mais mercredi matin, le président du Parti socialiste, Alex Bodry, a dit s'attendre à "un geste fort" de sa part, dans une interview au quotidien Luxemburger Wort. Il a indiqué avoir demandé au Premier ministre de faire "un clair mea culpa", ajoutant que ce dernier avait "opté pour une autre option". "Quand on se croit infaillible, il est difficile d'admettre qu'on a fait des erreurs", a-t-il dit.

De leur côté, les deux principales formations de l'opposition, le Parti Libéral et les Verts, sont prêtes à déposer une motion de censure.

La coalition avait déjà fortement tangué le mois dernier lors du dépôt d'une motion de censure par l'opposition, la première depuis 1848. Les socialistes avaient maintenu leur soutien à M. Juncker, au terme d'un débat houleux mêlant des accusations d'immixtion d'un ministre dans le fonctionnement de la Justice et de tentative de déstabilisation d'un magistrat par les services de renseignement.

L'actuel ministre des Finances, Luc Frieden, était accusé d'avoir tenté d'étouffer, lorsqu'il était ministre de la Justice, l'enquête sur une série d'attentats à la bombe commis dans les années 1980, qui ont traumatisé le pays.


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