Syrie: la droite française met Hollande en garde
Insistant sur le fait que "la France doit conserver sa totale liberté d'initiative" vis-à-vis des Américains, M. Copé lui a demandé d'"attendre les conclusions des inspecteurs de l'ONU" avant de passer à l'action militaire.
Publié le 31-08-2013 à 18h46 - Mis à jour le 19-09-2013 à 22h06
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La droite française se démarque désormais clairement de François Hollande sur la crise syrienne, en mettant en garde le président socialiste contre toute décision hâtive d'intervenir militairement au côté des Américains.
L'ex-Premier ministre François Fillon et le président de l'UMP Jean-François Copé ont tiré la sonnette d'alarme à 24 heures d'intervalle devant les risques d'une action militaire contre le régime du président Bachar al-Assad, que Paris, comme Washington, tient pour seul responsable de l'attaque chimique qui, selon Washington, a fait 1.429 morts à Damas le 21 août.
Trois jours après avoir approuvé l'attitude de François Hollande dans le dossier syrien - il l'avait trouvé mercredi "juste sur la forme comme sur le fond" - Jean-François Copé a nettement pris ses distances, alors que, selon un sondage BVA, 64% des Français sont hostiles à une intervention armée.
Insistant sur le fait que "la France doit conserver sa totale liberté d'initiative" vis-à-vis des Américains, M. Copé lui a demandé samedi d'"attendre les conclusions des inspecteurs de l'ONU" avant de passer à l'action militaire. "Le syndrome irakien est présent dans tous les esprits", a fait valoir le numéro un de l'UMP.
L'invasion de l'Irak en 2003 par une coalition emmenée par les Etats-Unis et à laquelle la France n'avait pas participé, avait été justifiée par la présence d'armes de destruction massive qui n'ont jamais été découvertes.
Pour M. Copé, si la responsabilité de Damas était avérée, on ne pourrait cependant "laisser impuni le gazage d'innocents, de femmes et d'enfants". Il a déploré ne pas avoir les "informations nécessaires", François Hollande ayant selon lui "refusé obstinément de recevoir" les chefs de parti.
La veille, François Fillon, par ailleurs en compétition avec Jean-François Copé pour le leadership au sein de l'opposition en vue de l'élection présidentielle de 2017, est apparu encore plus hostile à toute intervention militaire.
Soulignant que la France "ne peut agir à la légère et à la remorque de quiconque, fussent-ils ses alliés et amis américains", il a exhorté le président Hollande à "bien mesurer" les "dangers" d'une action militaire, alors que "la région est une poudrière".
Selon l'ancien Premier ministre, "la seule issue à la guerre civile et confessionnelle qui déchire la Syrie passe par une négociation entre les belligérants, avec notamment le concours de la Russie, de l'Arabie Saoudite et de l'Iran".
Pas de conclusion avant des tests en laboratoire (ONU)
Les experts de l'ONU ne tireront "aucune conclusion" sur l'utilisation d'armes chimiques en Syrie avant le résultat d'analyses en laboratoire actuellement en cours, a déclaré samedi le porte-parole de l'ONU Martin Nesirky.
"L'équipe (d'enquêteurs) a besoin de temps", a-t-il dit, "pour analyser les échantillons" recueillis sur le site d'un massacre présumé à l'arme chimique survenu le 21 août dans le banlieue de Damas et perpétré selon Washington et Paris par l'armée syrienne. Ils remettront ensuite leurs conclusions au secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon qui les transmettra aux Etats membres.
Interrogé sur les affirmations du secrétaire d'Etat John Kerry selon lesquelles Washington n'avait pas besoin des conclusions de l'ONU pour être certain de la culpabilité du régime syrien, il a affirmé que "l'équipe était exceptionnellement bien placée pour établir les faits de manière impartiale et crédible".
Les enquêteurs sont arrivés à La Haye, siège de l'organisation sur l'interdiction des armes chimiques avec les échantillons, les témoignages et les indices recueillis sur place en Syrie et qui seront analysés dans des laboratoires européens. "Avant que l'équipe puisse tirer la moindre conclusion sur cet incident (du 21 août) les analyses en laboratoire doivent être terminées", a-t-il déclaré à la presse.
M. Nesirky s'est refusé à donner un laps de temps précis mais un autre responsable de l'ONU avait auparavant parlé de semaines.
Le mandat des experts est de déterminer s'il y a eu usage d'armes chimiques mais pas de désigner les coupables. "Le mandat est le mandat" et l'ONU s'y tiendra, a affirmé M. Nesirky.
M. Ban a reçu samedi matin à New York Angela Kane, la haute représentante de l'ONU pour le désarmement, de retour de Damas, et a "brièvement parlé" avec le chef des enquêteurs Aake Sellström sans entrer dans les détails de l'enquête. Le Dr Sellström doit lui faire un compte-rendu plus long dimanche par téléphone.
L'armée syrienne a "le doigt sur la gâchette"
L'armée syrienne "est mobilisée, elle a le doigt sur la gâchette", a déclaré samedi à la télévision d'Etat le Premier ministre syrien Waël al-Halqi. Dans une déclaration écrite diffusée par la chaîne officielle, il a ajouté: "l'armée est prête à faire face à tous les défis et à tous les scénarios".
En début de matinée, un haut responsable des services syriens de sécurité a affirmé s'attendre désormais "à une agression à tout moment" et répété que son pays était "prêt à riposter également à tout moment".
"Cette agression (occidentale) non justifiée ne passerait pas sans une riposte", a ajouté ce responsable. Les partisans de frappes défendent "une mauvaise cause, qui n'a rien à voir ni avec la morale, ni le droit international".