Quand des Espagnols demandent l'asile en France pour l'avortement

L'Espagne a récemment durci sa législation en matière d'avortement. Une décision qui suscite l'émoi, la peur et la colère de l'autre côté des Pyrénées.

AFP
Quand des Espagnols demandent l'asile en France pour l'avortement
©REPORTERS / Angeli

Gynécologues, psychiatres, féministes et autres professionnels de la santé en Espagne ont remis jeudi symboliquement plus de 200 "demandes d'asile sanitaire" à l'ambassade de France à Madrid pour dénoncer le projet de loi supprimant quasiment l'avortement.

Aux cris de "Avortement légal pour ne pas mourir", agitant des pancartes proclamant "Mères (et pères) libres", ils étaient environ 150 devant l'ambassade de France venus d'Andalousie, de Galice ou de Madrid, certains vêtus de leur blouse blanche.

"Nous avons remis 220 lettres" de demande d'asile, a affirmé Isabel Serrano, ancienne présidente de la Fédération nationale du planning familial et coordinatrice de "Decidir nos hace libres" (Décider nous rend libres), un collectif rassemblant plus de 300 associations.

"Nous leur avons fait part du danger pour les femmes sur le plan de la santé et juridique, et pour les professionnels de la santé", a ajouté cette gynécologue, aux côtés de collègues du réseau de cliniques spécialisées Acaï.

La délégation a "remercié le gouvernement français qui avec d'autres gouvernements européens, défendent au niveau européen des droits fondamentaux", a-t-elle poursuivi.

Le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy a déclenché un tollé dans les milieux de gauche et féministes en Europe en approuvant un projet de loi qui supprime l'avortement en Espagne sauf en cas de danger prouvé pour la vie ou la santé physique ou psychologique de la femme, ou pour viol ayant fait l'objet d'une plainte préalable.

La loi espagnole actuelle, votée en 2010 sous le gouvernement socialiste, autorise l'avortement jusqu'à 14 semaines de grossesse et jusqu'à 22 semaines en cas de malformation du foetus.

Si ce projet de loi est voté par le Parlement, "nous allons revenir aux temps de la clandestinité et nous ne pouvons pas le permettre", a affirmé à l'AFP Salim Chami, directeur de la clinique madrilène Isadora, spécialisée dans l'interruption volontaire de grossesse.

"On reviendrait aux avortements clandestins ou au tourisme clandestin pour celles qui en ont les moyens au Portugal, aux Pays-Bas ou en France, comme à l'époque de (Francisco) Franco" (1939-1975), a renchéri Eva Rodriguez Armario, directrice de la clinique spécialisée El Sur de Séville.

Or "on sait que 47.000 femmes meurent par an dans le monde à cause des avortements clandestins", a-t-elle souligné.

Marisol Touraine, la ministre française des Affaires sociales qui entend assouplir le droit à l'avortement en France, a dénoncé le projet espagnol qui, selon elle, "renverrait les femmes à l'âge de pierre".

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