Traité transatlantique de libre-échange : la sécurité alimentaire divise
Négociateurs européens et américains s'étaient retrouvés toute la semaine passée à Arlington, près de Washington, pour discuter un accord de libre-échange qui, s'il ne fait pas grand bruit outre-atlantique, suscite de nombreuses craintes sur le Vieux continent.
- Publié le 24-05-2014 à 23h23
- Mis à jour le 24-05-2014 à 23h24
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Négociateurs européens et américains s'étaient retrouvés toute la semaine passée à Arlington, près de Washington, pour discuter un accord de libre-échange qui, s'il ne fait pas grand bruit outre-atlantique, suscite de nombreuses craintes sur le Vieux continent.
Les partenaires se sont quittés vendredi divisés sur la question des exportations américaines de bœuf et de poulet ne répondant pas aux normes sanitaires européennes.
« Les Etats-Unis n'ont pas l'intention de forcer les Européens à manger ce qu'ils ne veulent pas manger », a annoncé le chef des négociateurs américains, Dan Mullaney, lors d'une conférence de presse à l'issue de ce cinquième round de pourparlers.
Son homologue européen, Ignacio Garcia-Bercero, a quant à lui clairement annoncé que les normes sanitaires resteraient contraignantes. « Le bœuf traité aux hormones est interdit par la loi de l'Union Européenne et nous n'envisageons aucun changement », a-t-il dit.
Outre la question des exportations agricoles, le traité transatlantique de libre-échange contient plusieurs autres points contentieux. Les négociateurs devront résoudre ceux-ci avant de pouvoir espérer dissiper, surtout côté européen, les peurs créées par la perspective d'un traité qui représenterait un tiers du commerce international et près de la moitié de l'économie mondiale.
« Dans un monde en pleine globalisation, ces craintes sont compréhensibles », pour Christopher Sands, de l'Hudson Institute, un think-tank conservateur. «Ces peurs portent surtout sur l'harmonisation des règlementations, au point de vue environnemental et sanitaire, notamment. Traditionnellement, les Européens ont une approche plus prudente que les Américains, qui essayent de corriger les problèmes une fois qu'ils y sont confrontés. »
Un autre point de friction porte sur le fait que le traité de libre-échange donnerait aux entreprises la possibilité d'attaquer les Etats dont la politique entraverait leur activité commerciale. Outre-Atlantique, un débat similaire avait lieu dans les années 1990, avant l'entrée en vigueur de l'accord de libre-échange nord-américain entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique. « Il y avait alors cette peur que l'accord donnerait plus de pouvoir aux entreprises », selon Sands. « Nous avons vu que ce n'était pas le cas dans la pratique, lorsque ce sont les Etats qui choisissent les juges chargés d'arbitrer les contentieux. »
Pour Sands, la création d'emploi fera aussi partie des nombreux défis qui attendent les négociateurs. Il faudra pour cela s'assurer que les PME – importants employeurs – n'y perdent pas au change. Paradoxalement, selon Sands, « une libéralisation du marché va sans doute alourdir leur fardeau en terme de régulation. Les nouvelles règles qui voient le jour après une grande libéralisation rendra la participation de certaines petites et moyennes entreprises plus difficile. »
En pleines élections européennes, et alors que les Etats-Unis se dirigent vers des élections législatives cette années, et que la campagne présidentielle gagne déjà en importance avant 2016, le timing des pourparlers pourrait aussi compliquer la tache des négociateurs. Les organes législatifs des deux partis doivent en effet approuver tout accord final.
Pour Christopher Sands, il est possible que les négociateurs annoncent une première victoire sur les points les moins problématiques, afin d'apaiser les craintes des deux côté de l'océan et de faciliter de futurs pourparlers sur les points les plus complexes.
Le représentant américain au Commerce, Michael Froman, a affirmé que les pourparlers allaient s'intensifier dans les prochains mois ; l'objectif étant de finaliser un accord fin 2015.