Elections en Grèce: Syriza vainqueur, à la limite de la majorité absolue

Les Grecs ont délivré dimanche un message sans appel à leur gouvernement en donnant la victoire à Syriza, le parti de gauche radicale d'Alexis Tsipras, qui pourrait devenir lundi le premier dirigeant à rejeter la cure d'austérité imposée par l'Europe depuis la crise.

AFP
Elections en Grèce: Syriza vainqueur, à la limite de la majorité absolue
©Photo News

Les Grecs ont délivré dimanche un message sans appel à leur gouvernement en donnant la victoire à Syriza, le parti de gauche radicale d'Alexis Tsipras, qui pourrait devenir lundi le premier dirigeant à rejeter la cure d'austérité imposée par l'Europe depuis la crise.

Le parti de gauche radicale grec Syriza d'Alexis Tsipras gardait une solide avance dimanche après le dépouillement de près de 40% des bulletins de vote, mais sans qu'on puisse savoir s'il obtiendra la majorité absolue, selon un responsable de la société chargée du dépouillement.

Après le dépouillement de 38,54% des bulletins, Syriza obtenait 35,73% des voix contre 28,48 % à la Nouvelle Démocratie du Premier ministre conservateur Antonis Samaras.

La projection du ministère de l'Intérieur donnait ainsi 148 sièges à Syriza, alors qu'il en faut 151 pour obtenir la majorité absolue.

Michael Cariotoglou, un responsable de Singular Logic, la société informatique chargée du dépouillement, a estimé que "le thriller continuait" quant à cette possible majorité absolue.

Un ministre du gouvernement grec a même reconnu la défaite. Détenteur du portefeuille des Réformes administratives, Kyriakos Mitsotakis, a "félicité Syriza", prévenant toutefois le parti qu'il "aurait bientôt à faire face à une situation difficile pour le pays".

Par ailleurs, le parti d'inspiration néonazie Aube dorée semblait s'installer fermement à la troisième place, avec 6,39% des suffrages et 17 sièges (un de moins qu'en 2012), devant "La rivière", nouveau parti de centre gauche, qui obtenait 5,77% et 16 sièges.

Selon le ministère de l'Intérieur sept partis composeront le nouveau gouvernement, ceux ayant obtenu moins de 3% des voix n'y ayant pas droit.

Ancien parti fort, le Pasok (socialiste), réduit ces deux dernières années à gouverner avec ND, son rival historique, obtenait 4,88% et 13 sièges, selon les dernières projections, contre 33 en 2012.

"Une victoire historique"

"Cela semble être une victoire historique" et c'est "un message qui n'affecte pas seulement les Grecs mais qui résonne dans toute l'Europe", a déclaré à la télévision Mega Panos Skourletis, le porte-parole de Syriza.

La victoire a été saluée par une explosion de joie au siège de Syriza, en plein centre d'Athènes.

Des centaines de personnes, venues de toute l'Europe, ont chanté Bella Ciao, agité des drapeaux. Certaines pleuraient.

Le scrutin était attendu anxieusement par les partenaires européens d'Athènes, inquiets de la volonté de Syriza de "fermement" renégocier l'énorme dette grecque et défier de manière inédite les programmes d'austérité imposée par l'Union européenne.

De nombreuses réactions

La première réaction d'un des principaux économistes de Syriza, Yannis Milios, dimanche soir, était claire. Interrogé par l'agence grecque ANA, il a lancé que le "programme (représenté par l'actuel ministre des Finances Guikas Hardouvelis) est mort".

Les analystes de la banque allemande Berenberg ont évoqué "une victoire de la colère sur la peur, de l'imaginaire sur la raison". Ils ont décrit M. Tsipras comme "un insurgé populiste". Mais l'Europe "ne lui épargnera pas d'accepter la réalité : on ne peut pas dépenser un argent qu'on n'a pas", ont-ils insisté.

Le quotidien allemand Bild titrait de son côté dans son édition de lundi : "Peur sur l'euro, Tsipras triomphe".

En Italie, Sandro Gozi, secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, a pris acte de la victoire de Syriza. "Nous pensons qu'après ce vote nous aurons de nouvelles opportunités pour poursuivre le changement en Europe en faveur de la croissance, des investissements et de la lutte contre le chômage".

Le succès de Syriza, s'il est confirmé, va donner en revanche un grand espoir aux autres formations de gauche radicale en Europe.

En France, le leader du parti de gauche Jean-Luc Mélenchon a évoqué "une lame de fond", "une page nouvelle pour l'Europe".

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Les raisons de la victoire

Le gouvernement de M. Samaras a été sanctionné pour avoir essayé de satisfaire au maximum les exigences de réformes de la troïka des créanciers d'Athènes (Banque centrale européenne BCE, UE, FMI), en échange de 240 milliards d'euros prêtés au pays depuis 2010. En effet, la facture est lourde pour la population victime d'un taux de chômage à 25%, ou de réductions de salaires drastiques.

Alexis Tsipras, qui souhaite mettre en vigueur des mesures immédiates comme une remontée du salaire minimum de 580 à 751 euros, a déjà prévenu qu'il ne se contenterait pas d'un simple aménagement de la dette (175% du PIB, plus de 300 milliards d'euros).

Prenant exemple sur des concessions faites après la guerre à l'Allemagne - aujourd'hui chantre de l'orthodoxie budgétaire en Europe - il veut une importante réduction du principal de cette dette. Les marchés financiers risquent de ne pas apprécier, même si personne, pas même M. Tsipras, ne souhaite voir revenir le spectre du "Grexit", une sortie de la Grèce de la zone euro.

Dans un bureau de vote du Pirée, Vaïa Katsarou, 49 ans, avocate, résumait le sentiment général vis-à-vis de Syriza : "C'est un risque mais les démunis n'ont rien à perdre".

Le plus jeune Premier ministre

Si les sondages se confirment, Alexis Tsipras, 40 ans, deviendra le plus jeune Premier ministre du pays depuis 150 ans. (Découvrez son portrait ici)

Le coeur du programme de Syriza est de mettre "un terme à l'austérité" et de renégocier la dette immense du pays, qui atteint 175% du PIB.

Le parti socialiste Pasok, pilier de la vie politique grecque durant quarante ans, pourrait essuyer une défaite historique avec un score estimé entre 4 et 6%, a priori au-dessus du seuil des 3% permettant d'obtenir des sièges au parlement.


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