Mission B-Fast à peine arrivée, sitôt repartie: les raisons d'un fiasco

Apporter une aide urgente pour ne pas se voir reprocher d'être resté indifférent face à une catastrophe majeure. Se confronter aux réalités du terrain et aux consignes des autorités locales... Autant d'aléas qui ont précipité le retour de la "Belgian First Aid & Support Team" (B-Fast) au pays, moins d'une semaine après son départ.

Rédaction en ligne, avec Valentin Dauchot et Belga
Mission B-Fast à peine arrivée, sitôt repartie: les raisons d'un fiasco
©Belga

"B-Fast, c'est plutôt B-Slow", "Je suppose que B-Fast est furious"... Jeudi soir, les utilisateurs de Twitter rivalisaient de bons mots pour qualifier la brièveté de la mission B-Fast partie au Népal pour venir en aide aux victimes d'un séisme qui aurait fait plus de 6.000 morts selon un dernier bilan. Après avoir affronté un véritable parcours du combattant de 45 heures, les membres de B-Fast étaient arrivés à Katmandou via New Delhi mardi. Dans la capitale népalaise, ils se sont retrouvés noyés dans le flot d'aide humanitaire venue du monde entier. Après avoir crapahuté à 150 km en dehors de Katmandou, les secours belges ont soigné quelques villageois sinistrés. Ils ont ensuite été contraints de mettre fin à leur mission prématurément.
Pourquoi une telle rapidité à intervenir? Voir et être vu
"Depuis dix ans, on assiste à une prolifération des ONG dans la gestion des grandes catastrophes", analyse le chercheur du Cetri Frédéric Thomas interrogé par "La Libre". "Le premier mois qui a suivi le tremblement de terre en Haïti, on en a recensé plus de 1 000 sur le terrain. Ce qui pose un problème évident de coordination logistique." "Une assistance internationale est indispensable", reconnaît le chercheur. "Mais elle doit d’abord être filtrée ou elle ne fera que compliquer la tâche des autorités."
Et Frédéric Thomas de préciser: "Au Népal, une fois de plus, on voit chaque pays arriver avec son équipe et son matériel sans même connaître les besoins réels sur le terrain. Or, il faut stocker ce matériel, nourrir, loger et transporter ces intervenants, et on voit bien que ça ne fonctionne pas puisque l’aéroport de Katmandou est complètement congestionné. Au lieu de vouloir être absolument le premier arrivé sur place pour communiquer là-dessus, il vaudrait mieux attendre 24 heures et évaluer davantage les besoins de la situation. Les pays qui connaissent beaucoup mieux le terrain, comme l’Inde dans ce cas-ci, sont beaucoup plus efficaces."
C'est bien l'un des nœuds du problème: qu'aurait-on dit de la Belgique si elle avait tardé à intervenir? Entre accusation d'indifférence et rapidité d'action, le gouvernement a fait son choix.
Que s'est-il passé sur place? "Vous êtes bien gentils, mais..."
Une fois sur le terrain, les équipes de B-Fast ne font pas ce qu'elles veulent. Elle apportent leur aide là où les autorités locales l'ont décidé, en concertation avec les Nations Unies. Au Népal, les Belges voulaient apporter une assistance médicale ou reconstruire des infrastructures cruciales. "A notre grande surprise, nos propositions n'ont pas été retenues", déplore le major Gilles du Bois d'Aische, chef de mission. "C'est dommage, mais nous ne sommes qu'un service gouvernemental qui offre ses services à un autre gouvernement."
Les membres de B-Fast ont aussi voulu vérifier l'état des hélicoptères. Mais cela leur a été refusé. "Nous avons eu l'impression d'être victimes de manœuvres de ralentissement", déclarait jeudi Rik Telamon, des services de sauvetage. "Nous avons offert toute l'aide possible, mais finalement il nous a été carrément dit que cette phase du travail était terminée."
Combien ça a coûté?
"L'argent du contribuable belge n'a pas été bien utilisé", estime Dirk Van der Maelen, député sp.a cité par l'agence Belga jeudi. M. Van der Maelen souligne que des experts insistaient sur l'importance d'amener un hôpital de campagne sur place. L'idée n'a pas été retenue. 
Pour le député, qui se base sur le montant d'une mission précédente de même ampleur, cette opération au Népal aura donc coûté aux alentours de 150.000 à 200.000 euros. Vérification faite par nos soins, c'est moins que lors du typhon aux Philippines en novembre 2013 (428.000 euros), mais similaire à la somme allouée pour l'opération "choléra en Haïti" de décembre 2010 (148.000 euros).


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