Un "socialiste" du Vermont fait de l’ombre à Hillary Clinton
Le sénateur Bernie Sanders fait campagne tambour battant et devient une menace. Éclairage de Philippe Paquet.
Publié le 08-07-2015 à 18h14 - Mis à jour le 08-07-2015 à 19h12
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Le sénateur Bernie Sanders fait campagne tambour battant et devient une menace.Pour Hillary Clinton, devenir la candidate du Parti démocrate pour l’élection présidentielle de novembre 2016 ne s’apparentera peut-être pas à une navigation paisible sur un long fleuve tranquille. L’intéressée a toujours aimé détromper ceux qui lui prédisaient une victoire sans opposition, mais elle ne s’attendait sans doute pas à rencontrer aussi vite un défi aussi sérieux et aussi inattendu que celui que lui lance un relativement obscur sénateur du Vermont : Bernie Sanders.
Sanders n’est, certes, pas un inconnu aux Etats-Unis. A bientôt 74 ans, il serait même plutôt une icône de la vie politique américaine : aucun "indépendant" n’a siégé aussi longtemps que lui au Congrès à Washington. Après avoir été le maire de Burlington, la plus grande ville du Vermont, il a été le député de cet Etat du Nord-Est pendant seize ans, avant d’en devenir le sénateur en 2006, réélu en 2012 avec plus de 71 % des voix. S’il vote généralement avec les Démocrates, il revendique sa différence et n’hésite pas à se qualifier de "socialiste" - un mot qui peut sonner comme une injure aux Etats-Unis (les Républicains reprochèrent à Barack Obama d’en être un…).
Menace dans l’Iowa et le New Hampshire
Quand Bernie Sanders annonça sa candidature à l’investiture démocrate pour la présidentielle de 2016 (il est un des quatre concurrents d’Hillary Clinton à s’être présentés jusqu’ici), on pensait qu’il viendrait seulement pimenter la campagne, en rappelant à l’ex-Première Dame ses idéaux de gauche. Or, en quelques semaines, au fil de meetings qui ont drainé des foules enthousiastes, il a réussi à devenir une menace pour la favorite incontestée du scrutin. Dans l’Iowa et le New Hampshire, qui donneront le coup d’envoi des primaires en janvier, l’avance de Clinton sur Sanders est passée de plus de trente points à moins de dix…
En proposant de taxer davantage les riches, de réduire l’endettement des étudiants à l’université, de mener des grands travaux publics pour relancer l’économie ou de simplifier le système de l’assurance-maladie, Bernie Sanders s’est taillé une popularité instantanée. Son franc-parler lui vaut de nombreux ralliements, dont celui de Dudley Dudley, une activiste démocrate du New Hampshire qui se fit un nom en empêchant Onassis d’y construire une raffinerie dans les années 1970. Le soutien d’une femme de caractère qui lui échappe : un comble pour Hillary.
Un message adressé aux donateurs
Les primaires ne commenceront que dans six mois, mais Clinton contemple d’ores et déjà avec effroi la perspective d’une réédition du scénario cauchemardesque de 2008, quand elle avait perdu l’Iowa. On peut, certes, gagner l’investiture et l’élection présidentielle sans triompher dans ce petit Etat agricole du Midwest. Néanmoins, ce scrutin envoie traditionnellement un signal aux électeurs et aux donateurs, en établissant un premier hit-parade. Il s’agit donc pour les perdants de rebondir au plus vite, au risque de s’enfoncer dans une image fatale de "loser".
Hillary Clinton avait gagné en 2008 dans le New Hampshire et retrouvé ainsi immédiatement des couleurs. Cette fois, la performance de Bernie Sanders n’autorise à ce stade aucune certitude. On comprend l’agitation dans l’entourage de la candidate, qui se demande s’il ne faudrait pas, déjà, repenser sa stratégie. De quoi tomber brutalement du nuage sur lequel elle semblait voguer.