Trump président, les marchés financiers de la planète rentrent dans une zone de fortes turbulences
Le monde économique perçoit la victoire de Donald Trump comme un saut dans l’inconnu.
Publié le 09-11-2016 à 04h42 - Mis à jour le 09-11-2016 à 08h40
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Le monde économique perçoit la victoire de Donald Trump comme un saut dans l’inconnu. Analyse.
Un saut dans l’inconnu. Voilà bien le sentiment qui prédominait ce mercredi matin dans le monde financier et économique après l’annonce de la victoire surprise de Donald Trump.
Un séisme politique, tant la personnalité du candidat républicain est incontrôlable et son programme inquiétant sur bien des points, et dont l’onde de choc fera trembler les places financières de la planète. D’ailleurs, les places asiatiques ont donné le ton : à la mi-journée là-bas et dans la nuit de mardi à mercredi en Europe, alors que Trump confirmait son avance dans l’Etat stratégique de la Floride, l’indice Nikkei chutait déjà de 2,23 %, puis même 6 % un peu plus tard alors que la victoire du candidat républicain se dessinait. Dans le même temps, les marchés américains sur les contrats à terme dévissaient eux aussi. Ainsi, vers 21h40 à New York, le contrat à terme sur l’indice Dow Jones chutait de près de 480 points, cédant 2,63 % tandis que celui sur l’indice S&P 500 glissait de 3,13 %. Avant des reculs de plus de 5 % là aussi.
Secousses boursières
A quoi doit-on s’attendre à l’ouverture des marchés européens et de Wall Street ce mercredi ? De l’avis de pas mal d’observateurs, les bourses mondiales pourraient entrer à court terme dans une solide zone de turbulences. "On pourrait s’attendre à une correction de 5 à 10 % de la Bourse américaine sauf si Trump clarifiait rapidement certaines de ses positions ou s’il était empêché d’appliquer certains pans de son programme, faute d’une majorité au Congrès", nous avait expliqué mardi matin Bruno Colmant (Degroof Petercam), ajoutant que l’on "sous-estimait probablement en Europe cette lame de fond Trump et la rancœur de la classe moyenne américaine". Une classe moyenne et des couches populaires en partie larguées par les effets de la mondialisation, de la désindustrialisation et d’une digitalisation croissante de l’économie de l’Oncle Sam. Mais la Chambre des représentants restera sous le contrôle des Républicains, selon les projections de plusieurs chaînes d’informations américaines. Mais on le sait, Donald Trump est ouvertement contesté au sein même de son parti : il devra donc "composer" avec les élus républicains au Congrès pour pouvoir mener à bien sa politique, y compris sur le terrain économique, et probablement arrondir les angles.
Mais les recettes du "Make America great again" à la sauce Trump inquiètent les Bourses. Une politique ouvertement isolationniste des Etats-Unis, qui fait la part belle aux mesures protectionnistes, à la remise en cause des grands accords commerciaux (TTIP, Alena,…) et qui, pour certains économistes, pourrait amener la première économie de la planète sur la voie d’une stagflation, soit un ralentissement de l’économie réelle couplée à de l’inflation. Avec des conséquences potentiellement planétaires.
Autre sujet d’inquiétude pour l’équilibre de l’économie mondiale : le bras de fer que Trump pourrait engager rapidement avec la Chine, premier créancier des Etats-Unis. Durant sa campagne, le candidat républicain a virilement menacé le géant asiatique, qu’il accuse de concurrence déloyale et de détruire les emplois made in USA, d’imposer à hauteur de 45 % les importations chinoises. Une menace qui si, elle mise à exécution, pourrait déboucher sur une "guerre des monnaies" et des dévaluations compétitives en cascade dans un certain nombre de pays. Ce qui alimenterait l’inflation et une hausse des taux….
"Les investisseurs vont imaginer le pire"
Il y a quelques jours déjà, alors que la cote de Donald Trump remontait dans les sondages, un mini-vent de panique avait déjà soufflé sur les places financières du globe. Wall Street avait même affiché neuf séances consécutives de baisse, ce qui n’était plus arrivé depuis… 1980. "Si Trump devient président, les investisseurs vont probablement imaginer le pire et exprimer leurs inquiétudes en vendant. Une forte baisse immédiate semble d’autant plus probable que les actuels seuils de résistance de long terme seraient franchis", expliquait mardi une note d’analyse de BNP Paribas Fortis, la première banque du pays. Tout en ajoutant un peu plus rassurante sur le long terme : "Tout comme le Brexit, le bon sens devrait prévaloir après quelque temps. […]. Parce que ce changement de pouvoir ne devrait pas faire dérailler la croissance mondiale qui montre actuellement des signes d’amélioration. Le programme de relance domestique de Trump (NdlR : 500 milliards de dollars d’investissement dans les infrastructures) devrait soutenir cette croissance. De plus, la Réserve fédérale américaine (Fed) pourrait ne pas relever ses taux en décembre si les conditions financières se détériorent".
L’un des enjeux sera donc de voir si Trump une fois devenu président en janvier prochain prendra certaines distances avec le Trump encore hier candidat et s’il reviendra sur certaines promesses de campagne. Optera-t-il pour une forme de "realpolitik" économique et financière ?
En attendant, cela risque donc de secouer méchamment sur les places financières dans les prochains jours. Alors que faire dans ce contexte chahuté ? Sans doute, réduire les facteurs de vulnérabilité par exemple en prenant, temporairement, quelque distance avec les actions américaines, leur préférant les actions européennes. En optant aussi pour les traditionnelles valeurs refuges, au premier rang desquels on trouve l’or. Dès mardi, alors que la victoire de Trump se profilait, le métal jaune s’appréciait de plus de 5 %. Un signe qui ne trompe pas…