Voici pourquoi l'Italie a dit non à Matteo Renzi
Publié le 05-12-2016 à 16h01 - Mis à jour le 05-12-2016 à 16h02
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Méfiance envers le chef du gouvernement, profond attachement à la Constitution, mécontentement général qui a déjà poussé au Brexit ou à l'élection de Donald Trump : les raisons de l'échec de Matteo Renzi dans sa tentative de faire adopter sa réforme constitutionnelle en Italie sont multiples.
Un vote contre Renzi
Le bouillonnant Florentin, omniprésent depuis des semaines dans les médias et sur les réseaux sociaux pour défendre "sa" révision de la Constitution, est aussi perçu comme un personnage arrogant, dont le message volontariste inspiré du "Yes we can" de Barack Obama s'est usé en 1.000 jours à la tête du gouvernement.
"Il y a une forte antipathie à l'égard de Renzi", note Antonio Noto, directeur de l'Institut de sondage et de recherches IPR Marketing. "On vote contre Renzi pour voter contre l'establishment, mais aussi contre son style".
"Je n'aime pas Renzi. Son bilan est désastreux, il a surtout pensé à faire sa propre publicité", explique à l'AFP Cecila Carrara, avocate dans un cabinet international.
Attachement à la Constitution
Comme en 2006, lorsque 60% des votants avaient déjà rejeté une autre réforme défendue par Silvio Berlusconi, les Italiens ont montré leur réticence à toucher à l'équilibre des pouvoirs défini dans la Constitution de 1948, rédigée dans l'objectif d'empêcher tout retour au fascisme.
"Fondamentalement, les Italiens ne veulent pas d'un homme fort. Ils veulent des garanties, parce que cet homme fort pourrait prendre des décisions sans eux et ils n'ont pas confiance", explique Giovanni Orsina, professeur de Sciences politiques à l'université Luiss.
La Constitution de 1948 a été "écrite par des gens choisis, éclairés, pas comme les politiciens que nous avons maintenant et qui ne sont pas à la hauteur", souligne Emanuela Carosi, vendeuse d'oeufs sur un marché romain.
Mécontentement général
"Les jeunes sans travail, les ouvriers qui se sentent menacés par les migrants et les employés dont les salaires ne sont plus suffisants (ont voté non). C'est le peuple de la révolte, expression du même malaise qui a produit le Brexit au Royaume-Uni et a porté Donald Trump à la Maison Blanche", écrit Maurizio Molinari, directeur de La Stampa, alors que, selon les sondages, les populistes du Mouvement 5 étoiles (M5S) et, dans une moindre mesure, de la Ligue du Nord, ont le vent en poupe.
La dimension économique a été essentielle : "sur les 100 districts au sein desquels le taux de chômage est le plus faible, le oui l'emporte à 59%. Pour les 100 districts ayant le taux de chômage le plus élevé, le non l'emporte avec 65,8%", relève Philippe Waechter, directeur de recherche économique chez Natixis asset management. Le non a d'ailleurs été encore plus fort dans le Sud défavorisé.
"La Constitution n'est pas le problème fondamental de l'Italie. C'est l'amélioration des conditions de vie de tant de gens qui souffrent et je pense que cette secousse nous fera sans doute du bien", déclare à l'AFP Fabrizio Sabelli, professeur d'université.